Les déclarations du ministre de tutelle n'ont été, selon toute vraisemblance, qu'un coup d'épée dans l'eau. Les lycéens ne comptent, visiblement, pas lâcher prise avant que leurs revendications ne soient satisfaites. Hier encore, ils étaient nombreux à observer un sit-in devant l'annexe du ministère de l'Education nationale, sise au Ruisseau, à Alger. Le même mot d'ordre a été observé dans la majorité des lycées du territoire national. Pourtant, le ministre de l'Education nationale, Boubekeur Benbouzid, a promis, avant-hier, aux lycéens de se pencher sur leurs revendications. Il a, par là même, tenté de convaincre les lycéens des classes de terminale «de ne pas se décourager». Mais les déclarations du ministre de tutelle, selon toute vraisemblance, n'ont été qu'un coup d'épée dans l'eau. «Ce sont toujours les mêmes promesses qui reviennent de la bouche du ministre. Nous avons entendu les mêmes propos de nos proviseurs jusqu'au jour où ils nous ont avoué qu'ils ne peuvent rien et que la solution à notre problème ne relève pas de leur ressort. C'est pour cela que nous avons décidé de prendre notre destin en main», estiment les lycéens que nous avons rencontrés, hier, devant l'annexe du ministère de l'Education, à Alger. «Allégez les programmes» Ils étaient, en effet, plus d'une centaine à observer un sit-in devant cette institution, en signe de refus et de dénonciation des nouveaux programmes des classes de terminale proposés par la tutelle. Il est sans doute utile de rappeler que les lycéens réclament l'allégement des programmes, qu'ils estiment trop chargés. Aussi ont-ils demandé que les cours du troisième trimestre soient annulés. A Tizi Ouzou, les lycéens ont repris normalement les cours hier. Dans les lycées de l'intérieur de la wilaya, comme ceux de Draâ El Mizan, Boghni, les Ouadhias, Draâ Ben Khedda, Azazga et ailleurs, les lycéens sont en pleine veillée d'armes. Un des coordinateurs de ce mouvement a expliqué: «Si d'ici à dimanche, les pouvoirs publics ne répondent pas à nos doléances, alors on avisera et j'ai bien peur que le mouvement ne durcisse ses positions.» Les parents d'élèves candidats au baccalauréat, se «tiennent le ventre». A Bouira, les lycéens sont revenus à la charge. Des centaines se sont rassemblées, dans la matinée d'hier, devant le siège de l'Académie, où un sit-in a été observé. Ils ont tous tenu, à travers ce mouvement, à exprimer, encore une fois, leurs préoccupations et leurs craintes. A la deuxième journée de protestation, la colère de ces lycéens ne semble pas s'estomper. Les mêmes slogans et revendications ont été scandés. «Allégement du programme»; «Une prise en charge rapide des doléances», ont-ils exigé. «Au secours!» Les délégués des lycéens ont été reçus par le directeur de l'éducation au niveau de la wilaya de Bouira, mais ils ont l'intention de faire durer ce mouvement jusqu'à ce qu'une décision officielle, émanant de la tutelle de l'éducation, soit dictée pour satisfaire pleinement leurs doléances: «Nous allons poursuivre nos revendications», nous a dit un jeune lycéen, en classe terminale, sciences naturelles. A Constantine, la grève, conduite par les élèves de terminale auxquels se sont joints ceux de première et deuxième années, a pris une autre tournure. Plus de dix lycéens ont été interpellés par les forces de l'ordre, présentes en force. Malgré le dispositif mis en place par les autorités, la manifestation a eu lieu, sans pour autant que les forces antiémeutes, dépêchées, ne parviennent à dissuader les lycéens. Bien au contraire, ils étaient, hier, beaucoup plus nombreux, se regroupant au centre-ville durant toute la matinée. Ils revendiquaient, entre autres, un enseignement de qualité et réclamaient l'intervention du chef de l'Etat. «Bouteflika tal alina, Benbouzid khlaha alina» (Bouteflika vient à notre secours, Benbouzid nous a ruinés), scandaient encore les lycéens. Le mouvement a touché tous les lycées de la wilaya de Constantine. Les policiers ont encore usé de leurs matraques pour tenter de disperser les manifestants, décidés à aller jusqu'au bout. «Notre avenir est en jeu. On refuse d'être des jouets entre les mains de Benbouzid», a déclaré un lycéen de terminale. A Oran, la situation a failli dégénérer, hier, lorsque les policiers ont arrêté Ilyès, un élève du lycée Lotfi. Ce dernier a été emmené au commissariat de police de la 8e Sûreté urbaine. Sitôt interpellé, les camarades du lycéen ont, sur-le-champ, réagi en observant un sit-in devant le siège de la Sûreté, demandant la libération d'Ilyès. Ce dernier a été relâché par la suite. Les lycéens des classes de terminale d'Oran sont plus que déterminés à poursuivre leur mouvement de protestation qui marque son troisième jour.