Des vieux et des vieilles, des femmes et des enfants et même un bébé de 15 mois ont fait les frais de l'irresponsabilité de ces agences. L'arnaque, l'escroquerie et le bluff sont devenus la devise des agences de voyage algériennes. Sans aucun état d'âme, ni sentiment humain, des dizaines d'Algériens qui se sont rendus pour effectuer la Omra, par le biais des agences de voyage, ont été non seulement arnaqués, mais carrément abandonnés entre Djeddah et Istanbul. Vendredi 10 octobre à 10h, à l'aéroport Ataturk à Istanbul, une dizaine d'Algériennes et d'Algériens de retour de La Mecque sont bloqués à l'intérieur de l'aéroport, faute de réservation. Leurs billets d'embarquement ne sont pas enregistrés sur le système de la compagnie aérienne. L'agence leur a remis des «billets non enregistrés», c'est-à-dire de faux billets de réservation. D'autres sont inscrits en liste d'attente. Ils n'ont pas la confirmation. Résultat: ils passent des heures, des journées et des nuits à dormir sur les bancs de fer à l'intérieur de l'aéroport. Mme Fatima, 72 ans, originaire de Sétif, accompagnée d'une autre femme, Mme Azzouzi, originaire de Blida, la soixantaine et d'un vieillard dont l'âge dépasse 70 ans, originaire de Tipaza, étaient les premiers Algériens repérés à «transit desk». Ils ne savent plus à qui se plaindre. Pas de place dans le vol du vendredi, ni celui du samedi, ni du dimanche. Ils sont toujours en liste d'attente. On a beau essayé de résoudre leur problème, mais les agents de Turkish Airlines ne veulent rien entendre. Il faut attendre plus de 72 heures pour espérer trouver une place. Qui dit 72 heures, dit automatiquement 3 jours de faim, de froid et de souffrance. Les hadji ont faim. Pas de bouffe. Ils ne trouvent que les petites gouttes de l'eau Zem Zem ramenée de La Mecque pour se désaltérer. Sans dinars, sans euros, ni dollars. Ils ne savent ni lire, ni écrire et encore moins communiquer et s'entendre avec les Turcs. L'agence n'a désigné aucun guide pour les assister. Après une discussion avec les familles des passagers que nous avons pu joindre de la Turquie, il s'est avéré que leur voyage a été organisé par une agence qui n'est pas agréée pour ce genre de voyage. Celle-ci a dû négocier avec une autre agréée, en faisant de la sous-traitance. C'est difficile de trouver ces voyagistes. «Les hadjis» portaient de petites pochettes en tissu noir, où il est inscrit en jaune le nom et l'adresse du siège des guides chargés d'assister leurs clients. Il s'agit de l'agence Ennadjah de la wilaya de Bouira. Nous avons essayé, vainement, de les joindre pour avoir plus d'informations. Les membres de la famille de Mme Azzouzi dévoilent que leur maman était inscrite auprès d'un sous-traitant à Blida. Un représentant de ce bureau du tourisme confirme qu'il a fait de la sous-traitance avec les responsables d'Ennadjah à Bouira. La vieille dame, de Sétif, a effectué le voyage organisé par le biais d'une autre agence réputée à Bordj Bou Arréridj qui aurait négocié à son tour avec les responsables bouiris. Le cas de ce premier groupe est identique à celui d'une jeune maman qui portait dans ses bras un bébé de 15 mois. Originaire de l'ouest du pays, elle avait en plus du handicap de la langue, sa bourse bien vide. Pas d'assistance ni pour elle ni pour son enfant. Au fil du temps, le nombre d'Algériens en provenance de La Mecque, bloqués et abandonnés à l'aéroport, augmente. Cinq autres viennent nous raconter leur problème dans le souci de leur apporter une aide. Après plusieurs contacts, notamment d'Alger, le problème est exposé au consul d'Algérie à Istanbul, qui a promis de prendre en charge les différents cas. En collaboration avec la compagnie nationale Air Algérie, il a réussi à prendre en charge quelques cas, le samedi matin. A 00h20, les agents d'Air Algérie sont arrivés à l'aéroport. Comme promis, les deux femmes âgées et le vieil homme ont été embarqués effectivement, tandis que la maman et le bébé étaient obligés d'attendre le prochain vol. Jusqu'à hier, quelques jeunes n'étaient pas encore embarqués et les agences concernées ne se sont même pas inquiétées. Suite à cette situation, quelques questions méritent d'être posées. Qui contrôle le travail de ces agences? Quel est le rôle de l'Office national créé au niveau du ministère pour ce genre de voyage? Qui accorde les agréments? Pour qui? Suivant quels paramètres? Quel sont les critères exigés pour en bénéficier? Quels sont les résultats des nombreuses réunions tenues au niveau du ministère des Affaires religieuses avec quelques agences? Où sont les promesses du ministre Ghlamallah qui a juré de nettoyer les écuries d'Augias? Ce sont autant de questions qui se posent et qui restent, malheureusement, posées, et sans réponse.