Banderoles, drapeaux palestinien et algérien, keffiehs, posters de dirigeants de la résistance palestinienne faisaient partie du décor nécessaire pour marquer l'événement. L'agression de l'armée israélienne contre la bande de Ghaza a permis à Alger de transgresser l'interdiction des marches. Le coeur de la capitale algérienne a battu hier pour la terre de Palestine agressée, martyrisée. A l'instar des autres capitales arabes, des dizaines de milliers d'Algérois sont sortis hier dans les rues pour manifester contre l'agression israélienne à Ghaza. Les manifestants ont battu le pavé aux cris de «Allah Akbar, ouvrez-nous les portes pour aller combattre à Ghaza». Rien de spontané dans tout cela. En effet, on avait l'impression que tout était organisé pour qu'Alger manifeste sa colère en solidarité avec les frères palestiniens. Banderoles, drapeaux palestinien et algérien, keffiehs, posters de dirigeants de la résistance palestinienne, le décor était planté pour marquer les événements dramatiques de Ghaza et la tragédie vécue par les Palestiniens depuis le 27 décembre. Il était environ 13h45 lorsque les fidèles sortaient de la mosquée Khaled Ibn El-Walid située dans le quartier de Belcourt, après la prière du vendredi. Des groupes de manifestants commençaient, alors, à se former. Quelques minutes plus tard, les rues de ce quartier d'Alger devenaient noires de monde. Jeunes, adolescents, vieux, toutes classes d'âge confondues se sont retrouvées pour une seule et même cause: la Palestine. Empêchés de marcher un certain moment par les forces de l'ordre, les manifestants ont réussi à rompre, à plusieurs reprises, le cordon de sécurité mis en place pour prévenir tout débordement. Hormis quelques slogans hostiles aux pays arabes qui entretiennent des relations diplomatiques avec Israël, à l'instar du président égyptien Hosni Moubarak, les manifestants ont fait preuve d'une maturité qui a surpris plus d'un observateur. Aucun dégât majeur n'a été signalé. Dans leur progression, les manifestants ont pacifiquement investi la place du 1er-Mai: haut-lieu des regroupements. Soutenus par les youyous des femmes algéroises qui fusaient du haut des balcons, l'ambiance fut surchauffée. «Avec notre âme et notre sang, nous mourrons pour toi Ghaza.» Certains étaient au bord de la crise de nerfs, alors que d'autres, des jeunes femmes en particulier, ne pouvaient retenir leurs larmes. La foule devenait de plus en plus dense. Combien étaient-ils? 10.000, 20.000, 30.000...Une chose est, néanmoins, sûre, les grandes artères de la capitale, à l'instar de la rue Hassiba Ben Bouali, du boulevard Amirouche, de la rue Didouche, du boulevard Abane Ramdane, n'ont pas connu une telle affluence depuis de nombreuses années. Les Algérois ont réappris à battre le pavé. D'autres groupes de manifestants venus des quartiers populaires de Bab El Oued ont fait jonction avec le cortège qui s'est ébranlé de Belcourt. A l'unisson et à se rompre les cordes vocales, cette foule soudain unie, scandait: «A mort Israël, à bas Bush.» L'Etat hébreu et le président des Etats-Unis ont été tous deux vilipendés, c'est pour dire si les manifestants ont bien maîtrisé les tenants et les aboutissants de la sauvage agression israélienne. Il est à signaler, cependant, que certains manifestants ont tenté de faire des massacres des Palestiniens de la bande de Ghaza, une récupération politique. Il s'agit bien évidemment de sympathisants islamistes qui tentent de revenir sur le devant de la scène politique nationale à travers la tragédie palestinienne. Autrement dit, ces derniers ont réussi à manipuler les manifestants en les poussant à proférer des slogans hostiles au pouvoir. «Etat islamique, Allayha nahia oua Allayha namoute», on se croirait, un court moment, revenus au début des années de braise. Des images de triste mémoire pour le moins inattendues de cette manifestation de solidarité avec le peuple palestinien martyrisé.