La mémoire collective aura besoin un jour de ces preuves qui, aujourd'hui, paraissent anodines. Le pouvoir reconnu à l'Etat en matière de protection du patrimoine résulte historiquement de l'héritage reçu. Ainsi, il se dote progressivement d'une administration, de crédits et d'instruments juridiques qui lui permettent d'assumer cette responsabilité. La ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, a annoncé, lundi à Alger, que «le buste de Marc Aurèle, une pièce archéologique volée en 1996 à Skikda et retrouvée aux Etats-Unis, sera bientôt récupéré». Marc Aurèle est originaire d'Espagne, il était membre de la dynastie des Antonins. Adopté par l'empereur Adrien puis par son héritier Antonin, il est élevé au palais impérial, apprend tant l'exercice du pouvoir que la réflexion morale et les leçons du stoïcien Epictète, qui lui enseigne l'amour de la liberté. Pendant les dix-neuf ans que dure son règne, et malgré son aversion pour la violence, Marc Aurèle ne cesse de défendre l'Empire contre les attaques incessantes des Barbares. Et s'il passe pour être tolérant, il laisse tout de même persécuter les nouveaux chrétiens. C'est sur le front du Danube que Marc Aurèle s'éteint, vaincu par la peste. On retrouve dans Pensées pour moi-même, qu'il écrivit durant ses expéditions militaires, la philosophie stoïcienne dont il avait fait un examen de conscience permanent. Marc Aurèle est considéré comme l'un des meilleurs empereurs que Rome ait connus. En réaction au pillage et à la destruction, Mme Toumi précise, dans une allocution prononcée à la clôture d'une session de formation au profit de la police judiciaire et de la police des frontières sur la protection du patrimoine national, «que le ministère a reçu une correspondance de l'ambassade d'Algérie à Washington notifiant la récupération du buste de Marc Aurèle». «Depuis cinq ans déjà, des démarches ont été entreprises avec les parties concernées et Interpol pour le gel de l'opération de vente de cette pièce archéologique dans les marchés mondiaux», a indiqué la ministre. Elle a mis en avant le rôle de la Sûreté nationale dans la lutte contre toute forme de crime et atteinte au patrimoine culturel national tels le pillage et le trafic illicite vers l'étranger. Rappelant la loi de 1998 sur la protection du patrimoine culturel, renforcée en 2003 par des textes de loi exécutifs, Mme Toumi a indiqué que «l'Algérie avait déjà ratifié en 1974 la Convention internationale sur l'interdiction d'importation, exportation et vente des biens archéologiques». Elle a relevé, par ailleurs, que «cette formation d'un mois a permis aux agents de la police judiciaire et de la police des frontières de s'enquérir de la manière idoine d'intervention pour protéger le patrimoine qui représente la mémoire collective de la nation». De son côté, le ministre délégué chargé des Collectivités locales, M.Daho Ould Kablia, a souligné la détermination de l'Etat à aller de l'avant dans la protection du patrimoine culturel, estimant nécessaire de poursuivre l'organisation de sessions de formation dans ce domaine. M.Ould Kablia a mis en exergue les efforts consentis à ce jour pour protéger le patrimoine culturel contre le pillage et le trafic exercés par des réseaux criminels nationaux et internationaux. A l'occasion de la clôture de cette session de formation, des prix symboliques et des attestations ont été remis aux agents de la police judiciaire et des frontières, lors d'une cérémonie organisée en leur honneur au Palais de la culture Moufdi-Zakaria, en présence du directeur général de la Sûreté nationale (Dgsn), M.Ali Tounsi, et du directeur général des Douanes, M.Mohamed Abdou Bouderbala. Le maintien de cette réputation est vital car la mémoire collective aura besoin un jour de ces preuves qui, aujourd'hui, paraissent anodines mais qui pourraient se révéler, dans l'avenir, essentielles pour établir la vérité historique. Ainsi, le patrimoine participe aussi à la vie économique du pays en termes d'emplois et d'activités, par les liens qu'il entretient avec l'industrie touristique et le développement du territoire.