Abbas a rencontré lundi Olmert. Pour quelle finalité alors que le processus de paix est miné par les initiatives contre-productives israéliennes. En acceptant de rencontrer à Jérusalem-Ouest le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, le président palestinien, Mahmoud Abbas, non seulement, est entré en toute connaissance de cause, dans un drôle de jeu, mais aussi, sans doute surtout, a donné une caution à un responsable israélien en fin de parcours, Ehud Olmert, rattrapé par de nombreux scandales de corruption et lâché par ses propres amis politiques qui demandent son départ. Alors que vient faire le président palestinien dans cette galère au moment même où les autorités israéliennes annoncent; le plus officiellement du monde, le lancement d'un appel d'offres pour la construction de 884 logements dans le secteur arabe de Djebel Abou Ghneim, à Jérusalem-Est, rebaptisé «Har Homa»? Ce scénario israélien de dirigeants qui trempent dans des affaires douteuses et/ou mis sur la sellette pour une raison ou une autre - avec en perspective des élections qui bloquent toute avancée dans le processus de paix - semble aujourd'hui bien rodé et va donner au gouvernement israélien de prendre du recul par rapport à ses engagements envers le processus de paix qui, affirme-t-on, a été relancé le 27 novembre dernier lors de la conférence d'Annapolis aux Etats-Unis. Or, aucun progrès notable n'a été réalisé depuis cette conférence et les négociateurs palestiniens - menés par l'ancien Premier ministre Ahmed Qorei - et israéliens - sous la conduite du chef de la diplomatie israélienne, Tzipi Livni - tournent en rond à défaut d'avancées concrètes et quantifiables. Or, le statut de Jérusalem-Est, la question des frontières, les colonies juives en Cisjordanie et à El-Qods (Jérusalem-Est) en sus du problème du retour des réfugiés (palestiniens) et du sort des prisonniers palestiniens - qui se comptent par milliers dans les geôles israéliennes - sont des dossiers demeurés en l'état et où aucun progrès n'a été relevé de l'aveu même des Palestiniens qui estiment que le fossé entre eux et les Israéliens reste profond. Le principal négociateur palestinien, Saeb Erakat, a affirmé, lundi au sortir de la réunion entre Olmert et Abbas, que le «fossé demeure. Les négociations sont sérieuses mais elles sont entravées par la colonisation qui risque de les torpiller.» «Israël doit choisir entre la colonisation et la paix», a ajouté M.Erakat Or, Ehud Olmert à, lui-même, à la veille de sa rencontre avec Mahmoud Abbas, donné le feu vert a la construction des 884 logements à El-Qods. Alors pourquoi cette rencontre Abbas-Olmert? Pour quelle finalité du moment où rien ne pouvait être attendu de la part d'un homme sur la corde raide et qui est aujourd'hui, contesté par la classe politique israélienne, qui ne peut dès lors prendre des engagements fermes au nom de l'Etat hébreu. Sachant tout celà, pourquoi Mahmoud Abbas persiste-t-il à donner des gages à des interlocuteurs israéliens qui n'ont rien fait jusqu'ici pour justifier les rounds de négociations qui s'avèrent de plus en plus sans objet. Celà d'autant que le président palestinien réaffirmait la position de l'Autorité palestinienne après l'annonce de nouvelles constructions à Jérusalem-Est, déclarant: «Nous n'accepterons jamais la poursuite de la colonisation qui constitue le principal obstacle sur le chemin de la paix.» «Aujourd'hui, je vais voir Ehud Olmert, la colonisation et le sort des prisonniers seront les principaux sujets à l'ordre du jour», a encore dit M Abbas. Mais au total, ce sont toujours les Israéliens qui impriment aux négociations leur propre rythme. M.Abbas, qui a reçu le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a réitéré lundi dans une déclaration à la presse: «Nous avons attiré l'attention d'Israël et de la communauté internationale sur le fait que si Israël ne met pas fin à la colonisation, il sera difficile de parvenir à un règlement politique.» Or, la poursuite des constructions de logements en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, l'affirmation d'Olmert que «Jérusalem» demeurera la «capitale éternelle» d'Israël constituent autant d'obstacles, tant sur le chemin de la paix que de la création de l'Etat palestinien alors qu'Israël s'efforce de morceler au maximum le territoire palestinien de Cisjordanie rendant problématique l'édification d'un Etat palestinien. Cela n'a pas de sens quand Israël prétend oeuvrer pour la paix au moment même où il multiplie les obstacles à la création de l'Etat palestinien, donc à l'instauration de la paix. Face à cet état de fait, Washington a mis en garde Israël contre ses projets de construction à Jérusalem-Est, estimant que les «activités de colonisation exacerbent les tensions» avec les Palestiniens. De son côté, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit, «profondément préoccupé» par ces projets qui «vont à l'encontre des engagements aux termes de la Feuille de route et du processus d'Annapolis». Un euphémisme, alors que ni les Etats-Unis, ni les Nations unies ne condamnent formellement ce qui apparaît comme des manoeuvres délibérées de la part d'Israël de casser le processus de paix sans en endosser l'échec.