Rachid Kram n'est vraiment pas un inconnu au sein de la famille de l'athlétisme algérien. Il a été, à son époque, un très grand athlète, recordman d'Algérie du 1500m avant qu'un certain Noureddine Morceli l'en dépossède. Il donne ici son avis sur la tenue de la dernière assemblée générale ordinaire de la Fédération algérienne d'athlétisme. Privé de parole, car n'ayant pu obtenir la qualité de membre lors des assemblées générales ordinaire et élective de la Fédération algérienne d'athlétisme, je livre ici une partie de mes interrogations restées malheureusement sans réponse. En premier lieu, je commente la forme et l'objet de l'assemblée ordinaire de fin de mandat. En théorie, le bureau exécutif sortant, présente non seulement un bilan de la saison écoulée, mais également un bilan du mandat entier. Comment alors évaluer l'action du bureau en l'absence de ce document et d'un autre document non moins important qu'est le plan d'action. Car les membres de l'assemblée, dans leur infinie souveraineté, se rassemblent pour l'évaluation par le parallèle entre ce qui a été prévu de faire en début de mandat (le plan d'action) et ce qui a été réalisé durant le mandat (le bilan moral). La mesure de l'écart entre le prévu et le réalisé est l'objet même de l'assemblée ordinaire. Le bilan financier, quant à lui, renseigne sur le coût de l'action du bureau exécutif. Or, ce jour-là, point de bilan de fin mandat ni même de plan d'action. Comment alors est-il possible d'évaluer en l'absence de ces documents de référence? Hormis quelques interventions très évasives, l'écrasante majorité des intervenants n'a pas abordé le bilan proprement dit. On a saisi l'occasion pour transformer l'assemblée en tribune pour parler du trou sur la piste de tel stade, des arriérés de frais de mission, de louanges ou même de règlements de comptes entre clans adverses. Après cette séance exutoire destinée à absorber la colère, on adopte, à la majorité, le bilan sans débat opportun et clair. L'adoption des bilans moral et financier, signifie clairement qu'on est d'accord sur ce qui a été fait et sur combien ça a coûté de le faire. Ceci n'empêche pourtant pas, au sortir du conclave, de s'adonner aux critiques stériles d'ordre général qui ne servent à rien au lieu de prendre la parole pendant l'assemblée et de désigner clairement les choses reprochées au bureau exécutif. En second lieu, la présentation et la rédaction de ce qui tient lieu de bilan moral de la saison écoulée, car en réalité le document présenté est un document de résultats techniques, sont d'un niveau très médiocre. Il n'y a pas une seule page où on ne dénombre pas une multitude d'erreurs. Si on peut laisser passer les nombreuses erreurs d'orthographe imputables à l'inattention où à la transcription, il est inadmissible qu'un document émanant de la plus haute instance de l'athlétisme algérien puisse contenir autant de fautes de syntaxe et de rédaction. Quand on sait que le bilan moral est la consolidation des bilans des différentes commissions et autres directions permanentes au sein de la fédération, on est frappé par le nombre de personnes ayant travaillé sur le document. C'est incontestablement le résultat d'un travail d'équipe. Comment alors peut-on rédiger de la sorte sans que personne n'y prête attention et ne soit capable de corriger? En troisième lieu, le contenu du bilan financier m'interpelle. Car il reflète le coût de l'action du bureau exécutif. Cinq postes de dépenses me font réagir: - 346.678,12 DA de téléphone mobile. Combien la fédération a-t-elle de portables et qui y a droit? Je connais beaucoup de sections d'athlétisme qui fonctionnent toute une saison pour beaucoup moins que ce que dépense la fédération en note de téléphonie mobile. - 200.000,00 DA de recettes émanant des sponsors. Les promoteurs du meeting international ont argué, dans le but de maintenir son organisation, que 15.887.748,56 DA de frais d'organisation du meeting proviendraient des sponsors et non du budget fédéral. Y a-t-il eu des sponsors? Lesquels? Ont-ils contribué en nature et comment? Si c'est le cas, le coût du meeting s'en trouverait revu à la hausse, car les 15.887.748,56 DA qu'a coûté le meeting seront augmentés des apports des sponsors. - 3.036.630,00 DA pour l'encadrement technique. Qui est concerné par cet argent? Le niveau de résultats justifie-t-il un coût pareil? Sachant que la plupart des athlètes ayant obtenu des résultats au plan international sont entraînés et encadrés par des entraîneurs de club qui ne font pas partie de l'encadrement technique rémunéré à plus de trois millions de dinars. - 11.404.432,00 DA de billets d'avion à destination de l'étranger pour la seule équipe seniors (hors frais pour les Jeux de Pékin). Il s'agit là du troisième grand poste de dépense après le meeting international avec 15.887.748,56 DA et les 13.888.765,75 DA de dépenses liées aux activités sportives de haut niveau, lesquelles dépenses ne sont pas identifiées explicitement sur le bilan financier. Ce qui confère une orientation vers l'international et le voyage à cette fédération sortante. - 135.168,44 DA en fournitures de bureau me semblent être un montant désuet pour une instance fédérale qui englobe 48 Ligues de wilaya pour lesquelles elle est censée produire beaucoup de matière et beaucoup de rapports et de documents d'information et d'orientation. Comparé au montant cumulé des communications mobiles et fixes de 543.502,66 DA qui représente un temps de parole impressionnant, le montant des fournitures pour produire de l'écrit est dérisoire. Ce qui renseigne sur l'importance donnée au travail de coulisses et de l'intrigue au détriment du travail écrit, consigné et diffusé aux différents acteurs de l'athlétisme. En dernier lieu, sur les nombreux postulants à figurer sur la liste des experts du ministère de la Jeunesse et des Sports, trois candidats ont particulièrement retenu mon attention. Le premier, un scientifique, professeur de son état, s'occupe également du haut niveau. Le second, conseiller en sport, entraîneur émérite, a conduit avec brio la carrière de l'une de nos plus grandes championnes. Le troisième, homme de base sans envergure intellectuelle, a mené à sa ruine une des plus prestigieuses sections d'athlétisme de l'Algérie. Ces trois personnages ont un point en commun. Tous les trois ont été mêlés, à tort ou à raison, à des incidents similaires liés à la moralité. Ces incidents sont notoirement connus dans les milieux de l'athlétisme. Si l'incident en question a été retenu comme facteur disqualifiant pour les deux premiers, il n'en a pas été de même pour le troisième pourtant sanctionné administrativement au moment des faits par le directeur général de l'entreprise publique qui chapotait le club du même nom où notre homme exerçait. L'honorable commission de désignation des experts qui compte en son sein un membre influent, ancien ministre de tutelle de l'entreprise publique en question, a désigné notre homme membre de l'assemblée générale en qualité d'expert du ministère de la Jeunesse et des Sports. Mes interrogations ne trouveront certainement pas de réponse, car pourquoi ce qui est reproché aux uns, au point de les disqualifier, est totalement occulté chez d'autres? On ne peut même pas faire valoir la prescription car au plan chronologique, l'incident de notre homme se situe entre les incidents des deux autres. Le nouveau bureau fédéral fraîchement élu pourra mettre à profit l'expertise de notre homme pour ne pas appliquer au niveau fédéral la recette mortelle qui a conduit à son agonie le prestigieux club algérois. (*) Ancien athlète de haut niveau