«Les médias algériens et les questions liées aux usages de la langue amazighe» est le thème d'un colloque organisé par le Haut commissariat à l'amazighité, depuis samedi dernier et ce jusqu'au 16 juin. Les systèmes de communication ont relativement évolué en Algérie dans les champs d'application de l'audiovisuel, de la presse écrite, de la publicité, de la téléphonie et dans l'espace satellitaire. Paradoxalement, la langue amazighe n'a pas bénéficié de cette évolution avec une prise en charge conséquente, conformément aux orientations prises par l'Etat depuis 1995, année de création du Haut commissariat à l'amzighité. La langue amzighe n'est pas développée à la télévision. Elle ne bénéficie pas des nombreuses radios locales. Aucune initiative des secteurs publics n'est venue encourager l'écriture de la langue amazighe dans les médias écrits. La constitutionnalisation de la langue amazighe en avril 2002 en tant que langue nationale n'a eu aucune répercussion institutionnelle, notamment dans les médias. Théoriquement, le droit à l'information est garanti dans notre pays à tous les citoyens, quelle que soit leur langue d'usage. C'est pour toutes ces raisons que le Haut commissariat à l'amazighité a décidé d'organiser ce colloque et se pencher ainsi sur les véritables causes de cette inertie et proposer la relance d'une politique nationale de l'amazighité. Dans ce contexte, différents sujets sont abordés durant ce colloque et ce, autour des axes suivants: le droit à l'information, la régulation de la Télévision et de l'Internet en Algérie, la langue amazighe dans les médias et le droit, la langue amazighe et l'espace territorial, la langue amazighe et la radio, les médias lourds et tamazight, langage de la presse et standardisation de la langue, les télévisons satellitaires et les espaces médiatiques. Au terme de la rencontre, il sera dégagé une série de recommandations qui seront soumises à l'assistance. Aussi, la première journée du colloque s'est voulu au départ un hommage à plusieurs figures clés du mouvement berbère, de celles qui ont porté cette langue au-devant de la scène, que ce soit par l'oralité ou par l'écrit. Parmi ceux-là on citera Nna Tawes At Abdeslam et Rachid Alliche, l'un des bâtisseurs des toutes premières passerelles de l'oralité vers l'écriture de la langue amzighe, après l'Indépendance. Il est aussi l'un des militants de la première heure du mouvement culturel berbère. C'est de façon naturelle que le Haut commissariat à l'amazighité lui a dédié ce rendez-vous. Parmi les intervenants qui ont marqué la première journée du colloque, on retiendra Belkacem Mostefaoui, maître de conférence au département des sciences de l'information à l'université d'Alger, qui débattra de la régulation de la Télévision et de l'Internet en Algérie en abordant des questions sur la formation d'un espace public ouvert à l'international. Selon lui, le monopole de programmation télévisée en Algérie est intégral, dans le même temps, les usages de l'Internet s'inscrivent, depuis un décret de 1998, dans le cadre d'une claire «ouverture contrôlée». «La régulation par l'Etat algérien des deux médias, Télévision et Internet se comprend également à la lumière de la régulation de la presse écrite, situation marquée par des libertés notables. D'où des questions sur l'évolution actuelle de la liberté de communication, en particulier sur les marges d'expression d'une opinion publique et d'un espace public ouvert» explique-t-il. Pour sa part, Kamel Sadou, enseignant (doctorat) à l'Université d'Alger, abordera la question de «la langue amazighe entre média et territoire». L'orateur proposera d'orienter sa communication sur quatre axes: la langue amazighe face aux notions «d'identité», «d'altérité» et de nation, à la lumière des mythes fondateurs de l'Algérie contemporaine, la langue amzighe dans la problématique patrimoniale, les notions de «médias de proximité», de «régionalisation» et de «modernisation» dans le discours des responsables de l'information dans le contexte de l'évolution des médias. Quels territoires pour la langue amazighe et l'amzighité? C'est autour de ces quatre questionnements principaux que Kamel Sadou a choisi d'aborder le cas particulier des médias dans les régions de l'Ahaggar et du Tassili. «L'introduction de la variable territoriale permet de concrétiser la réflexion et de montrer de manière empirique les limites conceptuelles et pratiques des politiques en cours», dira-t-il. L'orateur fera remarquer la nécessité aussi de sortir la langue amazighe du ghetto en trouvant des alternatives sans pour autant attendre des solutions politiques, pour que les gens commencent à créer leurs représentations d'images.