Depuis l'indépendance du pays, c'est la première fois qu'une telle expérience est tentée. Soixante dix-neuvième classement Fifa du mois de décembre, le football algérien compte ses déboires. Ce football, qui avait atteint les 20 premières places du même classement au début des années 80, ne parvient plus à se distinguer sur le plan international. Son équipe nationale, véritable vitrine du système, peine à tenir la route au point de rater, deux fois de suite, une qualification à une phase finale de la Coupe d'Afrique des nations. Aujourd'hui, malgré les carences criantes dont souffre ce football, il en est qui misent sur la qualification de cette équipe nationale à la CAN de 2010. D'autres, encore plus rêveurs, misent sur un voyage, en 2010, en Afrique du Sud où va se dérouler la prochaine Coupe du monde. C'est bien et c'est beau d'espérer. Ce n'est d'ailleurs pas interdit. Seulement, gare au moment du décompte final, lorsqu'il faudra se baser sur la réalité des faits qui risquent bien d'être peu concluants. Ce jour-là, comme d'habitude, on se mettra à aiguiser ses crayons ou à se gargariser la gorge pour tomber sur les gestionnaires du football, incapables qu'ils sont de nous sortir une équipe nationale compétitive.Dans la mouvance de cette discipline, ils sont bien rares ceux qui mettent en relief que l'équipe nationale qui va s'engager dans les qualifications à la Coupe du monde et à la CAN 2010 est majoritairement composée de joueurs évoluant hors Algérie. Tout entraîneur qui se trouve en dehors de cette équipe nationale est le premier à regretter une telle situation affirmant que c'est là un tort et qu'il vaut mieux prendre un maximum de joueurs de notre championnat local. Cet entraîneur-là changera de veste et de ton s'il est appelé en sélection en ce sens que, comme tous ses prédécesseurs, il sera forcé de faire appel au contingent de joueurs émigrés parce qu'il sait que le Championnat d'Algérie ne génère plus de talents. En d'autres termes, si cette équipe nationale venait à se qualifier pour la Coupe du monde et la CAN ou pour l'une des deux compétitions, ce sera grâce à des joueurs qui n'ont pas été formés par son football. L'idée a germé il y a 20 ans Aujourd'hui, le problème ne se résume plus à voir ce que va faire cette sélection. Il importe peu qu'elle aille à ces deux compétitions si le système qui prévaut dans le football algérien est complètement déglingué en matière de formation. On a vu ce qu'il en est advenu au lendemain des Coupes du monde de 1982 et de 1986 quand une relève n'avait pas été préparée pour assurer la continuité au sommet de l'équipe des Verts. Une équipe n'est pas éternelle. Il faut constamment songer à renouveler son effectif en le rajeunissant.La FAF et le MJS ont fait tout faux sur ce plan depuis l'Indépendance en focalisant leur intérêt sur la catégorie senior. Le MJS, encore pire, puisqu'il est le pourvoyeur de fonds du système est c'est lui qui est chargé de «pondre» une politique à même de garantir le renouvellement des élites par un plan de formation rondement mené. Or le ministère a failli lorsqu'il s'est agi de restructurer les clubs et les a laissé faire du n'importe-quoi avec l'argent du contribuable. Et comme l'on sait que les clubs sont le socle du système, on obtient des joueurs peu performants et qui ne méritent pas d'aller en sélection. La FAF avait bien essayé en 2001, avec la venue à sa tête de Mohamed Raouraoua, de rattraper le coup en mettant en place un système de formation capable de générer du talent. Avec Hamid Zouba comme DTN, on avait procédé à la création de quatre centres de formation à travers le pays (Alger, Oran, Annaba et Ouargla) avec le concours d'un expert de la Fifa, en la personne du Français Jean Michel Benezet. La formule avait été lancée mais avait été vite suspendue faute d'un soutien du MJS. Ce même MJS qui l'a reprise à son compte il y a presque deux ans avec l'Allemand Peter Schnittger qui ne pourra pas dire qu'il en a été le promoteur. D'ailleurs, selon les informations que nous avons pu recueillir, il semblerait que l'Allemand a mal mené son affaire puisqu'aucun joueur retenu n'a convaincu lorsqu'il s'est agi de le lancer dans le bain de la compétition. Ceci sans compter le coût de l'opération dont on dit qu'elle aurait coûté plus de 35 milliards de centimes. Pour faire face à la défaillance des clubs, la FAF a lancé une autre opération en direction des jeunes catégories, à savoir la création de la première Académie de football fédérale. «L'idée d'une telle initiative ne date pas d'aujourd'hui, nous a dit Fodil Tikanouine, le directeur technique national. Il y a plus de 20 ans, on avait lancé l'idée de mettre en place une sélection qui a la particularité d'être en regroupement permanent. Une telle Académie répond aux standards internationaux, notamment en matière de charge de travail aux entraînements.» Ce qui a incité la FAF à relever le défi, c'est le fait que notre pays va organiser en 2009, la CAN des U 17 (cadets), un rendez-vous dans lequel il ne serait pas acceptable que les Verts se fassent éliminer d'entrée de jeu. C'est pourquoi, depuis le mois de septembre dernier, 18 joueurs de 15 ans sont en regroupement permanent au lycée sportif de Draria sous la conduite du trio d'entraîneurs Athmane Ibrir-Hakim Meddane- Layachi Nouri et avec comme médecin, l'ex-joueur de la JSK et du MCA, Mourad Aït Tahar. Dans ce lycée, ces gamins suivent une scolarité normale et tous les après-midis ils sont soumis à des entraînements. Des standards internationaux Les week-ends, ils sont appelés à disputer un championnat officiel cadets, dans la Ligue-régionale du Centre, contre des équipes dont les joueurs ont une année de plus qu'eux. Et ils sont, en ce moment, premiers de ce championnat. «La norme internationale indique que le regroupement permanent est une bonne formule, note Fodil Tikanouine. Une telle démarche vous permet d'avoir un entraînement par jour au lieu des deux ou trois par semaine que peuvent avoir ces jeunes dans leurs clubs. Cela sans compter les surfaces très réduites sur lesquelles s'entraînent ces jeunes de clubs. La norme internationale indique, également, qu'un jeune doit s'entraîner de 12 à 18 heures par semaine sans compter les compétitions. Chez nous, un jeune dans son club ne s'entraîne pas plus de six heures alors qu'à lAcadémie, nous sommes dans une fourchette entre 12 et 15 heures hebdomadaires». Tikanouine ne cache pas son émotion lorsqu'il nous parle de ce projet. «Je peux dire que nous sommes en train de vivre un moment historique, déclare-t-il. C'est la première fois depuis l'Indépendance du pays que des jeunes footballeurs sont regroupés en permanence pour s'entraîner selon des standards internationaux». Les joueurs de cette académie seront ceux qui représenteront l'Algérie lors de la CAN 2009 des U 17 (moins de 17 ans) et que notre pays organisera. «Tous ces joueurs rejoindront leurs clubs d'origine à la fin de 2009, révèlera Tikanouine. Cependant, cela se fera si ces clubs disposent d'un centre de formation. S'ils n'en ont pas, les gamins repartiront quand même dans leurs clubs mais ils resteront à la disposition de la DTN qui les regroupera deux à trois fois par mois. Il ne faudrait pas que dans leurs clubs ils perdent les notions et les automatismes appris lors de leur passage à l'Académie. En tout cas, ce que je regrette, c'est que les clubs ne soient pas imprégnés de la nécessité d'investir dans la formation. Le seul à l'avoir compris c'est le PAC, mais il est bien seul. C'est vraiment dommage». Une académie pour les 12-13 ans Cette expérience ne sera pas unique. Dès la rentrée scolaire de septembre 2008, une Académie 2 de football intègrera le lycée sportif de Blida. «Ce sera des gosses nés en 1993, nous dira Tikanouine. Je peux même vous affirmer que les meilleurs de cette seconde promotion seront susceptibles d'être pris dans la première promotion pour disputer la CAN 2009 des U 17. Dans les années futures, il y aura une académie 3, puis une Académie 4 et ainsi de suite. Il s'agira de ne pas baisser de rythme et de poursuivre dans cette démarche». Le DTN du football algérien envisage même d'entamer une expérience au niveau des catégories encore plus jeunes. «Dans nos clubs, la catégorie des benjamins n'existe plus, nous avoue-t-il. Or, les experts de la Fifa vous diront qu'il est nécessaire de prendre le gamin très jeune, aux environs de 12 ans. Je vais militer pour que les clubs se mettent à investir dans une telle catégorie. Mon voeu serait que nous puissions nous focaliser sur ces gamins. Je pense que 5 années de préparation sérieuse peuvent les mener vers une première compétition internationale à 17 ans, qui pourrait être la CAN de U17». Par ailleurs, il y a le centre de Sidi Moussa que le MJS va céder à la FAF qui songe à en faire un centre technique régional. «Ce sera un grand acquis bien que je regrette qu'on ait privilégié le béton en construisant des bâtiments au détriment des aires de jeu, indiquera Tikanouine. On aurait gagné beaucoup d'espaces pour les entraînements. La Fifa doit nous aider dans le financement d'un terrain en gazon synthétique et pour cela, je crois qu'un terrain de 12.000 mètres carrés, attenant au centre de Sidi Moussa va également être cédé à la FAF. Avec une telle surface, le centre aura vraiment le statut de centre technique national. Il faudrait, ensuite, songer à donner les moyens aux Ligues régionales pour qu'à leur niveau on érige des centres techniques régionaux du football.»