Certains décèlent une volonté de nuire aux derniers des Mohicans de la production nationale dont l'un est public et l'autre privé. L'affaire dite de l'Oaic (Office algérien interprofessionnel des céréales) vient de recevoir un début d'éclaircissement. Cette affaire a été traitée, durant la journée de dimanche, d'abord au niveau du procureur de la République près le tribunal d'El Affroun, ensuite par la juge d'instruction chargée de ce dossier. La première manche, la plus délicate, a été l'audition par le procureur de la République de plus d'une trentaine de personnes. Une audition effectuée sur la base du rapport de l'enquête de la Gendarmerie nationale qui a été déclenchée à la suite d'une lettre anonyme. La préparation de l'enquête avait duré plus de huit mois pour aboutir à trois constats: des livraisons jugées avantageuses pour le groupe Sim, ainsi que la pratique de prix bas par rapport à ceux accordés à d'autres clients. De plus, l'enquête a révélé des irrégularités injustifiées dans les livraisons de l'Oaic, estimées globalement à 7 milliards de centimes. Pour ces trois mobiles, les enquêteurs ont interpellé 35 personnes concernées de près ou de loin dans les transactions de blé, en premier lieu les directeurs centraux de l'Office, les directeurs régionaux d'El Affroun, Khemis Miliana et Blida et le président du groupe Sim lesquels ont focalisé l'attention. Au départ, la majorité d'entre eux ont été convoqués en tant que témoins. Mais le procureur de la République ne l'a pas entendu de cette oreille. A la fin des audiences, tard dans la soirée, il a présenté un rapport accablant et sévère au juge d'instruction. Il a emballé des cadres dans un même sac en leur adressant des accusations graves de dilapidation de deniers publics, non-respect de la réglementation dans les passations de marchés, faux et usage de faux et négligences ayant entraîné un manque à gagner et des fuites organisées. C'est suffisant pour demander le mandat de dépôt des 13 personnes auditionnées. La seconde manche, la plus délicate, l'audience par la juge d'instruction, a commencé juste après, pour finir aux environs de minuit. Le marathon a été insoutenable pour les personnes interrogées et la multitude des membres qui les accompagnaient et les attendaient dehors. Elle a tenu tout le monde en haleine vu que l'audience a pris une tournure inattendue et délicate dans l'attente de la décision de la juge. Toutefois, la sortie des premières personnes, dont l'ex-directeur de l'Oaic, a donné espoir à leurs proches qui les ont accueillies avec soulagement. On annonça que la juge allait libérer tout le monde vu les explications qui lui ont été données. Des cadres et proches du président du groupe Sim nous ont déclaré que le dossier présenté comme consistant, était vide, car les relations en matière de prix et de quantités établies entre le groupe Sim et l'Oaic sont conformes à la réglementation. Ainsi, le «trou» signalé de 7 milliards, étalé sur sept ans, soit une moyenne de disparition d'un milliard par an, reste aussi un mystère. En dehors de ce puzzle serré, d'aucuns ont voulu le comparer à celui des grands scandales qui avaient été traités avec mesure par la cour de Blida. Certains aussi peuvent déceler derrière la lettre anonyme les agissements de gros intérêts obscurs, qui veulent éliminer les derniers des Mohicans de la production nationale, deux opérateurs, l'un public et l'autre privé, opérant dans un secteur stratégique concernant le blé et la semoule. La décision de la juge d'instruction a finalement coupé la pomme en deux en décidant de placer treize personnes sous contrôle judiciaire et 22 en liberté provisoire.