Il a réussi la prouesse médiatique de faire la promotion de son livre bien avant sa sortie. Que veut-il, que vise-t-il? Quels sont les mystères de cette sortie largement relayée par les quotidiens de la presse nationale après un si long silence d'un homme connu pour ne pas avoir la faconde facile? Il n' y avait pas que la presse indépendante qui a fait écho des propos de l'ancien président. Même la Télévision nationale s'est crue obligée de souligner sa présence sans pour autant lui accorder plus d'intérêt. Le timing de cette sortie médiatique est trop flagrant dans un contexte politique particulier. Cette sortie n'est-elle pas à relier avec les rumeurs qui circulent au niveau de la capitale, faisant état d'une probable candidature à la présidentielle d'avril prochain, de l'ancien président Liamine Zeroual? Les propos tenus par l'ancien président Chadli sont en réalité à recadrer dans un contexte non d'ambition politique, sa carrière étant derrière lui, mais d'ordre purement éditorial. L'on a appris, en effet, qu'il est en train de mettre les dernières retouches à ses «Mémoires» relatant «les péripéties» des 12 années qu'il avait passées à la tête de la présidence de la République. La sortie de Chadli n'est, selon les observateurs avertis de la scène politique algérienne, qu'un effet d'annonce pour son ouvrage auquel il espère voir le public réserver un très large succès. Une «oeuvre» ou un essai politique que certains n'hésitent pas à ériger en promesse de best-seller. Pour cette tâche historique, Chadli a recours à ce que tous les hommes politiques dans le monde font quand ils «écrivent». Se faire assister, ni plus ni moins, par des «nègres». A savoir les scribes, ces collaborateurs qui ont la fibre de l'écriture et dont nous préférons taire les noms. C'est l'une des rares fois où il s'exprime depuis son départ de la tête de l'Etat en 1992. Il a choisi d'observer un mutisme total aussi bien sur la vie politique nationale et ses aléas que sur les véritables conditions qui l'ont conduit à abandonner le pouvoir à un moment très particulier de l'histoire de l'Algérie indépendante. C'était le moment où le FIS dissous, qu'il avait agréé, avait gagné les élections législatives et était à deux doigts d'installer un Etat islamique. Un quotidien national arabophone a même titré: «Je jure par Dieu que je dévoilerai toutes les vérités.» Quels secrets donc va-t-il dévoiler 12 ans après avoir quitté le pouvoir? Profitant du Colloque national sur Amara Bouglez, fondateur de la Base de l'Est, qui s'est déroulé jeudi dernier au centre universitaire d'El Tarf, l'ancien président de la République de 1979 à 1992, Chadli Bendjedid, a retrouvé sa «verve» d'orateur et s'en est donné à coeur joie pendant plus de deux heures pour sortir d'un long mutisme. Il affirme avoir compris, à la veille d'Octobre 1988, que «le régime était arrivé à sa fin». Aussi fallait-il se défaire de la «légitimité historique» et remettre le pays entre les mains de jeunes. Il dit qu'il préférait un régime parlementaire et tout le reste. Mais la question qui taraude les esprits est de savoir pourquoi l'ancien président a choisi de parler maintenant et à partir d'El Tarf au milieu de ses anciens compagnons d'armes? Il faut reconnaître que Chadli Bendjedid a réussi la prouesse médiatique de faire la promotion de son livre.