76% des cas de suicide en Algérie sont enregistrés chez des adolescents, les trois quarts sont des filles et 6% sont ceux qui récidivent. Fragilisés peut-être par le marasme social, des milliers d'Algériens mettent de plus en plus fin à leurs jours. Devant les proportions inquiétantes qu'a pris le phénomène du suicide, les spécialistes de la santé ont plaidé, à l'unanimité, pour la réalisation d'une étude nationale sur ce phénomène. C'est ce qui ressort de la IXe journée médico-judiciaire tenue jeudi à Alger et ayant pour thème «Suicide et ses aspects médico-légaux». D'emblée, le Pr Madjid Bessaha, président de la Société de médecine légale (Saml) a souhaité que cette journée scientifique soit «le point de départ d'une étude nationale sur ce phénomène», à l'instar de celle lancée, en collaboration avec l'Institut national de santé publique (Insp) sur les femmes battues. Les chiffres sont là pour démontrer la recrudescence enregistrée du suicide en Algérie. En se pendant à un arbre, en ingérant des médicaments, en se jetant d'un immeuble...120 dépressifs mettent fin à leurs jours chaque année. On apprend que 76% des cas de suicide en Algérie sont enregistrés chez des adolescents, les trois quarts sont des filles et 6% sont ceux qui récidivent. Intervenant dans ce contexte, le président de la Saml a fait remarquer qu'«il ne se passe pas un jour sans qu'un service de médecine légale en Algérie ne pratique une autopsie pour cause de mort violente, notamment un suicide». Cependant, a-t-il déploré, l'Algérie demeure l'un des rares pays au monde à ne pas figurer sur la liste des statistiques mondiales. Les statistiques officielles font encore défaut. Les efforts consentis par de nombreux services de médecine légale au niveau de plusieurs CHU, pour alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur ce fléau, n'ont pas abouti aux résultats escomptés. Des études ont été réalisées au niveau de ces services dont les premiers résultats ont été présentés au cours de cette journée. Parmi ces études figure celle réalisée dans la région de Blida par le service de médecine légale du CHU de cette wilaya, durant la période allant de 2003 à 2007. Affirmatif, le Pr Bessaha a précisé que le service a enregistré 75% de suicidés de sexe masculin pour une tranche d'âge moyenne de 33 ans. Et d'enfoncer le clou en déclarant que «55% des sujets sont d'un niveau économique bas, 56% sont célibataires et 54% des cas de suicide surviennent à domicile dont 50% des cas par pendaison et que 45% ont des antécédents psychiatriques connus». Une autre étude rétrospective des cas de suicide autopsiés par un service de médecine légale, a été réalisée par le CHU Mustapha-Bacha durant la période 2003-2007. Les résultats ont confirmé que 66,5% des sujets victimes relèvent de la gent masculine. Selon le Dr K.H. Naït Rabah, sur les 155 cas de suicide autopsiés et relevant de la région d'Alger, 57% sont célibataires, 36% présentent des antécédents médicaux dont 23% avaient déjà fait des tentatives de suicide. Elle soutient, d'autre part, que les décès par suicide représentent 12,8% de mort médico-légale. Le phénomène du suicide est insuffisamment étudié à l'heure actuelle. Les médecins plaident pour une nouvelle politique de santé publique visant à considérer le suicide comme un véritable problème de santé publique.