La Russie a créé une énorme surprise en se qualifiant pour les demi-finales de l'Euro-2008 à l'issue d'une victoire sans appel (3-1 a.p.) face aux Pays-Bas, pourtant impressionnants lors du premier tour mais incapables de faire face à la mainmise collective des troupes de Guus Hiddink, samedi à Bâle. Le suspense a été total au cours d'une rencontre qui a hésité avant de choisir son camp, Van Nistelrooy parvenant in extremis à égaliser (86e) après l'ouverture du score de Pavlyuchenko (56e). Mais Torbinski (112e) puis Arshavin (116e) ont offert à la Russie une douce revanche sur la finale perdue de l'Euro-88, hissant leur pays dans le dernier carré d'une grande compétition internationale pour la première fois depuis la chute de l'URSS. Un stade Saint-Jacques envahi de supporteurs néerlandais et transformé en annexe de l'ArenA d'Amsterdam, un adversaire qui avait fait sensation au premier tour en humiliant les champions du monde italiens (3-0) et leurs finalistes français (4-1): la tâche de la Russie était pourtant a priori impossible mais Hiddink et ses hommes ont réussi là où la Squadra Azzurra et les Bleus avaient échoué dans les grandes largeurs. Comme souvent lors des dernières phases finales, après une entame de tournoi brillante, les Oranje se sont liquéfiés, victimes de ce mal typiquement néerlandais: la suffisance. Les Pays-Bas n'ont pas réalisé qu'ils avaient en face d'eux de véritables clones, façonnés de main de maître par le «Professeur Hiddink», qui avait déjà surpris la planète football en hissant la Corée du Sud en demi-finales du Mondial-2002. Cette fois, il ne s'est pas gêné pour administrer une leçon à ses compatriotes et faire de la Russie le nouvel épouvantail de l'Euro. Ses prochains adversaires dans le dernier carré, l'Italie ou l'Espagne, opposés dimanche à Vienne, sont prévenus. Marco Van Basten n'a, lui, rien vu venir et quitte la tête de la sélection néerlandaise sur un bilan mitigé (8e de finale du Mondial-2006, quart de finale à l'Euro-2008) avant de voguer vers un nouveau défi à l'Ajax Amsterdam. Dès le début de match, la domination des Russes était manifeste grâce à la supériorité de leur milieu de terrain et la technique brillante d'Arshavin, le meneur de jeu-attaquant. Et il a fallu un grand Van der Sar, le seul joueur néerlandais à jouer à son vrai niveau avec le milieu de terrain De Jong, pour repousser les assauts russes (Zhirkov, 6e, Arshavin, 31e, Kolodin, 32e) et retarder l'inéluctable. Le gardien des Oranje, qui a égalé le record du nombre de matches disputés dans un Championnat d'Europe par Lilian Thuram (16), a longtemps joué les héros avant de céder sur une reprise de Pavlyuchenko (56e), à la conclusion d'un centre parfait de Semak, perdu de vue au Paris SG mais totalement retrouvé depuis son départ de la capitale française dans un rôle de N.6. Ce but a réussi à faire taire les 30.000 supporteurs néerlandais, qui, là aussi, ont perdu leur match face aux maigres 5000 Russes massés dans les travées du stade de Bâle. Van Nistelrooy a bien relancé les siens (86e) mais les buts de Torbinski (112e) puis d'Arshavin (116e) en prolongation n'ont fait qu'entériner une qualification russe logique. L'étonnant succès du Zenit Saint-Pétersbourg en Coupe de l'UEFA, au nez et à la barbe du Bayern Munich, de Marseille, des Glasgow Rangers et de Villarreal, avait déjà replacé la Russie dans le concert des nations européennes. Cette qualification pour les demi-finales de l'Euro ne fait que consacrer un peu plus le réveil d'un empire longtemps endormi.