Le matelas financier, qui avoisine d'ores et déjà les 100 milliards de dollars, connaîtra une embellie certaine. La course folle de l'or noir vers le cap symbolique des 100 dollars le baril, se poursuit. Le baril de pétrole a atteint un nouveau record historique en franchissant, jeudi 1er novembre à New York, la barre des 96,24 dollars. Depuis le début de l'année, les cours du pétrole ont progressé de 50% et, en octobre, de 18%. Les analystes estiment que le cap des 100 dollars devrait être franchi d'ici à deux semaines. Ce serait là le second record historique du brut. Selon Standard & Poor's, le pétrole était passé de 100 à 101,70 dollars, un an après la révolution islamique en Iran, en avril 1980. Et ce n'est pas la rudesse annoncée de l'hiver qui va arranger les choses, et encore moins la prochaine réunion de l'Opep. Les conditions climatiques difficiles ont, certes, toujours été l'un des facteurs fondamentaux de la hausse des prix du pétrole, mais le marché chinois, gros consommateur de pétrole, y contribue pour beaucoup. Aussi, l'économie mondiale retient son souffle mais semble résignée. Le baril de pétrole franchira la barre psychologique des 100 dollars. Ce n'est qu'une question de temps. Quelles seront les retombées pour l'économie algérienne dont les recettes en devises proviennent principalement des exportations en hydrocarbures? Tous les regards sont braqués sur un matelas financier qui comptabilise pas moins de 100 milliards de dollars et qui devrait s'accroître de façon significative. Tous les projets initiés dans le cadre de la mise en oeuvre du programme présidentiel pourront bénéficier de cette manne providentielle sans précédent. Ces recettes jamais égalées donnent pourtant l'impression que l'Algérie est un pays où la pauvreté semble durablement s'installer. La polémique née de ce paradoxe prendra-t-elle fin bientôt? En toute logique, elle risque de refaire surface de vive manière. Jusqu'à aujourd'hui, elle a surtout donné du grain à moudre à la plupart des partis politiques, des syndicats, mais aussi de la société civile. La rue grogne et manifeste un mécontentement qu'elle justifie par un pouvoir d'achat qui n'a cessé de s'étioler. La flambée des prix des produits de consommation en sont la preuve. A l'Assemblée populaire nationale, même si le débat n'a pas fait rage, l'on se questionne toujours sur la loi de finances qui est élaborée sur la base d'un prix du baril de pétrole à 19 dollars. L'envolée exceptionnelle des cours des prix de l'or noir va, sans aucun doute, remettre la question au goût du jour. Quelle sera la réaction du gouvernement de Abdelaziz Belkhadem? Ce dernier a été déjà pris pour cible pour ses options économiques jugées pas assez conséquentes par ses adversaires politiques. La conjoncture est favorable pour poser les jalons d'une économie productive, pour peu que l'application suive. La problématique récurrente de la dépendance de l'économie nationale par rapport aux exportations en hydrocarbures connaîtra-t-elle enfin son épilogue? Le chef de l'Etat avait bien déclaré lors de la réunion gouvernement-walis de juin 2005 qu'«il est aujourd'hui de notre devoir de consacrer le droit des générations futures à bénéficier des richesses naturelles». «Nous sommes parvenus à la conclusion que notre génération n'est pas en mesure de créer une économie alternative au secteur des hydrocarbures», avait alors observé le président Bouteflika. Il faut que nous garantissions «aux générations futures leur part dans cette richesse naturelle», a-t-il indiqué. Ces mesures devraient être accompagnées sur le terrain par des investissements judicieux à même de réduire le chômage. La manne financière a paradoxalement engendré des frustrations sur le front social. La jeunesse algérienne, force vive de la nation, est en proie au désespoir. En témoignent le phénomène harraga, la drogue et la déperdition scolaire. Les perspectives d'avenir et d'espoir s'éloignent inexorablement. La situation financière dont dispose, aujourd'hui, le pays peut permettre de relever le défi. Elle est en mesure d'offrir toutes les conditions nécessaires à ses élites qui sont contraintes d'aller monnayer leur savoir-faire ailleurs. L'Algérie ne doit pas rater une telle opportunité pour mettre en chantier une économie productive. A elle de tirer les marrons du feu pour se réconcilier avec sa jeunesse et faire la part belle à ses élites. Aussi, rater une telle aubaine, c'est passer à côté du cours de l'histoire. Ne dit-on pas que gouverner, c'est prévoir?