Les mêmes signes de la malvie marquent actuellement la situation sociale du pays. 05 octobre 1988 - 05 octobre 2007: dix-neuf ans sont déjà passés et les scènes des émeutes sont toujours présentes dans la mémoire des Algériens. Des émeutes qui, par la suite, se sont transformées en soulèvement populaire avec tous les dégâts qui en découlèrent, que ce soit en vies humaines ou en dommages subis par les institutions et entreprises publiques. Le bilan officiel: 176 morts, 900 arrestations et des dégâts matériels de plusieurs milliards de dollars. Le 5 Octobre 1988 a représenté un tournant décisif dans l'histoire contemporaine de l'Algérie. Du parti unique au pluralisme politique, du dirigisme économique à l'économie de marché, de la presse «unique» à l'ouverture du champ médiatique, tels sont les acquis de cet événement historique. Avant cette date, le chômage faisait rage et l'Algérie était au bord de la crise économique sans que le peuple n'en soit informé. Les dirigeants eux-mêmes ne voyaient pas venir la chose. Durant les années 1980, la corruption atteint des proportions jamais égalées. L'Algérie reste très dépendante des hydrocarbures. La rente du gaz et du pétrole ne suffit plus au financement des importations et aux vastes programmes d'investissements publics dans l'industrie et les services. A partir de 1986, l'économie s'effondre (98%des ressources provenaient de la seule vente du pétrole). La crise sociale apparaît au grand jour. Trois éléments la montrent: la pénurie de logements, les jeunes sans travail, n'ont rien d'autre à faire que ´´tenir le mur´´ et la contestation régionale monte, alors que les événements d'avril 1980 en Kabylie et les revendications pour tamazight, préludaient à des jours difficiles qu'allait vivre l'Algérie. Les jeunes Algérois, faute d'une véritable écoute de la part des gouvernants n'ont trouvé que la rue pour crier leur ras-le-bol. En ce dix-neuvième anniversaire de cette révolte, le pays a du mal à sortir la tête de l'eau et se retrouve quasiment dans la même situation sociale décriée par les manifestants d'Octobre 88. Si notre pays a recouvré la paix depuis l'arrivée de Bouteflika à la tête de l'Etat et que les caisses sont renflouées depuis l'embellie financière due à la flambée du prix du pétrole, force est de constater que cette embellie ne s'est nullement répercutée sur le mode de vie du citoyen. En 2007 comme en 1988 l'Algérie dépend toujours, à 98%, des revenus des hydrocarbures. Comme si le 5 Octobre ne nous a pas servi de leçon. Ballottés entre un pouvoir d'achat en continuelle dépréciation et la nécessité de faire face à des dépenses en perpétuelle augmentation, le citoyen ne sait plus à quel saint se vouer. Cette année, les choses ont empiré. Les salaires stagnent alors que les prix n'ont cessé d'augmenter. Les citoyens recourent aux émeutes pour crier leur malvie: réclamer de l'eau potable, de l'électricité, le gaz, un logement décent, des soins, un emploi et attirer l'attention des pouvoirs publics sur l'isolement auquel sont contraintes des familles entières. Le gouvernement tente de calmer les esprits. Il annonce une nouvelle grille salariale. Une mesure contestée par plusieurs syndicats autonomes qui préparent des mouvements de protestation. Pis encore, le gouvernement vient d'annoncer la prochaine dissolution de 120 entreprises publiques. Cette décision fera certainement du bruit du côté des employés, dans la mesure où des milliers de postes d'emploi devront disparaître. L'Algérie est-elle au bord de l'asphyxie? Plus la crise sociale se complique, plus la protestation populaire s'amplifie et plus la situation politique devient intenable. La dilution des responsabilités et l'absence d'initiatives expliquent en quelque sorte cette panne. C'est ce que le peuple appelle «absence de l'Etat».