Les travaux d'aménagement d'une aile du Musée national ont mis à jour un bassin et une galerie souterraine qui dateraient de l'époque ottomane. Des pipes en terre cuite, des fragments de céramique et de meule...ont surgi des entrailles de la terre. L'histoire de la villa du Bardo refait surface. Elle ressemble à cette mémoire qui rejaillit d'outre-tombe. La visite que nous avons effectuée, ce week-end, au Musée du Bardo était aussi inopportune que l'a été la découverte qui a vu le jour il y a pratiquement un mois de cela. Les ouvriers chargés des travaux d'aménagement de la partie supérieure du musée ont, et de manière tout à fait accidentelle et inattendue, participé à la mise à jour d'un bassin et d'une galerie souterraine qui remonteraient à l'époque ottomane. Le bassin de forme carrée est composé de deux bacs situés à deux de ses angles. Ils auraient eu pour fonction «d'héberger» des plantes aquatiques. En son beau milieu s'érige une vasque qui pourrait avoir servi de socle à une fontaine. Elle aurait apparemment subi quelques transformations puisqu'elle porte des traces d'une pellicule de ciment. Les modifications subies par le bassin dateraient du début des années 1950, selon des informations recueillies auprès d'un ancien gardien du musée du Bardo, aujourd'hui à la retraite. Sa profondeur a été considérablement réduite pour atteindre quelques dizaines de centimètres, pour des raisons de sécurité, paraît-il, afin d'éviter tout risque de noyade, en l'occurrence aux enfants. Le bassin, qui a retrouvé ses dimensions d'origine, est doté d'un escalier en pierre, à un autre de ses angles. Il permet de descendre avec une certaine aisance à l'intérieur, sa profondeur est désormais évaluée à une bonne hauteur d'homme. Il est situé en contrebas de la fontaine qui fait face au «diwan», non loin des appartements anciennement réservés à la «favorite». C'est sur ces mêmes lieux qu'a été pratiquée l'ouverture qui permet de livrer un accès à la galerie souterraine. A l'intérieur de celle-ci, il a été dénombré deux chambres aménagées qui auraient pu servir pour le stockage de foin pour des chevaux. Le tunnel mènerait en effet aux anciennes écuries de la villa du Bardo, il déboucherait aussi sur la salle actuelle réservée à la préhistoire. Cette résidence d'été, avant d'être transformée en superbe musée, a dû changer de mains et de propriétaires à plusieurs reprises. Ce somptueux monument algérois à l'architecture typiquement mauresque, a vu le jour selon toute vraisemblance au XVIIIe siècle. Son histoire est, cependant, rendue assez imprécise par le manque d'éléments qui font défaut à sa reconstitution. Ses ornements et sa conception renseignent, par contre, sur l'extraordinaire raffinement recherché de ceux qui n'ont songé qu'à le choyer. L'hypothèse la plus plausible et la plus répandue attribue l'origine de ce joyau architectural à un noble tunisien exilé. Un certain prince Mustapha Ben Omar cité par Henri Klein dans ses feuillets d'El Djazaïr. Selon certains spécialistes, le «Bardo» serait une déformation qui provient du nom espagnol «Prado». Il renverrait aux somptueux palais des sultans Hafsides qui remonteraient au XVe siècle et dont on retrouve la trace en banlieue tunisienne. Au tout début de la colonisation française, en 1832, le «Bardo» devint la propriété du général Exel Mens. Ali Bey, Agha de Biskra à qui il fut cédé juste après, s'en sépara à son tour au profit d'un certain Joret, Français d'origine. La villa du Bardo serait ce type de résidence que les Algérois aimaient à s'offrir. Ses propriétaires eurent le réflexe qui témoigne d'un goût certain pour l'esthétique. Il atteste d'une culture extraordinairement raffinée. L'ex-puissance coloniale en fit l'acquisition à l'occasion du centenaire de la colonisation de l'Algérie. Elle l'érigea en Musée de préhistoire et d'ethnographie. N'ayant pas son égal sur le continent africain, il retrace l'une des plus belles aventures de l'histoire de l'humanité.