Cette rencontre sera consacrée à l'avenir des entreprises espagnoles en Algérie et de Sonatrach en Espagne, sans oublier l'immigration et les questions de sécurité dans la région du Maghreb. Une rencontre au sommet entre les deux chefs de gouvernement algérien et espagnol est prévue avant la fin de l'année en cours. L'agence espagnole Europa presse qui a publié l'information, citant des sources proches du ministère espagnol des Affaires étrangères, indique que cette rencontre «sera l'occasion pour les deux pays d'examiner l'ensemble des questions bilatérales». Plus précisément, «l'avenir des entreprises espagnoles en Algérie et de Sonatrach en Espagne», sans oublier bien sûr «l'immigration et les questions de sécurité dans la région du Maghreb». Mais tout porte à croire que ces deux dernières questions, malgré leur importance stratégique, seront reléguées au second rang et que le sommet sera exclusivement économique. Conjoncture oblige. Entre Alger et Madrid la tension est montée d'un cran. Des litiges sont venus empoisonner l'air des affaires commerciales bilatérales. Et pourtant, jusqu'à une date récente, la coopération économique entre les deux pays servait d'exemple pour toute la région. Les diplomates seront-ils en mesure de réussir là où les businessmen ont échoué? Le P-DG de Repsol, Antoine Brufau, lui, est confiant. S'exprimant jeudi devant des journalistes espagnols, il n'a pas écarté un accord à l'amiable entre sa compagnie et Sonatrach, avant la fin du processus d'arbitrage dans l'affaire de la résiliation du contrat de réalisation du complexe GNL de Gassi Touil. «Des tentatives de réconciliation sont en effet menées à tous les niveaux entre les deux gouvernements mais aussi via le Centre international d'accord des différends relatifs aux investissements (Ciadi).» Mais les positions de Antoine Brufau expriment un entêtement chez la partie espagnole qui risque fort de saboter les pourparlers entre les deux pays. En effet, pour Antoine Brufau, le projet Gassi Touil était en bonne voie, malgré quelques retards qu'il a qualifiés de «nécessaires». Il reproche à Sonatrach d'avoir manqué de «flexibilité» dans la gestion de ce dossier en annulant le contrat. Selon lui, la compagnie nationale des hydrocarbures «n'a pas voulu écouter» les arguments avancés par ses deux partenaires espagnols pour justifier les retards. Le P-DG de Repsol reproche également à Sonatrach d'avoir cherché à négocier autour de «trente dossiers» distincts incluant notamment l'affaire Medgaz, les tarifs du gaz et les autorisations nécessaires pour l'implantation de Sonatrach en Espagne. Selon lui, cette attitude montre une confusion entre le rôle de Sonatrach et celui du gouvernement algérien. «Si c'est Sonatrach, c'est Sonatrach, et si c'est le gouvernement algérien, c'est le gouvernement algérien», a-t-il a affirmé. Autrement dit, Repsol n'est pas prête à faire la moindre concession. Elle compte même exiger des dommages et intérêts à Sonatrach. L'autre conflit, qu'on croyait résolu, du moins en partie, revient en force cette semaine. En effet, le conseil d'administration de Medgaz, tenu le 25 septembre, confirme qu'aucune évolution n'est enregistrée au dossier du futur gazoduc algéro-espagnol. L'administrateur du Gas Natural a déclaré à la presse espagnole que «son groupe n'a toujours pas reçu une offre ferme de la part de Sonatrach pour l'acquisition des 10% du capital qui permettront à la société nationale des hydrocarbures de détenir les 36% de Medgaz prévus dans l'accord signé entre les deux pays». Ce n'est point l'avis du ministre algérien de l'Energie, M.Chakib Khelil, qui a déclaré récemment que le gouvernement espagnol a cédé sur ce point. Sur cette question toute l'Europe, et non pas seulement l'Espagne, semble prête à contrer les ambitions européennes de Sonatrach, en introduisant un projet qui interdit aux fournisseurs de pétrole d'investir dans le transport au sein des pays de l'Union européenne. Toujours dans le domaine énergétique, il ne faut pas oublier que Sonelgaz a été contrainte de relancer l'appel d'offres pour la construction des deux centrales électriques de Terga et Koudiat Draouch après le retrait, imprévisible, du groupement constitué de l'américain GE et de l'espagnol Cobra qui avait déposé une offre technique. Des informations non confirmées ont évoqué le mécontentement de Cobra après la décision de la société nationale de lui retirer un marché de fournitures de postes électriques pour non-respect de ses engagements sur ce contrat, malgré les mises en demeure répétées de Sonelgaz. Après avoir affiché sa neutralité au début de la crise énergétique, le gouvernement espagnol a durci le ton et semble prendre position en faveur de ses entreprises. Il a décidé de contrecarrer les décisions algériennes en recourant à la pression. Dans ce contexte, selon les informations communiquées par la presse espagnole, le gouvernement de Madrid a demandé à la banque Santander de refuser l'offre de 5,5 milliards d'euros proposée par Sonatrach pour l'acquisition des 30% du capital détenus par la banque dans le pétrolier Cepsa. Une source bancaire à Alger interrogée par le quotidien en ligne, «toutsurlalgerie.com», confirme, en des termes à peine voilés, cette thèse. Sur un autre plan, celui de la privatisation du Crédit populaire d'Algérie, CPA, la Santander «pourrait ne pas présenter une offre technique en octobre prochain», selon la presse espagnole. Une telle décision signifierait un retrait de la première banque d'Espagne de la course à la privatisation du CPA. Du coté algérien l'on ne semble pas près de céder à ces pressions tant au niveau énergétique que bancaire. Le renforcement des prérogatives du ministre de l'Energie par décret présidentiel, publié la semaine passée, traduit le soutien indéfectible du président de la République à la politique énergétique de M.Chakib Khelil. Le sommet des chefs de gouvernement des deux pays s'annonce dès lors très serré au vu de ces donnes. Les négociations déjà entamées entre les deux capitales sont tributaires, selon les observateurs avertis, des concessions que chaque partie est prête à, ou devra, faire pour dépasser cette crise et renouer avec le climat de confiance qui régnait jusqu'ici entre ces deux partenaires économiques.