Dans ses relations avec la France, Alger veut regarder vers l'avenir; sans pour autant renoncer au repentir français qui reste une exigence de tous les Algériens. Peut-on avoir des relations apaisées avec son ancienne puissance colonisatrice surtout lorsqu'elles sont conditionnées? L'Algérie demande à la France des excuses, une repentance, pour ses crimes commis pendant la période coloniale. L'actuel président français, Nicolas Sarkozy, reconnaît qu'«il y a eu beaucoup d'ombres, de souffrances et d'injustices». Il refuse, cependant, le repentir: «Je suis pour la reconnaissance des faits, pas pour le repentir qui est une notion religieuse et n'a pas sa place dans les relations d'Etat à Etat», a déclaré le président français lors de sa visite en Algérie, le 10 juillet dernier. Une nouvelle phase dans les relations algéro-françaises semble, cependant, se dessiner avec, en arrière-plan, le nécessaire devoir de mémoire. Elle devrait déboucher sur le partenariat d'exception appelé, de leurs voeux, par les présidents algérien et français. C'est l'option qui semble avoir été choisie en haut lieu. L'Algérie et la France sont sur la même longueur d'onde, du moins pour ce qui est d'établir des relations économiques et commerciales mutuellement profitables. Le réchauffement des relations entre les deux pays a pris corps lors du séjour éclair du président français dans la capitale algérienne. Les jalons y ont été posés. Union méditerranéenne, lutte antiterroriste, coopération économique, circulation des biens et des personnes... Les deux chefs d'Etat algérien et français jouent la redynamisation des relations entre les deux pays. «Les jeunes générations sont tournées vers l'avenir plutôt que vers le passé», a déclaré Nicolas Sarkozy. Les Algériens lui emboîteront-ils le pas? Les lunes de miel du «couple Algérie-France» ont souvent été de courte durée. La loi du 23 février 2005 votée par le Parlement français a glorifié la présence française en Algérie. Elle a envenimé les rapports entre les deux pays. La réaction en Algérie ne s'est pas fait attendre. Dans la foulée, le président de la République algérienne, M.Bouteflika, a fustigé le colonialisme français. Il a dénoncé le génocide et les enfumades dont ont été victimes les populations algériennes. C'était à l'occasion de la commémoration du 60e anniversaire des événements du 8 Mai 1945. Sur instruction du président français de l'époque, Jacques Chirac, l'Assemblée nationale française a amendé la loi du 23 février 2005. Les esprits se sont quelque peu apaisés. Le chef de l'Etat français, au même titre que son homologue algérien, tenait à «son traité d'amitié». Sa visite en Algérie a été mémorable. Les Algériens avaient démontré leur amitié à la France. De part et d'autre des deux rives de la Méditerranée, des liens puissants se sont tissés. Reste à écrire l'Histoire. La puissance coloniale a commis des atrocités en Algérie. L'Algérie a été occupée au son des fusils et des canons. La résistance à l'occupant y a été farouche et ininterrompue. L'Indépendance a été arrachée au prix d'un lourd tribut humain. Le sacrifice des meilleurs fils de l'Algérie. A l'appel de leur dignité et de leur liberté confisquées, la France a répondu par les armes et la torture. «Si nous venions à mourir, défendez nos mémoires.» C'est le message légué par les martyrs algériens. Didouche, Ben M'hidi, Ben Boulaïd...L'Algérie ne peut les oublier. Dans une récente conférence de presse, Mohamed Chérif Abbas, ministre des Moudjahidine, a déclaré: «Nous ne voulons pas ressusciter les rancoeurs avec le peuple français, mais plutôt transmettre les vérités historiques aux générations montantes qui n'ont pas vécu ces événements.» Mais cet apaisement ne peut être total et serein sans un apurement des séquelles du passé colonial français. D'une manière ou d'une autre, la France doit assumer son passé colonial.