Karim et son Ifrikya band ont littéralement mis le feu à la salle Ibn Zeydoun. Chose promise, chose due. Après nous avoir enchantés l'an passé avec Maghreb and friends lors de la seconde édition de Jazzayir emmené par 33 Tours, Karim Ziad est revenu, cette fois-ci, avec son groupe Ifrikya, étrenner de nouveau la scène algérienne et revoir son public admirateur. Mardi dernier, ce fut chose faite, puisque accompagné de ses cinq et déjantés musiciens: l'âme aussi joyeuse et enflammée, il mettra le feu à la salle Ibn Zeydoun en faisant voler en éclats les baguettes de sa batterie. Le public fort nombreux a mis la salle en ébullition. Trop de monde à l'intérieur, il y fait une chaleur suffocante et pour cause la clim est en panne, nous dit-on. Mais le public, garçons et filles qui assis, qui debout, fait fi de ce détail. Car son amour pour Karim et sa musique est bien plus fort que tout. Le public est d'emblée conquis par son répertoire qui marie avec allégresse et harmonie l'héritage afro-américain aux couleurs du jazz. Entouré de ses cinq musiciens, à savoir David Aubel au piano et à la flûte, Michel Alibo à la basse, Meni Mohamed à la percussion, Aziz Sehmaoui au chant, percussion et gumbri, Hamid Mestaghi, lui aussi, au chant, percussion et gumbri et enfin Vincent Mascart au saxophone. Karim entamera le concert dès 19h40 avec Constantine, morceau d'anthologie signé Youcef Boukella de l'ONB que l'on a le plaisir d'écouter sur son album Maghreb and friends. C'est une grande ovation et des youyous bien nourris pour le groupe que le public lui enverra continuellement et systématiquement au fur et à mesure que son plaisir augmente, séduit envoûté qu'il est par la performance remarquable des musiciens. Ces derniers enchaînent avec Ya ridjal dont l'intro, une douce volute sonore émanant d'une flûte enchanteresse, met l'âme en émoi. Captivé, le public suit avec attention et écoute religieusement Ya ridjal, un morceau qui nous parle terriblement tant il nous invite, nous Maghrébins, à nous unir pour la paix et la fraternité sur une musique d'inspiration cosmopolite. S'enchaîneront Ya djillali, The joker, Lebnia.. autant de titres aux consonances afro-maghrébines, aux relents mystiques nimbés de jazz qui mettront la frénésie dans la salle. Le public est emporté très loin par les chants des saints et des confréries, au bord de la transe, vers un monde de rêves et de magie. Marhaban Bikoum Indana chante Aziz, notre guide spirituel qui nous à plongera dans le feu de la Zaouia «Alger zina», lâche-t-il a cappella ce qui lui vaudra un tonerre d'applaudissements et toujours autant de youyous. Le temps s'accélère lorsque le refrain réclame Si el houari, a'tini el baroud. La salle est en effervescence, le public est déchaîné. Et c'est au tour de Djebar et Ben Issa du diwan Dzaïr de se joindre au groupe pour former un parfait diwan et invoquer les saints patrons et inciter à la danse notamment sous le prisme du karkabou qui annoncera Sandiya. L'on est aussi sous le charme de Yazid Ziad, frère de Karim, qui exécutera à la batterie un morceau décoiffant au beat rock kabyle à vous couper le souffle. Survoltée est l'ambiance dans la salle. Il fait chaud, très chaud, mais on continue à s'agiter, à crier, à bouger, à danser, à s'éclater sur les mélodies de Karim et son Ifrikya band qui clôtureront la soirée en apothéose vers 22 h après avoir donné le meilleur d'eux-mêmes dans une prestation solo qui vous remuera de l'intérieur et fera vibrer cette «goutte d'Afrique» qui coule en chacun de nous. Attiré comme un aimant, le public venu en masse assister à ce concert ne s'est pas trompé, car Karim, véritable bête de scène, a su communiquer à son public toute sa passion pour la musique. D'ailleurs, c'est lui qui le dit: «La musique c'est une passion, on ne peut qu'être passionné à fond sinon à un moment donné, on lâche».