La flambée des prix est causée par la spéculation. Nombreux sont les éleveurs et maquignons occasionnels qui ont squatté les marchés en perspective d'affaires juteuses. Le prix de l'agneau vivant a pris son envol au marché à bestiaux de Bordj Bou Arréridj, ces trois dernières semaines, pour atteindre probablement des cimes inaccessibles aux bourses des familles au faible revenu, au moment des fêtes de l'Aïd El Adha. Les éternelles causes évoquées sont la rareté de l'aliment du bétail et ses prix exorbitants, affirme-t-on, au marché noir, bien que la nature a rendu les pacages disponibles après les fortes pluies d'octobre. Aussi, prétexter la cherté de l'aliment du bétail est un argument fallacieux. Cette flambée des prix trouve sa cause dans la spéculation. Mais qui sont-ils ces éleveurs et maquignons occasionnels? C'est monsieur Tout-le-monde. L'investisseur, l'entrepreneur, l'enseignant, le boucher, le restaurateur ou toute personne disposant de liquidités et nourrie du désir d'arrondir sa bourse. L'astuce est simple. Il suffit de s'associer avec un fellah pour l'achat d'un troupeau, surtout d'agneaux, de les engraisser naturellement grâce à dame nature ou à l'aliment du bétail (son et orge) et le jour de l'Aïd, «par ici la monnaie». «Les prix du son et de l'orge ont atteint des sommets au marché noir, soit 1600 DA le quintal pour le premier et 3000 dinars le quintal pour le second, ces derniers jours, malgré que la Ccls a mis des quantités considérables sur le marché, à raison de 1550 DA le quintal pour l'orge», avons nous constaté au marché à bestiaux local. Toutefois, «la disponibilité de l'herbe au niveau des pâturages a mis en confiance les éleveurs, lesquels ont pu garder leur troupeau d'ovins qu'ils auraient été contraints, autrement, de liquider. Un tel abattage aurait ainsi impliqué une hausse du prix de la viande ovine chez les bouchers», explique-t-on au niveau du marché à bestiaux de Bordj Bou Arréridj. En clair, le citoyen payera cher son ovin à immoler dans un mois, bien que l'éleveur jouit actuellement d'une situation confortable à tous les niveaux de l'alimentation de ses troupeaux. Actuellement, la Coopérative des céréales et des légumes secs (Ccls), met à la disposition des fellahs, des quantités importantes d'orge importé. Outre cet apport en aliment du bétail, fourni par les Ccls, il faut noter que tous les pâturages de la wilaya regorgent d'herbe, ce qui dispense les éleveurs d'engraisser leur bétail dans les bergeries. Aussi, l'explication de la rareté des aliments du bétail n'est pas justifiée, explique-t-on au niveau de l'Union locale des paysans algériens. «La wilaya jouit de pacages importants, la Ccls distribue de l'orge et pourtant l'on n'arrive pas à comprendre cette soudaine flambée des prix de l'agneau vivant, depuis un mois environ, alors que le nombre d'ovins dépasse largement les 500.000 têtes, sans compter les troupeaux qui proviennent des wilayas limitrophes», explique M.Tabti Hamlaoui, le nouveau secrétaire général de l'Union des paysans algériens de la wilaya de Bordj Bou Arréridj, qui note que «la seule explication valable est l'intervention des maquignons occasionnels à l'approche des fêtes de l'Aïd sur les marchés à bestiaux et sur celui de l'alimentation du bétail». Selon la même source, il est impossible de lutter contre cette spéculation autour de l'agneau vivant, actuellement, puisque en plus des maquignons qui s'associent aux éleveurs d'ovins en leur garantissant, à coup de centaines de millions de centimes, des réserves d'orge et de son jusqu'aux fêtes de l'Aïd, les maquignons occasionnels, composés de bouchers, de restaurateurs, d'entrepreneurs et de toute personne ayant des liquidités, font pression sur le prix de l'agneau et sur la disponibilité de l'alimentation du bétail. Selon le secrétaire de l'Union locale des paysans algériens, même les fellahs ont loué, depuis la fin de l'été, des parcelles de terrains aux éleveurs venus d'autres régions, notamment de M'sila, Sétif et Bouira. Ainsi, M.Tabti confirme que l'éleveur, en ce moment, jouit d'une période faste, gâté d'abord par la nature à cause des chutes de pluie abondantes et, bien sûr, de l'aide des pouvoirs publics par le biais de la Ccls. Plusieurs éleveurs, rencontrés au niveau du siège de l'Union des paysans, sont unanimes à reconnaître «qu'ils n'ont pas besoin de liquider leur troupeau d'ovins pour alimenter les boucheries. Les agneaux seront engraissés naturellement par les pâturages verdoyants pour les fêtes de l'Aïd». Ils confirment aussi que «l'agneau vivant de 20 kg ne dépassant pas les 7000 DA voici deux mois, alors qu'aujourd'hui, son prix est affiché à 15.000 DA sur tous les marchés de la wilaya et aussi ceux de M'sila et Sétif». En clair, le citoyen payera probablement l'agneau de 20 kg à 20.000 DA à l'approche de la fête de l'Aïd. L'on aura remarqué que le prix de la viande ovine dans la wilaya de Bordj Bou Arréridj est toujours contrôlé par des personnes en dehors du circuit normal de l'élevage pour arriver à l'étalage des bouchers. «Le marché de la viande ou l'élevage ovin, en général, est incontrôlable, trop de paramètres interviennent, et même si la nature fournit à souhait les pacages, en plus de l'intervention des pouvoirs publics, l'agneau de l'Aïd trouvera encore une fois, sur son chemin, des spéculateurs prêts à faire des bénéfices et à se sucrer sur le dos de l'éleveur et du citoyen», a indiqué le secrétaire de wilaya de l'Union des paysans algériens. Actuellement, il faut bien le noter, le prix de la viande ovine est affiché à 700 DA le kg pour l'agneau et 550 DA le kg pour l'agneau femelle. Certains maquignons associés à des personnes étrangères à l'élevage, connus d'ailleurs dans toute la région des Biban, ont déjà acheminé des milliers de têtes de Djelfa, Biskra, Laghouat, et ont commencé l'engraissement dans les bergeries, les hangars et même dans des garages loués auprès des fermes des communes des Biban. En clair, les spéculateurs s'organisent en ce moment pour la grande saignée des bourses familiales.