La bioconception de la surveillance de l'environnement est désormais, une approche plus efficace pour prévoir la pollution et protéger le milieu récepteur. La quasi-totalité des chercheurs s'accordent à dire que les méthodes de la chimie conventionnelle en matière d'évaluation du degré de la pollution présentent plusieurs lacunes. En effet, les analyses physico-chimiques pour estimer la concentration des polluants dans un milieu donné ne renseignent que sur l'aspect quantitatif de la pollution comparée à une norme de rejet. La biosurveillance repose sur l'étude de la réponse biologique des êtres vivants aux polluants. Donc quantifier l'impact. Des méthodes ont ainsi été élaborées pour quantifier les effets biologiques qui peuvent servir d'indicateurs de pollution (ou biomarqueurs de la pollution). Les analyses biologiques, de l'avis des chercheurs, se présentent comme une solution économiquement efficace, sachant les surcoûts engendrés par les réactifs utilisés dans les méthodes classiques physico-chimiques. Entre autres avantages, la biosurveillance permet une meilleure préservation des biotopes par la mise en évidence précoce de contamination du milieu naturel. Les approches par observation et les constatations in situ ont démontré qu'un organisme évoluant dans un environnement pollué est sujet à un syndrome de stress (modification de sa morphologie et/ou de son métabolisme). La quantification du taux d'altération d'un organisme donné permet l'accès rapide à des informations pertinentes sur la qualité d'un cours d'eau, d'une côte marine... En France, le concept biosurveillance des milieux récepteurs dépasse l'échelle des études de laboratoire. Les chercheurs de l'Inra (Institut national des recherches agronomiques) ont déjà réalisé une «biostation» utilisant des végétaux bio-indicateurs (dits aussi végétaux sentinelles), pour la surveillance des eaux de rejet d'une Step (station d'épuration). L'aptitude à la bio-accumulation des métaux lourds de certaines d'espèces de végétation est utilisée à profit pour le contrôle en continu de la qualité des rejets. Les élodées, les lentilles d'eau, les mousses accumulent fortement les micropolluants organiques et minérales: les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques, tels que le benzène par exemple), les PCB (polychlorures biphényle), les métaux lourds. Un simple prélèvement des racines permet ainsi d'évaluer l'état de la qualité sanitaire des eaux de rejet. Ces dernières années, en Algérie, des contributions pour la promotion de la démarche biosurveillance environnementale ont abouti à des résultats conséquents. Les études menées dans la région de Tiaret ont permis l'établissement d'un inventaire d'espèces végétales bio-indicatrices de pollution. Les tests effectués ont conduit à l'identification et à la classification de 68 espèces de lichen, d'ailleurs très répandues dans la région, considérées comme bio- indicatrices de la pollution atmosphérique. Dans la région de Bir Amar, à Oum El Bouaghi, les recherches écologiques sur la faune aquatique ont permis de recueillir les premières données sur les communautés animales, dites stygobies et epigées, pouvant être utilisées comme biomarqueurs de la qualité des eaux. L'analyse des données a permis de mettre en évidence la bonne qualité des eaux de puits dans cette région d'Oum El Bouaghi, encore inexploitée jusqu'à nos jours. L'approche bio en matière de surveillance de l'environnement connaît actuellement un important essor, notamment avec l'émergence de nouvelles méthodes plus efficaces. Parallèlement, la formation professionnelle s'est mise au vert. En partenariat avec le ministère de l'Aménagement du territoire, de l'Environnement et du Tourisme, la formation dans le domaine de l'environnement a pris son petit bonhomme de chemin. Les nouvelles exigences ont eu pour effet de stimuler le repositionnement de la formation professionnelle par rapport à la sphère socioéconomico-environnementale. Si la biosurveillance constitue une opération en aval des processus, ce concept est néanmoins applicable en amont des process. Ainsi plusieurs promotions en maîtrise et économie de l'eau, environnement et propreté, traitement d'eau, ont pu profiter d'une formation solide sur les thèmes génériques de l'environnement. Au coeur de la Mitidja, les instituts de formation professionnelle de Blida et de Bougara se sont dotés d'une infrastructure humaine et matérielle conséquente en vue de créer un pôle d'excellence répondant à la vocation géographique de la région. Des formations bio, pour la gestion des ressources environnementales, contrôle de qualité, des concepts d'écomanagement, constituent le socle d'une formation riche en connaissances. La formation des ressources humaines pour ainsi dire représente, dans la conjoncture des nouvelles exigences, l'intervention en amont des processus. C'est dans ces nouvelles démarches bio, également, aussi bien en aval qu'en amont des activités de l'homme, que le concept de développement durable trouvera son sens. S'agissant de la phréatobiologie appliquée (recherches écologiques dans les milieux aquatiques souterrains), des biostations de contrôle des rejets, ou encore des bio-indicateurs de la pollution atmosphérique, en l'état actuel des connaissances, l'emploi des biomarqueurs est encore limité à quelques types de pollution. Un effet toxique est toujours lié à une expression biochimique, physiologique ou anatomique. Il est donc tout à fait légitime d'espérer développer dans le proche avenir une multitude d'indicateurs biologiques encore plus significatifs et renforcer ainsi la culture bio dans tous les domaines, notamment pour préserver notre bonne vieille Terre.