Très serein au lendemain d'une bipartite qui a validé les augmentations de salaires, Belkhadem réplique au secrétaire général du RND. Une grande première. Jamais depuis la désignation de Abdelaziz Belkhadem à la tête du gouvernement et la démission énigmatique, de son prédécesseur Ahmed Ouyahia, la tension entre les deux hommes n'a été aussi perceptible que ces derniers jours. Conjoncture politique oblige. Deux mois et demi nous séparent des élections locales. Les calculs partisans semblent prendre le dessus. Hier, c'était au tour du chef du gouvernement, et non moins secrétaire général du FLN, de contre-attaquer. Approché par l'Expression au sujet des critiques vertement formulées à son égard par le SG du Rassemblement national démocratique, M.Belkhadem commence par rejeter catégoriquement les arguments de son allié présidentiel: «Il n'y a pas de crise sociale en Algérie. Du moins on ne la ressent pas au gouvernement. Qu'on nous explique son contexte et ses répercussions.» Hier, M.Belkhadem a été très serein au lendemain d'une bipartite qui a validé les augmentations de salaires pour les employés de la Fonction publique, il n'a pas hésité à classer les tirs croisés contre le gouvernement dans le cadre des «spéculations» et «des surenchères» qui alimentent la scène nationale «à la veille de chaque rentrée sociale.» «Ces campagnes répétitives n'auront aucun effet sur le travail du gouvernement qui est déterminé à aller de l'avant dans le seul souci d'assurer l'essor de notre économie et d'améliorer la vie des Algériens.», ajoute-t-il en marge de la cérémonie de l'inauguration par le président de la République du nouveau siège du Conseil constitutionnel. Un pas important a été fait «hier (lundi) en coordination avec l'Union générale des travailleurs algériens (Ugta)» Les fonctionnaires ressentiront, selon lui, les fruits de cet important accord dés son entrée en application. A ce sujet, il tranquillise les syndicats et le front social quant à la mise en oeuvre de cet accord qui ne saurait tarder. «On attend la décision du président de la République qui va trancher au courant de ce mois.» Autrement dit pour le chef du gouvernement, «il n'y a pas lieu de lancer, (comme l'a fait M.Ouyahia) le signal d'alarme.» Rappelons que le SG du RND a déclaré dans une rencontre tenue au siège de son parti, ce jeudi, qu'«il existe une crise sociale en Algérie que nul ne peut ignorer. Cette situation n'a pas besoin de solution conjoncturelle mais de réformes de fond.» Pour Ouyahia, «ni la pomme de terre, ni le lait, ni le sucre», ne sont à l'origine «du malaise social». Le problème «est beaucoup plus profond». Il est, à en croire Ahmed Ouyahia, en relation directe avec la gestion des affaires de l'Etat et les orientations économiques du gouvernement. Plus explicite, il estime que la crise de l'été a démontré les limites de la politique sociale du gouvernement. Une thèse qui n'est point partagée, on s'en doute, par M.Belkhadem: «Le gouvernement a initié des réformes, qui ont porté leurs fruits. Quant à l'augmentation des prix de certains aliments de consommation de base vous pouvez vérifiez vous-même que les produits ont flambé dans les marchés internationaux. Cela n'a rien à voir avec les orientations économique du gouvernement.» Notre interlocuteur défend bec et ongles son programme et estime que le gouvernement intervient quand la situation l'oblige pour «gérer les situations de crise et assurer l'alimentation du marché algérien en produits de base. C'est ce qu'on a fait aussi pour la pomme de terre et le lait».Le contrôle des réseaux d'importation de la pomme de terre par les réseaux mafieux et les lobbies, comme l'a insinué M.Ouyahia. Abdelaziz Belkhadem, dément ces accusations. «L'existence de défaillance ou de lacunes dans la chaîne d'importation de ce légume ne veut absolument pas dire qu'il existe une mafia.» Son allié stratégique, en l'occurrence le SG du RND, a surpris tout son monde en déclarant devant ses cadres que «nous assistons à un véritable pillage de la richesse nationale» et d'ajouter: «Quand j'évoque les lobbies, je ne suis pas en train d'inventer une situation. Il est encore loin de mon intention de cacher des vérités au peuple algérien. C'est une réalité en face de laquelle l'on est appelé à agir avec fermeté et rigueur.» Le torchon brûle donc entre les deux hommes. Si l'on ajoute les déclarations critiques du président du MSP, Boudjerra Soltani, on est en droit de s'interroger sur l'avenir de la coalition gouvernementale, mais tout d'abord sur celui de l'Alliance qui prépare une rencontre au sommet pour le 10 septembre. On note par ailleurs que le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a été honoré hier par l'Union des tribunaux et conseils constitutionnels arabes et par la Commission de Venise du Conseil de l'Europe, à l'occasion de l'inauguration du nouveau siège du Conseil constitutionnel.