Les uns sillonnent les grandes surfaces alors que d'autres se rabattent sur la fripe En ces derniers soirs du mois de Ramadhan, la cohue se fait de plus en plus compacte dans les arcanes de la ville où sont regroupées les boutiques de prêt-à-porter. Les rares grandes surfaces urbaines et suburbaines sont envahies après la rupture du jeûne. Les prix qui y sont pratiqués sont plutôt d'un niveau élevé par rapport aux vêtements proposés à même le sol, juste en face des magasins, ceci à leur grand dam. Leurs propriétaires n'ont de cesse de protester, en vain. Les autorités locales semblent «accepter» cette situation du moins pendant le Ramadhan, période où il est ardu de joindre les deux bouts surtout pour ces «chômeurs déguisés» qui s'adonnent à la vente à la sauvette. Mais n'empêche! Une certaine catégorie de citoyens s'y rend pour tenter de vêtir correctement leurs chérubins avec des produits «made in» quand même. Les articles qui y sont proposés sont en effet d'une certaine qualité, de marques étrangères parfois connues, sans pour autant atteindre le must des grands magasins où sont exposées les «grandes griffes». Ces grandes surfaces sont fréquentées par la classe moyenne composée de cadres, de petits commerçants et autres travailleurs, comme nombre de fonctionnaires. Cette catégorie de clients a dû faire moult calculs et pratiquer une certaine gymnastique arithmétique pour extirper un volet «spécial Aïd» de leur maigre (et honteux) salaire. D'autres citoyens à revenu moyen se dirigent vers les marchés, dits couverts, créés dans l'urgence ici et là par les municipalités pour tenter d'enrayer l'informel qui fait fi de la réglementation, du fisc, des règles d'hygiène, de la prévention etc. Le pauvre citoyen reste, pour sa part, toujours attiré par les vendeurs à la sauvette dans l'espoir de grignoter quelques dinars de plus pour l'achat d'une tenue «neuve» pour son enfant. C'est là une attitude pour le moins naturelle après presque un mois de Ramadhan qui a joué le rôle de sangsue sur les faibles budgets. Budget! Un terme trop comptable pour un pécule squelettique, laminé par des menus fantasques, qui garde encore les relents d'une rentrée scolaire astreignante et des souvenirs fanés de vacances et de fêtes familiales onéreuses. La «plèbe», la catégorie pauvre, se rabat quant à elle, sur la fripe. Si ce mot rime avec frime, ce n'est pas le cas pour cette frange de la société qui s'y approvisionne par manque de moyens Cette clientèle trouve intelligemment comment habiller son ou ses enfants avec peu de dinars. Il faut chercher l'habit qu'on peut retaper avec un bon repassage ou un passage au pressing du coin et le tour est joué. Il faut dire qu'il existe une clientèle, surtout la gent féminine qui s'habille de la tête aux pieds «chez la fripe». Ces victimes de la fashion savent comment dénicher la pièce rare, unique, originale...qui fait sensation et des admirateurs parmi leurs proches ou collègues tout en cachant bien sûr la provenance de ces achats.