«Nous avons même dit qu'un civil ferait l'affaire, quand bien même celui-ci n'aurait pas accompli son Service national». Une «source autorisée du ministère de la Défense nationale» a déclaré au Soir d'Algérie que les militaires ont «toujours souhaité la nomination d'un ministre de la Défense». La source non identifiée a même ajouté avec une pincée d'ironie: «Nous avons même dit qu'un civil ferait l'affaire, quand bien même celui-ci n'aurait pas accompli son service national» A qui s'adresse ce message et qui a passé outre les «souhaits» des militaires? Où se situe le blocage? S'agit-il d'un consensus non trouvé? Depuis la nomination de Liamine Zeroual, ministre de la Défense de l'époque comme président de l'Etat en 1994, ce poste demeure vacant. La non-nomination de ministre à ce poste dans le récent gouvernement de Benflis a reconduit cette tradition de «poste tabou». Lors de la campagne électorale, le nouveau Chef du gouvernement, Ali Benflis, avait abordé le sujet de la réforme de la Défense nationale qui devrait se baser sur la construction progressive d'une armée moderne et professionnelle et la réduction de la durée du service national. Cette sortie du SG du FLN devait inciter les observateurs à spéculer autour de la nomination d'un ministre de la Défense. Le MDN, qui gère le dossier de la professionnalisation et des dépenses, continue à être le seul département ministériel dépourvu de ministre. Pourtant le MDN est pareil à «l'ensemble des autres institutions du pays», à en croire cette source. La même source poursuit en accusant la commission Issad d'incompétence en déclarant: «L'incompétence chez certains ne doit pas être cachée par des attaques répétées contre l'institution militaire. Certains ont affirmé, par exemple, que l'armée est derrière l'assassinat du jeune Massinissa Guermah afin de mettre le Président Bouteflika en difficulté. Cela est archi-faux.» La source avance ce qui ressemble à une explication: «Nous avons invité la commission Issad à aller enquêter là où elle le voulait pour qu'elle ne reste pas aux portes des casernes comme elle le laisse entendre dans son rapport préliminaire. Même les militaires mis en prison pour avoir usé d'armes, elle n'a pas jugé utile de les rencontrer alors qu'elle avait l'autorisation de le faire». Pourquoi la commission est-elle restée «aux portes des casernes»? L'armée, qui ne fait pas de politique comme le claironne le chef de l'état-major Mohamed Lamari, a tout de même pesé de tout son poids sur le choix du Président de la République et du gouvernement: «A l'époque, notre souhait, à l'instar de tous les Algériens, était de choisir le moins mauvais de tous. L'ambition de l'ANP est que chacun assume convenablement ses missions. Le temps des béni-oui-oui doit être banni. C'est pour cela que nous estimons que le gouvernement actuel doit assumer pleinement ses devoirs. Cela nous paraît comme une exigence de l'heure». Qui sont les béni-oui-oui»? La source ne le dit pas. Les gouvernements passés sont-ils concernés par ce sobriquet? L'interviewer aurait dû acculer sa source pour apporter plus d'éclaircissements. Concernant les mesures prises par la présidence au profit des repentis, la source révèle: «L'amnistie, nous l'avons apprise au MDN comme l'ensemble des Algériens. Et, d'ailleurs, pour qu'il y ait amnistie, il faut d'abord un jugement». Et de poursuivre: «Au départ, il était clair pour nous que chaque terroriste voulant se rendre devait remplir un formulaire de déclaration sur l'honneur qu'il n'a pas participé à des assassinats. En revanche, cela ne devait en aucune manière l'absoudre de poursuites judiciaires si une enquête venait à confirmer son implication dans une tuerie». Rejoignant les déclarations du général-major Fodil Chérif, commandant de la 1re Région militaire au lendemain du massacre de Khraïcia il y a deux semaines, la source admet que la mobilisation des citoyens s'est considérablement atténuée «du fait d'un certain discours politique ambiant qui n'est pas pour maintenir intacte cette mobilisation. Bien au contraire». Les interrogations qui jalonnent cet article témoignent du trop-plein de généralités distillées à travers ces «révélations». En l'absence d'une structure claire et identifiée, les Algériens devront se rabattre sur les «généraux X» et «les sources autorisées» pour s'informer sur l'Armée quand ce ne sont pas les Souaïdia et autre Samraoui qui s'en chargent avec les implications qu'on connaît. La vacance du poste de ministère de la Défense favorise, ainsi et inévitablement, toutes les opacités.