Le fondateur de la revue Les Cahiers de l'Orient a confié venir souvent en Algérie, terre, selon lui, du nationalisme arabe. C'est en tant que journaliste, pourvu d'un «esprit libre» avant tout et pas du tout «diplomate», encore moins «politicien» que ce spécialiste des affaires du Proche et Moyen-Orient est allé à la rencontre de ses confrères et consoeurs algériens, hier, à la faveur d'une conférence de presse, animée au Centre culturel français, sur initiative des éditions Sédia. Avant d'aborder les questions brûlantes qui secouent le monde, Antoine Sfeir a tenu à célébrer, d'emblée, le métier de journaliste qui lui a donné «la passion et le savoir». Il dira avoir l'impression de ne pas sortir encore de l'adolescence eu égard à la quantité de savoir qu'il continue «à ingurgiter et à transmettre». Il rendra hommage, par ailleurs, aux journalistes algériens dans une terre qui rappelle son pays, le Liban mais en plus grand. L'Algérie dira-t-il, où le mot «nationalisme arabe» prend tout son sens et où son livre sorti, en mars dernier, chez Sédia, Pour un Orient compliqué, a reçu un bon accueil. «Vous avez une liberté de ton que beaucoup de Français pourraient vous envier.» Et de dire à propos de l'Algérie: «L'Algérie est un grand pays. Elle est perçue avec sa grande armée, un pays riche, qui a des ressources en hydrocarbures. C'est un pays qui nourrit en gaz les pays européens. L'Algérie devient de ce fait un pays "axe" pour les USA, dans sa stratégie globale dans le Maghreb, et non pas le Maroc comme d'aucuns pensent.» Evoquant son livre où il tente de décortiquer les enjeux politiques et géostratégiques qui ont longtemps lié le monde arabe à l'Occident, Antoine Sfeir évoquera la guerre contre les intérêts qui lient les pays du Moyen-Orient. Il regrettera la destruction imminente de tous ses rêves, par le rapprochement inévitable selon lui entre les USA et l'Iran. car ces derniers, les Perses, estime-t-il, «n'ont pas un amour réel pour les Arabes. Ils ont peur aussi d'eux, du Pakistan et de l'Afghanistan notamment. Le dossier nucléaire est un outil de négociation». Evoquant le conflit israélo-palestinien, Antoine Sfeir fera remarquer tout de go: «Nous payons ce qui est arrivé en 1955. La diabolisation de Nasser, quand l'Occident a préféré faire alliance avec l'Arabie Saoudite qui a une lecture archaïque et rétrograde de l'Islam.» S'agissant de la Syrie, Antoine Sfeir, soulignera le fait que Bachar El Assad soit aimé par son peuple, ce qui est important, contrairement à son père. «D'autre part, Bachar El Assad est détesté par l'Occident. A partir du moment où les Syriens sont rassérénés, ils n'ont plus à se mêler des affaires libanaises. Or, les Libanais ont un défaut, ils croient avoir chassé la Syrie et veulent renverser le régime.» Evoquant l'actuel président américain Barack Obama, le fondateur de la revue Les Cahiers de l'Orient, qui réfute sa béatification, dit l'attendre maintenant au tournant sur du concret avant de juger. Particulièrement sur des dossiers comme l'Irak, les problèmes qui minent le Proche-Orient a fortiori, dira-t-il: «On a réussi à détruire le vivre ensemble» dans le monde, mais aussi le dossier israélo-palestinien, sans oublier le rééquilibrage des relations entre les Arabes en se rendant compte, relèvera-t-il que «l'éclatement des Etats-nations n'est pas la solution». S'agissant de la paix en Palestine, Antoine Sfeir dira que les choses sont claires: «A chaque fois qu'on avait un semblant d'accord qui ressemble à un compromis, il y a toujours des extrêmes d'un côté comme de l'autre qui font que cet accord capote!» Enfin, abordant le domaine de la religion, Antoine Sfeir qui compte aussi à son actif plusieurs essais dont, à juste titre, Israël survivra-t-il et Brève histoire de l' Islam à l'usage de tous, attirera notre attention sur l'amalgame souvent fait entre Islam, islamisme et le mot jihad que d'aucuns lient à la politique. «Le jihadiste renvoie aux efforts déployés par un individu pour être un bon musulman, en aucun cas, on ne doit lui accoler le terme islamiste. C'est un terme créé par l'Occident et pris dans une autre acception, reliée à la guerre.» Pour plus d'informations, sachez qu'Antoine Sfeir répondra à vos questions cet après-midi où il récidivera lors d'une conférence-débat qu'il donnera à 14h30, au CCF avant de signer ses livres à 17h, à la libraire du Tiers-Monde. Avis aux amateurs.