Mugabe et les chefs de l'opposition, Tsvangirai et Mutambara, ont repris hier les pourparlers entamés en début de semaine. Le président zimbabwéen, Robert Mugabe, et son rival Morgan Tsvangirai poursuivaient, hier, leurs difficiles négociations sur un futur gouvernement d'union, qui piétinent depuis trois jours sur fond de tensions renouvelées entre les deux camps. Le chef de l'Etat a espéré jeudi soir en quittant la troisième séance de discussions «conclure un accord» vendredi (hier), mais l'opposition a évoqué «une impasse». Face au risque d'échec, Washington, «peu optimiste», a menacé hier de durcir ses sanctions contre le régime de Harare. La presse d'Etat ne se montrait guère plus positive. «Les discussions sur le gouvernement se heurtent à un mur de briques», écrivait le quotidien d'Etat The Herald. Et, troquant le ton conciliateur adopté la veille, le journal s'en est pris violemment au parti de Morgan Tsvangirai: le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) «négocie avec mauvaise foi» et tente de «rouvrir tous les sujets sur lesquels il y a déjà eu un accord», a-t-il accusé. «Nous n'avons pas changé de position, nous sommes cohérents dans nos demandes», a réagi le porte-parole du MDC, Nelson Chamisa. «Notre position a toujours été d'obtenir une répartition équitable des ministères.» MM.Mugabe et Tsvangirai ont signé le 15 septembre un accord de partage du pouvoir, prévoyant que le premier reste chef de l'Etat et le second devienne Premier ministre. Mais ils n'ont jamais réussi à s'entendre sur la composition de leur gouvernement et le président a fini par attribuer samedi les principaux portefeuilles à son parti, provoquant la colère du MDC. Pour tenter de sauver l'accord, des négociations se sont engagées, mardi, sous l'égide de l'ex-président sud-africain Thabo Mbeki. Elles n'ont pour l'instant pas abouti et ont repris hier en milieu de journée. Si elles échouent, les Etats-Unis pourraient imposer de nouvelles sanctions contre le régime, a mis en garde, hier, Jendayi Frazer, secrétaire d'Etat adjointe américaine aux Affaires africaines. «Si ça ne marche pas, alors nous allons continuer à mettre la pression sur le gouvernement. Nous examinerons de nouvelles sanctions contre le président Mugabe et son régime», a-t-elle dit lors d'une visite à Tokyo. Lundi, l'Union européenne avait également menacé de nouvelles sanctions le président Mugabe, 84 ans et au pouvoir depuis 28 ans, en cas d'échec des discussions. L'Occident a adopté des sanctions contre un nombre limité de membres du régime après la réélection controversée du président Mugabe en 2002. Cette décision avait rendu furieux le chef de l'Etat, qui accuse régulièrement l'ancienne puissance coloniale britannique de vouloir recoloniser le pays en se servant du MDC. Reprenant cette rhétorique, The Herald a également accusé, hier, Morgan Tsvangirai d'être soumis à «des pressions des Etats-Unis et de l'Angleterre pour créer délibérément un blocage de manière à dessaisir Thabo Mbeki de la médiation et la confier à l'Union africaine et aux Nations unies.» De son côté, fort de sa nouvelle majorité à la Chambre des députés, le MDC a selon The Herald introduit jeudi deux motions au Parlement, l'une pour demander une enquête sur les violences ayant suivi les élections du 29 mars, l'autre sur des accusations d'instrumentalisation par le régime de l'aide alimentaire. «Nous pensons que ces motions n'aident pas à créer un environnement politique de coopération», a réagi le chef du groupe du parti présidentiel, Joram Gumbo, cité par le quotidien. La formation d'un gouvernement d'union est attendue avec impatience au Zimbabwe, où l'économie est en ruine avec une hyperinflation de 231 millions de pour cent et 80% de chômage, dans l'espoir qu'il permette le retour de l'aide internationale.