Laurent Gernignon a réussi à porter sur scène le témoignage poignant et dur du jeune Alleg, arrêté et abominablement torturé par les paras français, comme le furent de nombreux moudjahidine. Deux pièces de théâtre traitant de la guerre de Libération nationale et de la période coloniale en général sont programmées à Paris, avec pour ambition d'apporter un «autre regard» sur cette période de l'Histoire contemporaine. Jeudi prochain, au Centre culturel algérien de Paris, la pièce de Laurent Gernignon, «La Question», adaptée du livre dénonçant la torture écrit par Henri Alleg qui a subi dans sa chair cette pratique inhumaine, sera présentée en introduction à un débat sur la guerre de Libération nationale. Trois historiens, Jean-Louis Planche, auteur de «Sétif 1945: histoire d'un massacre annoncé», Olivier Le Cour Grandmaison, qui vient de publier un dernier ouvrage intitulé «La République impériale: politique et racisme d'Etat» et Slimane Aït-Sidhoum, auteur de «Les révoltes feutrées», en plus d'Henri Alleg, seront conviés à animer ce débat et à faire le point sur les travaux et recherches sur cette période de l'histoire nationale. Dans cette adaptation, Laurent Gernignon a réussi à porter sur scène le témoignage poignant et dur du jeune Alleg, arrêté et abominablement torturé par les paras français, comme le furent de nombreux moudjahidine et moudjahidate. L'homme de théâtre a expliqué, dans une interview, que «ce texte a aujourd'hui une portée universelle. Il nous parle, a-t-il dit, de ce qui se passe en Irak, à Guantanamo ou dans de très nombreux Etats de la planète». «Il contribue de manière claire à récuser tous les arguments des partisans de la torture comme méthode de renseignement légitime», a-t-il ajouté. L'autre pièce, «La comédie indigène», du metteur en scène d'origine tunisienne Lotfi Achour, est retenue dans le cadre du festival «Contre-feux», organisé au théâtre des quartiers d'Ivry. La pièce propose une mosaïque de textes et d'autres modes d'expression et de pensée qui ont contribué à légitimer le colonialisme. L'auteur a réécrit tous ces textes, qui ont donné à des dirigeants politiques français une «justification» à la mise en oeuvre de leur mouvement colonial. «A travers cette mosaïque de textes, j'ai souhaité traverser l'histoire des idées reçues, des préjugés raciaux, me demander comment et pourquoi on a construit de tels clichés», a expliqué Lotfi Achour, avant d'ajouter que sa volonté est celle d'«interroger les gens d'aujourd'hui sur ce qu'ils portent en eux, sur les clichés qu'ils produisent, mais aussi sur les images d'eux-mêmes qu'ils ont intériorisées».