Plus d'un million et demi de personnes activent dans le commerce informel. C'est ce qu'a déclaré hier le porte-parole et chargé de la communication de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa), Boulenouar El Hadj Tahar. Lors d'un point de presse, ce responsable a avancé que ce nombre représente quelque 60% du marché algérien qui active dans la régularité. Ailleurs, le taux de 10% à peine déclenche un tollé généralisé, voire un scandale socio-économique. Cette forme de commerce illicite, qui semble être tolérée car absorbant toutefois un grand nombre de chômeurs potentiels, induit également un manque à gagner énorme au fisc qui contrôle seulement 1.250.000 commerçants en règle. «Ce commerce constitue par ailleurs un obstacle sérieux aux investisseurs étrangers désireux de s'installer chez nous», a encore estimé El Hadj Tahar. Il a en outre regretté que plus de 3000 boulangers aient éteint leurs fours cette année et que 2000 bijoutiers aient quitté leurs tables d'atelier et leurs vitrines. Ces fermetures en masse ont provoqué la mise au chômage d'un grand nombre d'employés mettant ainsi dans le besoin quotidien plusieurs milliers de familles souvent nombreuses. Ceci sans compter les personnels des entreprises dissoutes, privatisées, ou qui ont opéré une compression de leurs effectifs. Nombre d'universitaires, de diplômés de centres de formation professionnelle, même des cadres d'administration s'adonnent au commerce, qui ne peut être qu'informel et réputé source de «fortune rapide et sans risque». Toute cette masse de personnes alimente le marché informel. Cependant, il est utile de préciser que ce commerce est largement approvisionné par l'importation informelle où foisonnent de riches nababs qui ne reculent devant rien pour prospérer dans l'illégalité et versent naturellement dans la corruption à tous les niveaux de la société et de l'administration. Ce mal est accompagné de produits contrefaits qui sont commercialisés par l'informel en Algérie. Comme tous les pays visent à atteindre l'autosuffisance alimentaire dans leurs programmes gouvernementaux, il est donc normal de considérer la stratégie d'organisation du commerce comme une «mission du gouvernement». Sont concernés les ministères du Commerce, des Finances (douanes, foncier, impôts), de l'Intérieur (collectivités locales), des Transports (privé), de l'Agriculture (3 millions d'hectares de terre arable) et l'on craint aujourd'hui que la triste formule «pétrole contre nourriture» soit de mise chez nous. Il ne faut pas oublier le premier concerné, le président de l'APC, qui doit canaliser les efforts de tout un chacun, pour peu qu'il dispose d'un budget adéquat. Toute cette cohorte énumérée n'a pas réussi à mettre fin au marché informel, ni non plus, a précisé le représentant de l'Ugcaa, la Commission d'organisation des marchés et de contrôle des prix constituée à la veille du Ramadhan. Elle devait s'occuper de la distribution de la production et stabiliser les prix. El Hadj Tahar a par ailleurs estimé que la mise à niveau doit être appliquée partout, dans tous les secteurs, et non uniquement dans les entreprises déstructurées. Il a annoncé que 5000 commerçants ont demandé leur radiation du registre du commerce en 2007 sur 1,25 million existants, dont 25.000 transporteurs, 120.000 taxieurs, 13.000 boulangers, 20.000 bijoutiers. La volonté d'assainir le secteur existe et même le chef du gouvernement a évoqué le danger de l'informel et de la contrefaçon. Mais avons-nous les moyens de lutte? s'est interrogé El Hadj Tahar qui a suggéré, au nom de l'Ugcaa, que le montant de la subvention aux produits de première nécessité soit versé directement sous forme de prime aux salariés en charge de familles nombreuses. Le riche paiera ainsi le pain et le lait au prix réel et non à un prix subventionné par l'Etat.