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La Seine ou le fleuve du génocide
46E ANNIVERSAIRE DES EVENEMENTS DU 17 OCTOBRE 1961
Publié dans L'Expression le 17 - 10 - 2007

Des expositions, des conférences et des tables rondes seront organisées aujourd'hui, à Alger et à Paris, pour marquer l'anniversaire.
L'Histoire rattrape la France. Les événements du 17 Octobre 1961 seront commémorés aujourd'hui. Ainsi, les Algériens célébreront le 46e anniversaire de ces événements. Comme toutes les autres dates importantes de la guerre d'Algérie, le 17 Octobre reste à jamais une tache noire dans l'Histoire de la France. Pour l'Histoire, des milliers d'Algériens ont été jetés dans la Seine, à Paris.
Autant d'autres sont arrêtés, écroués et torturés dans les geôles de la capitale des droits de l'homme. Il y a 46 ans, des milliers d'Algériens manifestaient pacifiquement à Paris contre le couvre-feu discriminatoire imposé par Maurice Papon, le préfet de police de Paris. La revendication est légitime: le droit à l'indépendance. Au vu de la mobilisation des Algériens contre les mesures ségrégationnistes que la France leur fait subir, Maurice Papon instaure le 5 octobre 1961 un couvre-feu pour les «Français musulmans d'Algérie». Une «note» refusée par les Algériens.
Deux jours plus tard, le FLN décide d'organiser un boycott du couvre-feu. Maurice Papon «motive» ses troupes. Il les rassure: «Le policier qui tire le premier sera couvert». L'horreur commence. La Seine voyait rouge. Son eau s'est mariée avec le sang des Algériens. Aujourd'hui, en 2007, soit 46 ans après, la France ne veut toujours pas reconnaître l'un de ses multiples drames et crimes d'Etat. La France cherche-t-elle à effacer toutes les taches noires de sa présence sur le sol algérien en «revendiquant» les bienfaits de la colonisation? La vérité est en marche. Historiens, politiciens, juristes, écrivains ou simples citoyens, tout le monde condamne et qualifie l'acte de génocide contre l'humanité, sauf...la France.
La célébration de cet événement, cette année, intervient dans un contexte très particulier. Cette particularité réside dans le fait, qu'à travers la planète, des actes similaires sont reconnus et qualifiés de génocide. Le cas de l'Algérie n'est pas isolé. L'Arménie en est un parfait exemple. En 1915, la Turquie, dans les dernières années de l'époque du khalifat ottoman, a commis un génocide en Arménie. 1,5 million d'Arméniens ont été tués par les Turcs. Les pays occidentaux qualifient, sans hésitation, l'acte de génocide. Les USA d'abord. Dernièrement, la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, (Congrès) a voté une résolution qui qualifie de ´´génocide´´ ce massacre.
L'Allemagne reconnaît aussi les faits historiques. Le Bundestag (Parlement allemand) a voté en 2005, à l'occasion de la célébration du 90e anniversaire du génocide arménien, une motion qui rend hommage aux victimes des actes barbares de la Turquie. Le hic, cette même France qui refuse de reconnaître ses crimes en Algérie, a condamné «les actes barbares des Turcs». L'Assemblée nationale française a reconnu officiellement, en 2006, le génocide arménien de 1915 perpétré par les troupes de l'Empire ottoman! 106 députés (UMP et PS), sur 129 votants ont adopté cette proposition.
Ce n'est pas tout. La France dénonce les «génocides» au Darfour et en Tchétchènie. Aujourd'hui le climat est tendu entre la Russie et la France. Les relations entre le président français Sarkozy et son homologue russe Poutine sont froides. La France qui cherche à donner des leçons en matière de droits de l'homme doit impérativement commencer par reconnaître ses crimes commis en Algérie, en Indochine et en Afrique noire. A Madagascar, la France a perpétré un massacre qui a coûté la vie à au moins 300.000 personnes.
Dans ce contexte, des questions méritent d'être soulevées. Qu'attend la France pour se repentir? Au lieu d'aller «sympathiser» avec les peuples réprimés et dénoncer les actes criminels des autres ex-puissances coloniales, ne serait-il pas mieux de commencer par corriger sa propre histoire? N'est-ce pas là une schizophrénie républicaine? Les événements tragiques du 8 Mai 1945 ne constituent-ils pas un génocide et ne méritent-ils pas d'être classés dans la liste des crimes contre l'humanité? La guerre d'Algérie n'est-elle pas un acte terroriste de la France? Faut-il encore continuer à jouer sur les mots en cherchant à préciser si le mot massacre est synonyme de génocide? L'opération sémantique n'a plus de place lorsqu'on tue des centaines de civils qui manifestent poitrines nues. Tuer 45.000 personnes n'est-il pas un génocide?
Le président Bouteflika est catégorique: «La colonisation a réalisé un génocide de notre identité, de notre histoire, de notre langue, de nos traditions», a-t-il déclaré lors d'un meeting à Constantine. Reste aux donneurs de leçons d'être à la hauteur de leur slogan fétiche, «Liberté, égalité, fraternité»...


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