Cette deuxième distinction est le couronnement d'un long travail d'écriture, mené avec patience, régularité et surtout avec un talent incontestable. En 1987, il obtient le prix Goncourt et en 2008, il est élu à l'Académie portant le même nom. Avec son entrée dans cette prestigieuse institution, le romancier marocain honore l'ensemble de la littérature maghrébine d'expression française. Cette deuxième distinction est le couronnement d'un long travail d'écriture, mené avec patience, régularité et surtout avec un talent incontestable. Au tout début de sa carrière d'écrivain, Benjelloun a signé plusieurs romans importants mais c'est surtout la parution de La nuit sacrée qui le fera sortir définitivement de l'anonymat. Ce roman mystérieux, écrit avec un style lyrique propre à l'auteur, reste l'un des plus beaux romans maghrébins. Il se lit comme un long poème. Toutefois, il s'agit d'un roman dont la trame peut tenir en haleine le lecteur jusqu'à la dernière phrase. L'imagination fertile de cet écrivain, né à Fès en 1944, fait de La nuit sacrée un texte plein de rebondissements et de surprises. Le lecteur va jusqu'à oublier si le personnage principal est un homme ou bien une femme. C'est sans doute cette capacité rare de Benjelloun à entretenir la confusion, qui a attiré l'attention de l'Académie dont il est devenu membre vingt et un ans plus tard. La nuit sacrée a été précédé de L'Enfant de sable. Ce roman n'est que la première partie de l'oeuvre qui lui a valu le prix Goncourt. Ces deux tomes narrent l'histoire d'un père marocain dont l'épouse n'enfante que des filles. A la huitième grossesse, il décide que le bébé sera un garçon «même s'il est une fille». Il travestit donc son huitième enfant en mijotant tous les épisodes qui suivent une naissance d'un enfant mâle. C'est un véritable tour de magie littéraire que réussit Benjelloun. La consécration est bien méritée. Pourtant, comme tout homme qui réussit, Benjelloun essuie les foudres de quelques détracteurs. Y compris dans son pays d'origine. Des observateurs ont dit et écrit que Benjelloun a eu les faveurs de l'Académie française parce qu'il a donné une image négative de sa patrie. Il s'en est trouvé même qui ont tenté de semer la zizanie en citant d'autres romanciers marocains dont le talent est à classer à la même enseigne que celui de Benjelloun et qui mériteraient plus un tel prix, d'après ceux qui ont la prétention de contester l'Académie Goncourt. On peut citer Mohamed Kheireddine et Dris Chraibi. Pourtant, le fait que Benjelloun soit récompensé n'enlève rien à la stature des deux autres écrivains. Ce genre de polémique, dont a été victime Benjelloun, ne s'est pas arrêté avec l'obtention du Goncourt puisqu'à la publication de son pathétique roman, Cette aveuglante absence de lumière, Benjelloun s'est encore retrouvé au banc des accusés. Ce livre est tiré des témoignages d'un ancien prisonnier de Tazmamart condamné à l'époque du Roi Hassan II. Ce qui est reproché à Benjelloun: son silence sur la question, du vivant du Roi en question. Le romancier se défend en affirmant que s'exprimer à l'époque pouvait engendrer une réaction du Roi qui l'aurait empêché de fouler le sol marocain où vivait toujours sa mère. Une réponse que beaucoup ont trouvée tiède. Dommage que ce genre de débats ait fait de l'ombre à la qualité littéraire de ce roman émouvant. Benjelloun continue d'écrire malgré tout et publie régulièrement: L'auberge des pauvres et Labyrinthe des sentiments sont les seuls romans de Benjelloun ne se déroulant pas en territoire marocain. Dans ces livres, l'auteur emmène le lecteur dans des villes mythiques d'Italie à l'image de Naples. Plus récemment, Benjelloun a publié un roman sur le phénomène de l'émigration, intitulé Partir. Avec ce dernier, l'écrivain quitte sa maison d'édition de toujours, à savoir le Seuil et passe chez Gallimard. Le dernier roman de Tahar Benjelloun, Ma mère, comme l'indique le titre, est un retour sur les dernières semaines de sa mère. Ce roman est à la fois un livre de souvenirs, ceux de l'enfance et de l'adolescence, mais surtout un ouvrage sur la mort et la douleur indicible qui l'accompagne. Benjelloun a écrit ce roman pour tenter d'oublier qu'il n'est pas possible d'oublier sa mère. Avec plus de trente romans publiés en France et traduits dans une multitude de langues, on ne peut plus parler de littérature française contemporaine sans le citer. Ses livres ont toujours enregistré des ventes importantes. En plus du fait qu'ils soient d'une haute facture littéraire, il ne faut pas omettre de rappeler que Benjelloun fait usage d'un français simple qui fait que ses livres sont accessibles au large lectorat. A commencer par ses tout premiers à l'instar du roman autobiographique L'écrivain public, Moha le fou, Moha le sage, Harouda, Les yeux baissés, La nuit de l'erreur, La prière de l'absent...