La station expérimentale de l'université de Blida dispose d'un long capital d'expérience et entame la 3e génération de biotechnologie: la F.I.V. La biotechnologie constitue un véritable pas vers la résorption de la crise du lait, mais aussi la disponibilité de la viande sur le marché à des prix raisonnables. Les techniques de transfert d'embryon ont depuis longtemps montré des résultats performants. A partir d'une vache (dite vache donneuse) qui a un potentiel génétique élevé on peut prélever jusqu'à une vingtaine d'embryons. Cette opération peut être répétée environ tous les deux mois. Le nombre total d'embryons récoltés par an sera donc considérable. Un premier essai réussi en 2004, utilisant une race d'importation (vache Holstein, une race européenne) a vu la naissance d'un veau. Selon Adel Djallel, maître assistant et directeur adjoint chargé des productions animales au niveau de la station expérimentale, l'animal se porte bien et est même prêt, à partir de 3 ans -c'est-à-dire à partir de 200 - à la reproduction. En 2005, un autre essai utilisant des races locales avait donné des résultats très concluants. Sur 7 transferts d'embryons, il y avait eu 4 naissances dont une femelle et deux mâles de race locale et une femelle de race améliorée. Les deux essais appartiennent à la 2e génération des biotechnologies dite fécondation in vivo (F.I.V, injection de l'embryon dans l'utérus de la femelle) ce qui constitue une première en Algérie. Au moment où il est question de penser la sécurité alimentaire dans un contexte stratégique de développement durable, il est clair que de tels efforts nécessitent tout l'appui de la société et des pouvoirs publics. Des éleveurs étrangers convoitent le marché algérien pour l'exportation d'embryons de vaches laitières, notamment les éleveurs québécois. Au prix fort de 500 à 1000$ (voir L'Expression du 27/08/2007 rubrique: De quoi j'me mêle), l'argent du contribuable est mis à rude épreuve pour un énième gâchis. Adel Djallel regrette le fait que certains de nos décideurs tiennent en piètre estime les efforts de recherche que font leurs concitoyens. Par ailleurs, tous les travaux de recherche en post-graduation sont systématiquement enregistrés dans une base de données nationale au centre de données du Cerist. «Les responsables de ce créneau, au risque d'importer à des prix exorbitants des embryons de vaches laitières, savent-ils, au moins, que des essais réussis se font à quelques pas de leurs oratoires?» ajoute notre interlocuteur, avant de lancer le défi: «Nous sommes tout à fait prêts à passer à l'échelle industrielle, nous maîtrisons de plus en plus la fécondation in vivo». Selon M.Djallel, l'investissement dans les biotechnologies est bien plus salutaire en matière de rendement économique que par rapport à d'autres alternatifs plus classiques comme le recours à l'importation des vaches laitières à cet effet.: «Ça ne sert pas à grand-chose d'importer des vaches quelle que soit leur race. Les conditions climatiques ainsi que les conditions d'élevage dans notre pays ne permettent pas l'expression du potentiel génétique à son plus fort degré. Les produits nés chez nous seront plus adaptés aux conditions locales contrairement aux animaux importés adultes. Une Holstein en Europe produit jusqu'à 7000l/ an de lait, en Algérie et dans les meilleurs des cas, sa production ne dépassera pas les 5000l/an» tient à préciser Adel Djallel. Du chemin reste à faire, notamment pour la maîtrise de la 3e génération de biotechnologie de la reproduction dite fécondation in vitro et qui vient juste d'être entamée par la même équipe mais engorgée par un nouvel apport de jeunes étudiants prêts à toutes les prouesses synergétiques. L'avantage de cette technique est l'amélioration du nombre et de la qualité des embryons. A signaler au passage que l'Institut Pasteur d'Alger collabore pleinement à l'épanouissement de cette technique à l'université Saâd-Dahleb de Blida. Comme toute entreprise naissante, les contraintes sont légion et les problèmes rencontrés sont surtout d'ordre logistique, l'absence de structures adéquates ainsi que l'inexistence sur le marché local de certains produits (hormones, milieu de conservation de congélation ou de culture) nécessaires aux différentes étapes de cette technique. Actuellement, les efforts sont plutôt concentrés sur la maîtrise des techniques de transfert embryonnaire classique (in vivo), une étape considérée comme un préalable à la maîtrise de la fécondation in vitro. L'Algérien consomme 120 litres de lait annuellement, plus que la norme de l'OMS qui est de 90 l/an, dont 60% du volume au niveau national nous vient de l'importation au prix dépassant les 600 millions de dollars annuels. Des chiffres qui, selon notre interlocuteur, donnent matière à réfléchir. L'Algérie est plus que jamais appelée à assurer son autosuffisance en poudre de lait et bien d'autres produits stratégiques, sécurité alimentaire oblige. La science est pourtant là pour mettre à pied d'oeuvre un élevage de vaches laitières de dimension nationale.