Des émissaires de la communauté internationale devaient se concerter hier à Nouakchott pour «aider la Mauritanie à sortir de la crise», quatre jours après un coup d'Etat mené par Mohamed Ould Abdel Aziz, qui affirme être intervenu pour «sauver» le pays. Au centre de la capitale mauritanienne de 800.000 habitants, bâtie sur le sable entre désert et océan, un conseil de 11 militaires est désormais bien installé au palais présidentiel. Le chef de la junte y reçoit, depuis vendredi, de nombreux ambassadeurs et délégués des organisations internationales. Le général Ould Abdel Aziz s'est ainsi longuement entretenu hier avec le commissaire de l'Union africaine (UA) à la paix et à la sécurité, Ramtane Lamamra. «Nous venons promouvoir ce que j'appelle un sursaut de conscience des coeurs et des raisons, pour que les Mauritaniens dépassent la conjoncture difficile et se mettent ensemble pour préserver les acquis démocratiques, promouvoir l'Etat de droit et ouvrir des perspectives prometteuses», a dit M.Lamamra au sortir du bureau présidentiel. «La solution ne peut venir que des Mauritaniens eux-mêmes», a-t-il ajouté. L'UA avait annoncé vendredi soir qu'elle allait «suspendre» la Mauritanie de son organisation «jusqu'à ce que le pays retrouve un gouvernement constitutionnel». «La position de l'UA découle des textes fondamentaux de notre organisation», a rappelé M.Lamamra. «Il s'agit surtout d'éviter que la Mauritanie tombe dans un cercle vicieux, où la crise s'approfondirait et où la communauté internationale serait amenée à prendre des mesures aux conséquences fâcheuses sur le vécu et l'avenir du peuple mauritanien», a-t-il dit. Une «réunion de coordination» était ensuite prévue à Nouakchott entre la Ligue arabe, l'ONU et l'UA pour «aider la Mauritanie à sortir de la crise», selon le secrétaire adjoint de la Ligue arabe, Ahmed Ben Hilli. Samedi, le général Ould Abdel Aziz avait reçu le représentant spécial des Nations unies en Afrique de l'Ouest, Saïd Djinnit. Le contenu de leur conversation n'avait pas été dévoilé. «Les Nations unies se joignent à toutes les institutions qui appellent au retour à l'ordre constitutionnel» en Mauritanie, avait déclaré M.Djinnit après l'audience. Et c'est sur le ton du regret que l'émissaire de l'ONU a commenté le renversement du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi: «Nous aurions souhaité que les difficultés entre les institutions se résolvent dans le cadre de ces institutions». Le chef de la junte a justifié ces derniers jours son action en accusant le président d'avoir «agi pour détruire le pays et bloquer ses institutions». Ce général de 52 ans faisait déjà partie de la junte qui avait dirigé le pays de 2005 à 2007. Il avait activement soutenu la candidature de Sidi Ould Cheikh Abdallahi à la présidentielle de mars 2007. Une fois au pouvoir, le président lui avait confié sa propre sécurité, en tant que chef de la garde présidentielle. Mercredi matin, le chef de l'Etat a finalement voulu se soustraire à l'influence des généraux, en nommant de nouveaux officiers à la tête de la garde présidentielle, de l'état-major national et de la garde nationale. Le jour même, il a été renversé. «Nous sommes venus accidentellement au pouvoir, mais uniquement pour bien servir le pays», a affirmé le chef de la junte à la radio RFI. Le parti du président renversé, le Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD), a annoncé hier avoir été autorisé à rouvrir ses locaux, fermés par la police depuis le putsch. Cette formation fait partie du Front pour la défense de la démocratie, en «lutte» pour la libération du président, actuellement retenu dans une villa, la restauration de son régime et le «retour des militaires dans les casernes».