Pour cet économiste, au regard de la situation économique actuelle du pays, ce sont les importateurs qui sortiront gagnants de l'affaire. La polémique autour de la réévaluation du dinar enfle, ces derniers jours. Réévaluer la monnaie nationale, ou la laisser au stade actuel? Tel est le fond de la problématique. L'expert et consultant international, Abdelmalek Serraï, dit non. En économiste avisé, il estime, dans une déclaration à L'Expression, que «le moment n'est pas propice pour procéder à une quelconque réévaluation de la monnaie nationale». Notre interlocuteur ne va pas puiser ses arguments ailleurs que dans la situation actuelle de l'économie nationale. «Le pays est, tout d'abord, appelé à garantir sa santé économique» estime-t-il. Pour ce faire, «il est indispensable d'améliorer les performances industrielles, qui sont actuellement à moins de 1%». Il faut rappeler que l'économie algérienne est à plus de 97% tributaire de ses recettes engrangées par ses exportations en hydrocarbures. Lesquelles recettes ont battu les records, notamment avec la hausse, très sensible, des cours du pétrole qui ont dépassé, en juillet dernier, la barre des 147 dollars le baril. C'est grâce à cette conjoncture économique que les réserves de change en Algérie ont atteint 133 milliards de dollars, en fin juin 2008 et un excédent commercial estimé à 33 milliards de dollars en 2007. Aussi positifs que soient ces chiffres, il n'en reste pas moins que ce n'est pas pour autant qu'il faille procéder à la réévaluation du dinar. Car, «une décision pareille fragilisera davantage l'économie algérienne». En ce sens, les observateurs de l'évolution de l'économie algérienne ne cessent de rappeler le choc pétrolier de 1986, qui a entraîné la chute de 2/3 des recettes pétrolières algériennes. Et l'Algérie n'a certainement pas oublié le traumatisme provoqué par ce choc. D'autant qu'il était à la source d'une instabilité tous azimuts dont les répercussions sont apparentes jusqu'à aujourd'hui. Pour Abdelmalek Serraï, tout devra se baser sur une économie productive. «Il faut penser à avoir une industrie performante, une agriculture qui diminuera le taux des importations des différents produits agricoles, telles que le blé et le lait», estime-t-il. Ce dernier ne manque pas d'ajouter: «Il faut favoriser la production nationale, et encourager les efforts de l'investissement, tout en boostant les PME/PMI et les autres entreprises susceptibles de servir de levier pour asseoir une bonne économie productive.» Conditions en effet sine qua non pour augmenter les exportations hors hydrocarbures, et, par ricochet, diminuer le taux des importations. Un autre argument sur lequel se base notre interlocuteur et qui plaide contre la réévaluation du dinar, est le taux de liquidités qui circulent dans les circuits informels, estimé actuellement à 40%. Ce qui laisse entendre que des montants faramineux circulent hors circuit bancaire. Cette situation, on ne peut plus délicate, n'est pas sans donner un véritable coup de boutoir à l'économie algérienne. Par ailleurs, Abdelmalek Serraï pense que si l'on procède à la réévaluation de la monnaie nationale, tout en prenant en compte la situation actuelle de l'économie du pays, ce sont les importateurs qui sortiront gagnants de l'affaire. Explications: si la monnaie algérienne est revalorisée, le coût des marchandises importées des marchés internationaux sera revu à la baisse, ce qui va, sans coup férir, augmenter le taux des importations. Dans ce cas-là, ce sera le retour vers la case départ et la mise à mort annoncée de toute production nationale. Enfin, M.Serraï précise que l'administration devra laisser flotter le cours du dinar, tout en jouant son rôle de surveillant. Aussi, conseille-t-il d'éviter les décisions à caractère bureaucratique, susceptibles de porter un coup dur à l'économie algérienne.