La ville de Sour El Ghozlane tire orgueil et fierté d'être bâtie sur les ruines d'une cité dont des documents feraient remonter les origines à plusieurs siècles avant notre ère. Elle arbore ces mêmes ruines comme autant de titres de noblesse, et a fini par en porter effectivement un, celui de son fondateur (le duc d'Aumale). La ville de Sour El Ghozlane s'honorait d'abriter mercredi dernier un événement considérable : le retour de Jean-Claude Brialy sur les lieux de son enfance. La culture dans cette wilaya, pour ne pas dire dans tout le pays, est à ce point absente que cet événement est passé presque inaperçu. Aucune presse n'en a parlé et en dehors de la ville qui a accueilli le réalisateur, acteur et cinéaste français comme l'enfant prodigue, qui en a été informé ? Chose plus inadmissible encore : si tout le monde connaissait Brialy pour ses prestations talentueuses, qui parmi le commun des mortels savait qu'il a pour ville natale Sour El Ghozlane ? C'était pourtant la vérité, et Jean-Claude Brialy, qui a passé la journée de ce mercredi à flâner dans les rues de cette ville ancienne et à se recueillir sur les lieux où s'est passée son enfance, n'a eu d'autre but que de réveiller quelques bons souvenirs et au besoin de les consolider. Il l'a dit d'ailleurs lui-même : « Je suis venu prendre le rêve, pas la réalité. » Y a-t-il réussi ? Son premier mouvement a été de revoir la maison où s'est déroulée son enfance. A-t-il été déçu de découvrir qu'on l'a transformée en caserne ? En tout cas, son tact l'empêcha de ne rien montrer. Il s'est promené ensuite le long de la grande artère où, confiait-il, enfant il accompagnait sa mère dans ses promenades. Une foule d'admirateurs enthousiastes s'attachait partout à ses pas dans ce pélerinage coupé de long silence après les confessions et les évocations d'un temps révolu. Jean-Claude Brialy s'est ensuite rendu à l'école où il a été scolarisé et où il a débuté sa carrière artistique de façon fort modeste. Celle-ci pourtant, après des débuts fort timides (Bon Aloi, un court métrage) lui communiquera assez d'ardeur et de foi en ses talents pour aller chercher gloire et fortune à Paris, de 1954, année où il y débarque, jusqu'en 1981. (Les Malheurs de Sophie), en 1983 (Un bon petit diable). Il n'arrêtera pas de voler de succès en succès. Réalisateur tout aussi émérite, il donne en 1971 Eglantine où il fait revivre ses souvenirs d'enfance ainsi que beaucoup d'autres pleins d'humour : Bon copain, Chasse à l'homme, Julie pot de colle, etc. Au cours de ce pélerinage sur les lieux de son enfance, cet artiste de renommée mondiale s'est fait accompagner d'une équipe de journalistes de TV5 qui ont tout filmé dans le but d'en tirer un documentaire. Né donc à Sour El Ghozlane en 1933, comme l'atteste encore le registre d'état civil où il est inscrit et qu'il a consulté dans sa visite à travers la ville, Jean-Claude Brialy qui suivait alors son père dans ses mutations de caserne en caserne à travers l'Algérie de l'époque coloniale se rendra à Alger, à Blida et à Tamanrasset pour faire le plein de souvenirs. Ces mêmes souvenirs qui, par deux fois, lui ont arraché les larmes à Sour El Ghozlane devant une foule aussi émue que lui.