En validant intégralement les résultats, le Conseil constitutionnel a peut-être condamné à mort la future APN. Pour curieux que cela puisse paraître, le premier à réagir aux décisions du Conseil constitutionnel aura été ce même Conseil constitutionnel. Son président, par le biais de certains médias publics, a tenté d'expliquer les raisons qui l'ont motivé à valider les scores insignifiants enregistrés à Tizi Ouzou et Béjaïa. Selon Mohamed Béjaoui, «les attributions constitutionnelles de l'institution (qu'il préside) lui interdisent toute interprétation politique des textes qui lui sont soumis». Cela est, en effet, vrai. Il n'en est pas moins vrai que des textes tels que la concorde civile et la grâce amnistiante, contredisant des articles très clairs de cette même Constitution, n'en avaient pas moins été validés par ce même Conseil pour des raisons que nous supposons politiques, d'intérêt national, cherchant avant tout l'apaisement et l'intérêt suprême de la nation. Il n'échappe pas non plus aux juristes avisés que les cas de jurisprudence auraient pu dicter à ce Conseil de suivre, une nouvelle fois, une voie moins conventionnelle pour le bien du pays et de tous. L'explication de Béjaoui, venue atténuer la déception qui a gagné pas mal d'Algériennes et d'Algériens, annonce aussi, selon des observateurs avertis, «une possible annulation de ce scrutin». En mettant la balle dans le camp du pouvoir politique, Béjaoui accorde une sorte de quitus à l'éventualité d'une pareille décision. Du côté des partis politiques, le ton est toujours à l'expectative. Beaucoup, en off, s'accordent à dire qu'ils s'attendaient au moins à ce que les résultats en Kabylie soient invalidés. «La situation était particulièrement explosive en Kabylie. Le pire a été évité. Ce même pire est désormais remis au goût du jour depuis que moins de 2% des électeurs à Tizi Ouzou et Béjaïa représenteront ces deux wilayas selon les décisions sans appel du Conseil constitutionnel». Si des partis paraissent sincères dans ces inquiétudes, d'autres, comme le RND et le MSP, cherchent surtout à créer une sorte de pierre d'achoppement plus ou moins légitime afin de trouver un refuge à leur cuisante défaite. Ils cherchent aussi à sauver les meubles en appelant à des votes partiels desquels seraient encore absents le FFS et le RCD. Le RND, apprend-on, compte introduire un nombre important de recours sans grand espoir, nous dit-on encore, d'obtenir de réponses probantes. Le PT, lui, vient de déposer, apprend-on, «sept recours parfaitement fondés pouvant lui procurer sept nouveaux sièges». Le porte-parole du PT, Mme Louisa Hanoune, compte animer une conférence de presse aujourd'hui. Seul le FLN, en somme, continue à ramer à contre-courant en maintenant, jusqu'à hier matin, que tout est pour le mieux et que «le Conseil constitutionnel est souverain dans ses décisions». Le FFS, seul parti à réagir officiellement, n'a guère été tendre dans un communiqué transmis hier à notre rédaction. D'entrée, donc, le Conseil constitutionnel est accusé d'être une «façade institutionnelle du pouvoir militaro-financier». Cela, afin d'expliquer que «le peuple n'avait rien de bon à attendre de M.Béjaoui (...) ancien président de la Cnisep, qui a validé une fraude généralisée» en 99. Dans son communiqué, le FFS révèle que le taux de participation, déjà très faible, n'aurait pas dépassé les 20%. Et de relever qu'«il est des traditions du pouvoir algérien de transformer ses échecs en victoire». Le communiqué conclut pour dire qu'il sera, une nouvelle fois, «imposé aux Algériens des députés (...) qui participeront à la mangeoire et à la rapine alors que le peuple continue de vivre dans la misère, l'injustice et l'insécurité». Pour rappel, il faudra attendre encore six jours avant que les résultats définitifs, après étude des recours, ne soient connus et que la future APN ne soit installée. Nous croyons savoir, en outre, que la composition du futur gouvernement ne serait rendue publique qu'une fois effectuées toutes ces démarches.