L' épreuve est ouverte. Et si c'était une Algérienne qui l'emporterait? L'écrivaine Assia Djebar est de nouveau en lice pour le prestigieux prix Nobel de littérature, si on croit la chaîne télé Euro News. Elle est à côté, entre autres, du célèbre poète syrien Ali Ahmad Saïd, plus connu sous le pseudonyme d'Adonis. Faisant partie de l'Académie française depuis 2005, elle figure de nouveau parmi la liste des auteurs les plus lus et les plus admirés en France. Considérée comme la première écrivaine francophone arabe à obtenir cette reconnaissance, ce prix ne sera que mérité pour cette auteure qui a très tôt su défendre la cause des femmes, à travers une écriture saine, «nomade», celle d'une femme dont la vie aujourd'hui oscille entre la France et les Etats-Unis où elle est professeur de littérature française et francophone à l'université de New York. Cependant, ce n'est pas la première fois que notre auteur, native de Cherchell, prétend à ce prix honorifique de Nobel. Un sacre tant convoité par les écrivains car considéré comme une véritable consécration. Mieux encore, comme un véritable aboutissement pour une solide carrière. En effet, le prix Nobel, a fortiori celui de la littérature, couronne des oeuvres ou des découvertes majeures de l'histoire de l'humanité. Une façon d'honorer des écrivains talentueux, dont le nom traverse le temps et qu'il est bon, parfois, de redécouvrir. De son vrai nom Fatima-Zohra Imalayène, née à Cherchell le 30 juin 1936, Assia Djebar est une femme polyvalente ayant excellé dans divers domaines de l'écriture, à l'instar du roman, des nouvelles, de la poésie et de l'essai. Elle a écrit également pour le théâtre, et elle réalisa plusieurs films. Bien plus que cela, Assia Djebar est historienne, amoureuse de la langue française, qu'elle a fait sienne dans son écriture. C'est une femme qui se nourrit d'une double culture: «Ayant reçu mon éducation scolaire dans une institution francophone, j'ai étudié le grec et les langues latines, qui constituèrent dès lors une influence majeure dans mon évolution intellectuelle. Malgré cela, mon affect a toujours été directement lié au monde arabe, à ses traditions, tant sociales que culturelles. Je sais aujourd'hui qu'on peut écrire dans une langue étrangère, l'intégrer à notre imaginaire sans pour autant rompre avec ses racines», explique-t-elle. Femme de caractère, une battante, Assia Djebar passe son enfance à Mouzaïaville (Mitidja), étudie à l'école française puis dans une école coranique privée. À partir de 10 ans, elle étudie au Collège de Blida, en section classique (grec, latin, anglais) et obtint son baccalauréat en 1953, puis elle entre en hypokhâgne à Alger. En 1954, elle étudie dans un lycée parisien. L'année suivante, elle entre à l'Ecole normale supérieure de jeunes filles de Sèvres, où elle choisit l'étude de l'Histoire. À partir de 1956, en raison de la Guerre d'Algérie, Assia Djebar ne passe pas ses examens (grèves des étudiants algériens). En 1957, elle publie son premier roman, La Soif. L'année suivante, elle quitte l'école, épouse l'écrivain algérien Malek Alloula puis quitte la France. A partir de 1959, elle étudie et enseigne l'histoire moderne et contemporaine du Maghreb à la Faculté des lettres de Rabat. Le 1er juillet 1962, elle retourne en Algérie. Elle est professeur d'histoire à l'Université d'Alger, jusqu'en 1965, où l'enseignement de l'histoire et de la philosophie passe en langue arabe. De 1966 à 1974, elle réside le plus souvent en France (Paris), et séjourne régulièrement en Algérie. Elle épouse l'écrivain Walid Carn (pseudonyme d'Ould-Rouis Ahmed), avec lequel elle a écrit la pièce Rouge l'aube, puis se remarie avec Malek Alloula. De 1995 à 2001, elle est directrice du Centre d'études françaises et francophones de Louisiane aux Etats-Unis. En 1999, elle est élue membre de l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique. Depuis 2001, elle enseigne au département d'études françaises de l'Université de New York. Le 16 juin 2005, elle est élue au fauteuil 5 de l'Académie française, succédant à Georges Vedel, et y est reçue le 22 juin 2006. Les oeuvres d'Assia Djebar ont été traduites en 21 langues. Elle a à son actif plusieurs récompenses dont le Prix de la Critique internationale à la Biennale de Venise, pour La Nouba des Femmes du Mont Chenoua, le Prix Marguerite Yourcenar (Boston), le Prix de la paix des libraires et éditeurs allemands, en 2000, le prix Maurice Maeterlinck à Bruxelles, l'International Literary Neustadt Prize aux Etats-Unis, et le Prix international de Palmi en Italie. Elle est Docteur honoris causa de l'université d'Osnabrück en 2005. Assia Djebar est l'auteur d'une quinzaine de livres et de deux films, La Nouba des femmes du Mont Chenoua (1978) et La Zerda ou les chants de l'oubli (1982). La course au prix Nobel de littérature semble en tout cas très ouverte cette année, avec les éternels favoris comme le romancier américain Philip Roth et l'écrivain japonais Haruki Murakami. La littérature américaine fait toujours pâle figure devant la littérature européenne. Et si c'était une Algérienne qui l'emporterait?