Des films moyens et d'autres de bonne qualité ont été projetés, lundi dernier, à la ville des Roses, où a séjourné, il y a longtemps, Jean-Claude Brialy... Le théâtre Mohamed-Touri, de Blida, qui a vu évoluer il y a des décennies le grand acteur français Jean-Claude Brialy, continue d'abriter des courts métrages, tous genres confondus. Lundi dernier, une conférence de presse ayant pour thème «pourquoi un festival», fut animée par Phillipe Jalladeau et Lamine Merbah, respectivement directeur artistique du Festival des continents, ayant récemment déposé sa démission suite à un malentendu au niveau de la politique de gestion et de ligne à suivre de ce festival et notre grand réalisateur, membre du comité de lecture des scénarios en collaboration avec le ministère de la Culture. Aujourd'hui, explique Philippe Jalladeau, il y a une fourmilière de festivals dans le monde dont les objectifs tracés tendent à la déviation ou à l'aliénation. Il félicitera cependant les initiatives qui gravitent autour, à savoir les rencontres et les journées comme celles-là à Blida. Une des préoccupations majeures des jeunes cinéastes algériens présents a été incontestablement la question du manque de formation des réalisateurs en Algérie. A cela, Lamine Merbah dira qu'il ne peut y avoir d'école de formation habilitée à le faire, en raison de l'absence de professeurs diplômés du niveau doctorat, autrement dit, que le seul enseignement dans le cinéma ne peut être que supérieur et donc étatique et encadré par des professeurs déclarés à ce titre. L'après-midi a vu la projection de plusieurs courts métrages, dont trois algériens. Le premier, intitulé Comme une abeille de Mounes Khammar, fait état de la situation désastreuse du tiers-monde qui quémande sa pitance comme une abeille qui gigote et tourne en rond pour pouvoir subsister. Malgré son apparence légère et divertissante, ce film aborde néanmoins un sujet grave, notamment celui de la famine dans les pays africains et l'embargo imposé par les pays riches à ces pays dits émergents. Le second film est une oeuvre de fin d'études réalisée dans le cadre d'une formation pour réalisateur de l'Entv, dont a bénéficié Djamila Benferhat. Tourné en langue française, il est question d'un artiste- peintre, croupissant dans une chaise roulante et qui réapprend à vivre et retrouve le sourire grâce à une fillette qui lui demande de lui apprendre à dessiner. Un film produit par l'Entv mais réalisé grâce aux moyens personnels et rudimentaires de toute l'équipe. Si le scénario semble intéressant, les dialogues sont hélas à revoir...le Quotidien des automates, version II de Abdelghani Raoui, raconte dans un format d'animation surréaliste, l'ennui et l'oisiveté d'un individu qui refait toujours les mêmes gestes, mécaniques. Ce film dont le fond reste existentiel malgré tout, a été pixélisé, autrement dit, réalisé image par image. Quelques lenteurs peuvent ennuyer à cause des redondances, mais la pertinence des dialogues entre ces deux individus virtuels, donne toute l'épaisseur à ce film, à l'apparence légère, mais combien grave pour celui qui a cette impression d'«inutilité» cont-rairement à d'autres «égoïstes» qui se prennent pour «le centre du monde». Arrivé à la page internationale, un film tunisien pour commencer, Alfoudou de Abdelbar Mahmoud (14 minutes, 2008) et produit par Allae Eddine Slim, présent aussi comme les jeunes réalisateurs algériens à ces «journées», a permis de voir un film très émouvant. Un homme sur un radeau de pêche. Inlassablement, il souffre, seul au milieu de nulle part. Personne à qui parler. Il a même oublié la notion de la parole. A l'image d'un poisson, emprisonné dans un bocal, il traîne sa peau de chagrin dans cet océan de solitude qu'est sa vie, jusqu'au jour où il décide de se donner la mort peut-être... Véritable ode à la vie pourtant, ce film court, sans dialogues, donne la part belle à l'image qui parle pour nous. Visages rapprochés, scènes lentes et lumières blafardes ou des silhouettes diaphanes illustrent ce spectre de la vie qui s'étiole. Un être qui vivote entre ciel et terre. L'abysse de l'âme mise à nu dans ce tourbillon de silence criard. Ainsi s'exprima le réalisateur. Dans un autre registre, pourtant similaire, la solitude est encore omniprésente à travers deux films égyptiens de Chérif Elbendary. L'un intitulé Sabah el foul et l'autre La fin du jour. Le premier est rehaussé par la présence de l'actrice tunisienne Hind Sabry qui fait la prouesse de jouer dans un plan- séquence de 7 minutes. Elle regarde parfois la caméra sciemment comme pour interpeller le spectateur qui devient complice. Car la femme dont le mari est souvent absent, n'a personne à qui se confier, seulement son bébé. Un film émouvant et simple, aux magnifiques cadres, met en scène un personnage pas du tout comédien mais plutôt un grand technicien du cinéma, chef-décorateur, notamment du film Gladiateur et professeur de cinéma à l'Ecole du Caire où il a rencontré le jeune réalisateur avec lequel il a accepté de jouer dans son film. Autant dans A la fin du jour, que dans Sabah El Foul, on retrouve ce leitmotiv de l'oubli, l'obsession du temps, ou encore la peur de vieillir puis mourir, en ce qui concerne le second film. Ici, le père est taciturne, quand sa femme et son fils sourient et rigolent allègrement. Le silence est pesant et est bien rendu. Ce jeune réalisateur, Cherif Elbendary, fait partie de la nouvelle génération de cinéastes à suivre et à encourager, nous affirmera M.Philippe Jalladeau. Un espoir de renouveau pour le cinéma égyptien après la disparition de Youssef Chahine. Notons enfin que la programmation change de jour en jour, en fonction de la disponibilité des réalisateurs dont les invités étrangers sont hélas, absents en ce qui concerne la journée de lundi dernier.