Les observateurs de la scène politique nationale avancent deux lectures à propos du changement intervenu au sein du gouvernement. Quels sont les secrets du dernier «remaniement»? S'agit-il de promotion ou de sanction? D'échecs ou de succès? Deux lectures ressortent de ce dernier changement au sein du gouvernement. L'une est d'ordre politique, l'autre technique. Technique dans la mesure où il n'y a pas eu, vraiment, un changement global du gouvernement. On parle plutôt, dans ce cas, d'un réaménagement technique, car on n'a constaté que le départ de deux ministres et la permutation de portefeuilles entre trois autres. L'arrivée de Hamid Bessallah, ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication ne change pas la donne. Pour l'instant, un grand remaniement gouvernemental ne semble pas être la priorité du Président. Le rappel de Ouyahia peut être interprété dans le sens où Abdelaziz Bouteflika lui a confié le soin de resserrer un cabinet qui s'est quelque peu dilué et de remettre au travail les ministres aux fins de terminer dans les délais impartis les grands chantiers du Président. Hormis, le projet de l'autoroute Est-Ouest qui fonctionne bien, beaucoup de retards ont été constatés dans d'autres chantiers tels le métro d'Alger et l'habitat. Le patron du RND a toujours assumé des responsabilités délicates. De 2003 à 2006, le pays a traversé des périodes difficiles. On cite, entre autres, la crise de Kabylie, le séisme de Boumerdès et le défi de la relance de l'économie nationale en panne de renouveau. Vieux routier de la politique, Ouyahia a toujours su sortir indemne des situations contraignantes. Egalement, ce changement reste technique dans la mesure où Ahmed Ouyahia aura une mission de suivi des différents projets et de les mener à leur terme. Aussi, Abdelaziz Belkhadem redevenu ministre d'Etat, représentant personnel du président, et libéré de la charge gouvernementale, aura sans doute à s'occuper à plein temps d'un autre chantier, plus délicat sans doute, celui de la révision de la Constitution. C'est aussi la deuxième lecture qui est faite suite au léger «lifting» du gouvernement. Ces derniers n'écartent pas la possibilité que l'annonce de cette révision soit faite dans les semaines à venir. Ils argumentent: le retrait de M.Belkhadem est loin d'être une sanction. Les connaisseurs des coulisses de la politique nationale estiment que le Président Bouteflika ménage son ex-chef de gouvernement et le destine à d'autres missions. Ils indiquent que le chef de l'Etat a plutôt libéré Belkhadem pour lui assigner une tâche: le suivi d'une tâche devenue urgente alors que le temps presse, en l'occurrence la révision de la Constitution. Abdelaziz Belkhadem a non seulement porté durant près de trois ans, à bout de bras, ce projet de révision, mais aussi il milita fermement pour un troisième mandat pour le Président Bouteflika. Il est, dans cette optique, tout à fait naturel que le Président le rappelle pour achever un travail demeuré en plan. Parallèlement, le secrétaire exécutif du Front de libération nationale doit aussi rétablir l'ordre et la discipline dans la maison FLN. C'est pour cette raison, ajoutent les mêmes observateurs, que le remplacement de M.Belkhadem par M.Ouyahia ne s'inscrit pas dans la logique promotion-sanction. En fait, M.Belkhadem a été utile pour une période donnée de la gouvernance de l'Etat. Pour les missions à venir, le profil de Ahmed Ouyahia semble le plus répondre aux visions du Président pour ce qui reste de son second mandat. Certes, Belkhadem n'a pas laissé que de bons souvenirs de son passage à la chefferie du gouvernement, marqué par le marasme social, la panne économique et un retard dans la réalisation des chantiers, mais ce n'est pas pour autant que son bilan est qualifié de catastrophique. Le fait qu'il est confirmé dans ses fonctions de ministre d'Etat et représentant personnel du président Bouteflika fait de lui l'une des personnalités les plus importantes du staff présidentiel. Les mêmes observateurs ajoutent d'autres éléments qui prouvent que ce réaménagement s'inscrit en droite ligne de la révision de la Constitution. Ils avancent en premier lieu, la dernière sortie du président de l'APN, Abdelaziz Ziari, qui a annoncé que la modification de la loi fondamentale interviendrait dans les prochains jours. M.Ziari ne s'exprimait pas en l'air. La preuve, on vient de prolonger d'un mois la session de printemps du Parlement (lire l'article d'Achira Mammeri). Il serait fort probable que la nouvelle Constitution soit soumise aux «députés» lors de cette session «hors temps». Ce qui confirme cette hypothèse, est la déclaration de l'ex-chef de gouvernement Abdelaziz Belkhadem qui a indiqué dans une déclaration au journal français Le Monde, que la Constitution ne sera pas soumise à référendum. Elle passera, selon lui, directement au Parlement. Selon des indiscrétions, la nouvelle Constitution prévoit l'un de ces deux postes, vice-président ou Premier ministre.