Le président du MDS seul leader politique refusant ostensiblement d'évoluer dans ses positions, estime, en filigrane, qu'il n'y a point de salut en dehors de son parti. Le président du MDS était l'invité de notre rédaction dans le cadre de la rubrique «A coeur ouvert avec L'Expression». Développant son discours habituel, il commencera par se livrer à un procès en règle contre le pouvoir, accusé d'être «l'allié des intégristes islamistes», mais aussi d'être «corrompu, mafieux et inhibiteur des meilleures potentialités et compétences du pays». Il refusera, malgré notre insistance, de se livrer à sa propre autocritique avec douze longues années de politique de la chaise vide qui ont fini par éclipser littéralement son mouvement de la scène politique à l'exception de ses interventions régulières dans les colonnes de la presse. El-Hachemi Chérif, seul représentant du camp dit démocrate républicain à continuer à brandir le spectre islamiste et à parler de soutien de son mouvement à un minimum d'Etat, n'en démord pas pour autant en réfutant tout parallèle avec l'incident qui a eu lieu lors de la présidentielle française. Il n'en admet pas moins que «le Front national constitue une menace pour la République au même titre que les islamistes». Pressé de questions sur la différence pouvant exister entre ces deux modèles, El-Hachemi Chérif dira que «le FN est un parti légal», omettant, volontairement sans doute, de souligner que les partis islamistes ou supposés l'être en Algérie sont, eux aussi, légaux et n'ont plus le droit d'instrumentaliser la religion à des fins partisanes depuis l'adoption par le peuple de la Constitution de 96 et son acceptation par l'ensemble des représentants et leaders de la classe politique algérienne. Il faut croire, en outre, que douze longues années de vie en réclusion semblent avoir fini par aigrir le leader du MDS comme en témoigne son plan de sortie de crise. Il semble, en effet, le seul représentant de la mouvance dite démocrate républicaine à penser que «le péril islamiste intégriste menace l'Algérie, aujourd'hui plus que jamais à cause, explique-t-il, de notre école qui forme des intégristes en puissance au point que les partis islamistes n'ont qu'à se pointer à la sortie des écoles pour faire le plein de militants et de sympathisants». Pour le MDS, donc, «une nouvelle phase de transition est indispensable si l'on ne veut pas que l'Algérie sombre très bientôt dans le chaos». Même s'il attaque avec véhémence les thèses du FFS, et même celles de certains de ses alliés, El-Hachemi Chérif ne croit pas que cette phase nouvelle de transition puisse servir à motiver une ingérence étrangère, peut-être même musclée, dans toutes les affaires internes de notre pays. Le MDS, dont le poids sur le terrain est jugé insignifiant par un grand nombre d'observateurs, n'en pense pas moins que «cette phase de transition devra servir à préparer le passage vers une véritable démocratie en procédant à la dissolution des partis islamistes et du FLN». Interrogé sur le poids de ces partis, avec leurs centaines de députés, El-Hachemi Chérif dira que «le peuple n'aura qu'à s'y adapter». Et si les électeurs de ces mouvements, somme toute largement majoritaires dans la société algérienne, viennent à boycotter les urnes, El-Hachemi Chérif n'en pensera pas moins la même chose en disant que «le retrait des électeurs de ces formations des urnes n'en sera que plus bénéfique à la République». Ces thèses, en somme, montrent que le mouvement que dirige El-Hachemi Chérif se propose de prendre le pouvoir et d'imposer sa vision des choses à tout le pays sans passer par la voie démocratique des urnes. Cette vision, est-il besoin de le rappeler, rejoint largement les nombreux appels au putsch armé contre le Président lancés depuis peu par certains représentants de la prétendue mouvance dite démocratique républicaine. Mieux encore, la thèse du président du MDS rejoint presque trait pour trait un certain document secret rendu public il y a de cela une année par le journal français Libération et attribué à un certain général connu pour ses thèses particulièrement éradicatrices. Interrogé à ce sujet, El-Hachemi Chérif dira ne pas avoir pris connaissance de ce document. Il n'en ajoutera pas moins qu'il «ne sait pas quel sera le chef d'orchestre (et il y en a forcément un) chargé de diriger cette phase de transition», se contentant juste de déclarer que «les propositions du MDS ont été soumises au peuple et lui seul pourra ou non les accepter et les mener à bien». Sachant que le peuple est dans son écrasante majorité d'essence nationaliste et musulmane, il ne fait aucun doute que la sortie du MDS se place en porte-à-faux de la démocratie. A moins que ce mouvement ne compte sur des soutiens puissants mais minoritaires, c'est-à-dire des chefs d'orchestre prêts à imposer leur vision des choses au peuple entier.