Virage à 180 degrés. Changement de cap. Volte-face inattendue. Retournement de veste. De bâbord à tribord. Les députés proposent. Le gouvernement refuse. La commission des finances et du budget exécute. Une majorité des représentants du peuple serait favorable à l'idée d'abandonner l'amendement de la mesure interdisant l'importation de véhicules de moins de 3 ans, proposé dans le cadre de la loi de finances 2008 par l'ensemble des députés. Des sources proches de l'hémicycle Zighoud Youcef affirment que la commission des finances et du budget aurait retiré l'article relatif à la mesure levant l'interdiction d'importation des véhicules de moins de 3 ans. Programmé initialement pour lundi dernier, le projet de loi de finances 2008 sera soumis aujourd'hui lors d'une séance plénière, au vote des députés. Les raisons sont à imputer, selon la commission des finances et du budget et de l'Assemblée nationale, au nombre important des amendements apportés par les députés, qui est de 98. Néanmoins, des sources proches de l'APN soutiennent que le report du vote est dû aux désaccords qui persistent entre le gouvernement, représenté par le ministre des Finances, Karim Djoudi, et les membres de la ladite commission, sur les amendements à apporter à la loi de finances, notamment cet article. Ainsi, les députés proposent. Le gouvernement refuse. La commission des finances et du budget à l'APN exécute. Elle maintient l'interdiction de l'importation de ces véhicules. En contrepartie, elle préconise d'exiger un cahier des charges pour les concessionnaires concernant les véhicules neufs, portant une obligation de contrôle avant l'importation de ces véhicules afin de garantir la qualité. Mais des députés contactés hier déclarent qu'ils feront l'impossible pour faire passer l'amendement en question. «Ce n'est pas avec des restrictions que l'Algérie pourra adhérer à l'Organisation mondiale du commerce (OMC)», soulignent-ils. En effet, l'adhésion de l'Algérie à l'OMC est conditionnée par l'abrogation de cette mesure. D'ailleurs, le ministre des Finances, Karim Djoudi, avait reconnu que la levée de l'embargo sur ces voitures est parmi les points soulevés par l'Organisation mondiale du commerce. Pour rappel, cette disposition est contenue dans la loi de finances complémentaire de 2005, promulguée par ordonnance du président de la République, Abdelaziz Bouteflika. L'objectif était d'éviter que l'Algérie devienne «une poubelle pour les voitures d'occasion», avait-on alors avancé. C'est sur instruction du chef de l'Etat que l'interdiction des véhicules de moins de 3 ans a été introduite dans la loi de finances complémentaire 2005. Au cours d'une visite d'inspection au port d'Alger, le président Bouteflika avait crié «basta» à l'importation de ces véhicules. Cette mesure d'interdiction a, dans un premier temps, profité aux concessionnaires qui avaient, à l'époque, applaudi la décision du gouvernement. Cependant, les résultats escomptés, notamment le renouvellement du parc automobile national, n'ont pas suivi sur le terrain. Car les voitures importées, entre-temps, sont loin de répondre aux normes environnementales. Quant à la volte-face des députés, elle serait imposée, selon les mêmes sources, par les directions des partis de l'Alliance présidentielle qui auraient exercé des pressions sur leurs députés. Ces derniers subissent la Bérézina. Certes, c'est une bonne nouvelle pour les concessionnaires. Malheur des uns, bonheur des autres...Au lieu d'aller de l'avant, on fait marche arrière. Il est vrai que ce revirement peut être assimilé, selon les mêmes sources, dans une certaine mesure, à une injonction de l'Exécutif. Les représentants du peuple sont d'abord comptables devant leur parti, avant le peuple qui les a élus. En outre, cette démarche va à contre-courant des recommandations de l'OMC. Et l'éventuelle adhésion de l'Algérie à l'OMC risque d'en pâtir. Par ce recul, l'Algérie se mettra en porte-à-faux et prêtera le flan à la critique des institutions internationales, à l'instar de l'Union européenne et de la Banque mondiale, notamment sur le chapitre relatif à la libre circulation des marchandises. De ce fait, il est temps que l'Algérie adopte une ligne de conduite cohérente et clarifie ses positions dans un secteur, le commerce, dont nous ne maîtrisons pas toutes les données.