«Le Maroc débourse quotidiennement une cagnotte de 3 millions de dollars pour les besoins de la propagande». Le Maroc jongle et temporise. Le royaume de Sa Majesté n'a pas encore donné son accord pour un troisième round des négociations avec le Front Polisario, annoncé vers la fin de l'année en cours par Peter Van Valsum, l'envoyé personnel de Ban Ki-moon pour le Sahara occidental. Le Maroc a prétexté la tenue des élections législatives, alors que ce suffrage a déjà eu lieu le 7 septembre dernier. C'est ce qu'a laissé comprendre l'ambassadeur sahraoui à Alger, Mohamed Yeslem Beissat, intervenant lors d'un point de presse tenu lundi soir à Alger. «Entre le premier round des négociations et le second, le Maroc a opté pour l'escalade et la guerre médiatique», indique l'ambassadeur sahraoui, comme pour relever, de nouveau, l'absence de volonté et de bonne foi chez la partie marocaine. C'est-à-dire que le Royaume alaouite n'a pas changé d'un iota sa position depuis l'entame des conciliabules. «Le Maroc débourse quotidiennement une cagnotte de 3 millions de dollars pour les besoins de la propagande», affirme, par ailleurs, à la presse, Mohamed Yeslem Beissat. Impensable! Pourtant, «la question sahraouie est l'un des cas classiques de décolonisation qui peut être réglé en trois heures de démocratie seulement», précise encore l'ambassadeur sahraoui. Pour lui, le dialogue est une opportunité à saisir, mais surtout une occasion pour parvenir à l'organisation d'un référendum d'autodétermination dans les territoires sahraouis. Le Maroc «doit prendre conscience que ces négociations constituent une vraie chance pour la paix et qu'il ne doit pas la gâcher comme il n'a cessé de le faire depuis plus de trente ans», a-t-il encore dit, faisant le récapitulatif des chances de paix offertes pour les plans de paix de l'Onu de 1990 et de Baker de 2003, «qui avaient présagé une solution définitive au conflit», mais que Rabat a rejetés. Mohamed Yeslem Beissat a fini par dire que le troisième round des pourparlers maroco-sahraouis se tiendra, probablement, en décembre prochain à Genève. «La balle est dans le camp des Marocains», a-t-il toutefois insisté. Le Maroc et le Front Polisario, les deux parties au conflit depuis 32 ans, ont tenu les 18 et 19 juin, puis les 10 et 11 août, deux rounds de négociations à Manhasset, près de New York, aux fins de parvenir à une solution politique du contentieux sahraoui. Ces négociations se sont déroulées sous les auspices de l'Onu, en application de la résolution 1754, votée par le Conseil de sécurité de l'Onu le 30 avril dernier. Cette même résolution a appelé le Maroc et le Front Polisario à «engager de bonne foi des négociations directes et sans conditions préalables» aux fins de parvenir à une solution politique juste et mutuellement acceptable, qui garantit le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination L'ambassadeur sahraoui à Alger juge que c'est encore trop tôt pour évaluer les précédents rounds de négociations. «C'est difficile de tirer des conclusions. Il faut que la communauté internationale et les Nations unies exercent des pressions sur la partie marocaine», a déclaré dans la foulée Mohamed Yeslem Beissat. Le Maroc, indique aussi le conférencier, n'a fait jusqu'ici que ressasser son plan dit de «large autonomie pour le Sahara occidental», feignant d'oublier qu'aucun pays au monde, et encore moins l'ONU, ne lui reconnaît une souveraineté sur ce territoire et surtout que les négociations en cours doivent se faire «sans préalable», ce que semble exclure Rabat qui présente son projet comme préalable, allant à l'encontre de l'esprit et de la lettre de la résolution 1754. Le représentant diplomatique sahraoui à Alger a estimé, par ailleurs, que la victoire du parti de l'Istiqlal aux élections législatives marocaines constitue bel et bien «une mauvaise nouvelle pour les négociations, ainsi que pour la paix et la stabilité dans la région, car c'est l'idéologie de ce parti qu'exprime le Maroc dans ses politiques expansionnistes». En un mot, la victoire de l'Istiqlal signifie simplement et clairement «la résurgence de l'idéologie expansionniste» au Maroc. En définitive, la communauté internationale est dans l'attente d'une suite qualitative du processus de négociations, tandis que le dossier sahraoui devra être abordé en assemblée générale à l'ONU, dont la session s'est ouverte depuis hier. La question devra être aussi débattue au niveau de la quatrième commission de décolonisation de l'ONU. Un rendez-vous important pour les Sahraouis.