L'absence d'activités de célébration du double anniversaire, une indifférence totale qui ne dit pas son nom, confirme la dépolitisation qui frappe la classe politique en Kabylie. La surenchère faite autour des valeurs démocratique et identitaire a fini par lasser plus d'un, si ce n'est tout le monde. Aujourd'hui, le phénomène de la dépolarisation des partis politiques, qui ont de tout temps récupéré tout ce qui est culturel, a donné un désintéressement total, une défection et laissé un vide. Ajouté à la dégradation du pouvoir d'achat et les multiples difficultés rencontrées par la population et la jeunesse en particulier, le fond est atteint. Aujourd'hui, la préoccupation populaire se situe ailleurs dans l'amélioration du cadre de vie, l'emploi etc. 20 avril, Jour de printemps. Un printemps revendicatif. D'une union forte, il y a 29 ans, on en est arrivé à un effritement total. Huit ans après les douloureux événements du Printemps noir, que reste-t-il du combat censé se poursuivre? Aujourd'hui, rien. Cette année, c'est à croire qu'on assiste à un non-événement, sauf respect aux quelques associations qui ont mis la main à la pâte, sombrant dans un folklore dont ont toujours rêvé les tenants du statu quo. La population de Béjaïa est-elle à ce point fatiguée? On est tenté de le croire. L'indifférence affichée l'atteste. Point de grands bouillonnements qui s'emparaient des acteurs politiques à l'approche de ces deux dates qui ont marqué, faut-il le préciser, l'histoire de la région. Point de marche au programme. Et si tel était le cas, l'échec s'en suivrait automatiquement. Les dernières célébrations sont là pour le confirmer. Hier c'était le calme plat. Exception faite de l'activité scientifique de la DJS à la Maison de la culture, aucun autre enthousiasme n'est à signaler. Les citoyens vaquaient normalement à leurs occupations. La commémoration du 20 Avril n'est pas à l'ordre du jour. On parle plutôt de l'érosion du pouvoir d'achat, la cherté de la vie, du chômage et du cadre de vie: «On a trop donné pour ne rien recevoir en contrepartie», déclarait ce citoyen sur un ton désabusé. Comme lui, d'autres pensent que «le combat de nos jours serait plus indiqué s'il est orienté vers les préoccupations de tous les jours». La rue ne parlera pas. Elle ne vibrera pas sous les pas des milliers de personnes comme ce fut le cas durant les années précédentes. «Que reste-t-il des rêves pour lesquels nous avons risqué nos vies, rien ou presque, notre priorité c'est avoir du travail et fonder une famille», fulmine Djamel, un étudiant qui a quitté les bancs de l'université depuis trois ans déjà mais qui n'arrive toujours pas à trouver un emploi. «Nos politiques devraient plutôt se pencher sur ce problème», ajouta-t-il. Le chômage, la désagrégation du tissus industriel, la cherté de la vie...voilà ce qui préoccupe. Les acteurs politiques paient les frais d'une politique de récupération de ce qui est symbole d'unité, oubliant de fait ce qui gangrène le simple citoyen. La facture est lourde. Il s'illustre avec le retour en force des partis catalogués de «pouvoir» dont les actions ont orientées vers les voeux de la population. Désabusée, trop souvent manipulée, la région de Kabylie veut changer d'air. Ses préoccupations sont ailleurs, dans des domaines autrement plus porteurs sur la vie de tous les jours. L'indifférence à l'égard de cette date symbole ne date pas d'aujourd'hui.. Cela est dû à des paramètres endogènes et exogènes au mouvement induisant l'effritement. Les tiraillements internes des structures, partis et organisations, dont le MCB et les Archs, ont fini par lasser plus d'un. Ajoutés aux erreurs stratégiques et les manoeuvres des tenants du pouvoir, le temps a fini par démobiliser.