L'actuel ministre de l'Agriculture se débat dans une situation inextricable héritée de son prédécesseur. Le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa rassure que l'autosuffisance en céréales sera atteinte l'année prochaine. Tous les ingrédients sont réunis pour atteindre cet objectif. «L'Etat offre les meilleurs moyens et cette production ne peut être que meilleure», a déclaré, hier, M.Benaïssa lors d'une rencontre tenue au siège du ministère avec les présidents des coopératives des céréales et légumes secs (Ccls). Ceux-ci ont été interpellés à plus d'un titre pour assumer pleinement leur responsabilité. Pour le ministre, la sécurité alimentaire est une affaire de «souveraineté nationale.» A cet effet, il lance un message très expressif à l'égard de ses directeurs. «Vous avez tous les moyens pour une prise de conscience collective.» «Ce n'est pas un mot creux», prévient-il. Cela étant, le pari n'est pas intégralement gagné par le département de l'agriculture, appelé à nourrir 35 millions d'Algériens. Si les intentions du ministre sont bonnes, s'il est l'architecte de la Stratégie du développement rural durable (Sdrd), il doit malgré tout, garder une marge de doute quant à la saison prochaine. Evidement, cette forte baisse de la production céréalière enregistrée durant la campagne 2008 va être compensée par une augmentation des importations pour pouvoir répondre aux besoins nationaux. Ainsi, le danger de la crise alimentaire mondiale qui, jusque-là, n'a fait qu'effleurer l'Algérie, risque de se poser d'une manière cruciale cette fois-ci. Ce recul de la production céréalière de l'ordre de 50% est dû essentiellement aux importantes insuffisances pluviométriques survenues, notamment dans l'ouest du pays. Cet argument ne tient plus dans la mesure où le ministère des Ressources en eau affirme que les besoins hydriques de l'Algérie ont été totalement couverts. Qui croire alors? Le fait est que le danger de la sécurité alimentaire est bien là. Le constat provient des spécialistes du département que gère M.Benaïssa lui-même. Un scepticisme est affiché quant à l'autosuffisance en céréales. Qu'en est-il de l'exportation? En ce moment, elle demeure utopique. Apostrophé sur le bilan de la campagne moissons-battages de l'année 2007-2008, Amar Assabah, directeur de la réglementation et du développement des productions agricoles (Drdpa), estime qu'elle «donne entièrement satisfaction». Sur les 21 millions de quintaux de céréales prévus, le ministère de l'Agriculture a enregistré 17 millions, soit 93% des prévisions. Cependant, cette quantité est, aux yeux de ce responsable, extrêmement loin de satisfaire la consommation nationale et permettre à l'Algérie de «se débarrasser» du statut qui fait d'elle un importateur privilégié des céréales, en général, et du blé, en particulier. Pour notre interlocuteur, le citoyen algérien est un grand consommateur de blé. «Chaque citoyen consomme 200 kilos par an. Pour évoquer l'autosuffisance, il nous faut annuellement 60 millions de quintaux entre la production nationale et l'importation», précise-t-il. En juin 2007, les importateurs algériens ont signé, selon Yvan Lebeau, chef de l'Association française des producteurs de céréales (France export céréales) à Alger, des contrats pour l'acquisition de 3,3 millions de tonnes de blé tendre et 8000 tonnes de blé. Ces contrats sont à livraison différée. S'agissant du blé importé, M.Assabah estime, qu'il est d'«une excellente qualité». Sans tourner autour du pot, il infirme certaines informations ayant évoqué l'existence d'un blé d'une mauvaise qualité sur le marché local. Pour augmenter la production nationale, M.Benaïssa a affirmé qu'une superficie de 345.000 hectares, répartie à travers 132 communes identifiées par les services de son ministère, dispose d'un important potentiel de production avec un rendement moyen allant jusqu'à 30 quintaux par hectare avec un système d'irrigation rationnel. Les prévisions de croissance en matière de production céréalière à travers ces 132 communes pourraient atteindre les 12% à l'horizon 2013, a-t-il pronostiqué. Abordant le taux de collecte de la production auprès des agriculteurs par les Ccls, le ministre a constaté une hausse de ce taux qui a été porté à 25% contre 13% auparavant.