Plus d'une centaine d'islamistes algériens ont été appréhendés depuis les attentats du 11 septembre 2001. Le pays, qui continuait, à ce jour, au nom d'une démocratie toujours bien pensante lorsque le mal est «ailleurs», de permettre que des islamistes algériens s'expriment et activent librement sur son territoire, en l'occurrence la Suisse, vient de décider le renforcement de ses mesures antiterroristes. Officiellement, cette mesure est justifiée par le souhait de ne pas voir le territoire helvétique se transformer en «place financière du terrorisme». Le ministre suisse de l'Intérieur, Ruth Metzler, juge «faible» la possibilité que la Suisse soit la cible d'une attaque terroriste, ajoutant qu'il n'est pas exclu qu'elle soit utilisée comme base de repli logistique et que «les terroristes cherchent à tirer profit de la place financière helvétique». Le «sanctuaire helvétique» continue toujours d'abriter une bonne douzaine d'islamistes algériens et que les investigations poussées ont désignés comme autant d'éléments impliqués dans des trafics d'armes au profit du GIA de 1993 à 1996. Les Mourad D'hina, Ouchène et consorts continuaient, jusqu'à une date récente, de bénéficier de tous les égards. De son côté, la justice bosniaque a arrêté, au bout de moins d'une année (septembre 2001, mai 2002), quinze islamistes algériens, dont sept accusés d'avoir été dans la nébuleuse d'Al-Qaîda, avant de transiter en Bosnie via la Tchétchénie, l'Albanie et la Bulgarie. A Francfort, le procès des 4 Algériens et du Franco-Algérien, le «groupe des 5 de Strasbourg» se poursuit. Selon l'acte d'accusation, les cinq hommes auraient suivi un entraînement intensif en Afghanistan, entre 1988 et 2000, dans les camps d'Al-Qaîda. Ce réseau est accusé d'avoir fomenté, fin 2000, un attentat à Strasbourg. Jeudi dernier, à l'audience, un témoin avait «blanchi» l'accusé Samir Krimou (31 ans), affirmant qu'il n'avait pas appartenu au réseau et qu'il n'avait, à aucun moment, fait partie de ceux qui sont allés en Afghanistan. Une source proche du juge antiterroriste, Bruguière, affirme que, depuis les attentats parisiens de 1995, au moins 300 islamistes avaient été appréhendés. Rachid Ramda a, toutefois, bénéficié d'une non-extradition. C'est ce que vient de décider la Haute Cour londonienne, à la suite de la demande formulée par Paris. Le ministre britannique de l'Intérieur, David Blunkett, avait décidé, en octobre dernier, d'extrader Rachid Ramda avant que celui-ci ne fasse appel. Soupçonné d'appartenir au GIA, cet Algérien de 32 ans avait été arrêté en Grande-Bretagne en novembre 1995, peu de temps après la vague d'attentats et a réussi jusqu'ici, par une série d'appels, à retarder son arrestation. Les juges de la Haute Cour ont cassé la décision du ministre de l'Intérieur et lui ont demandé de réexaminer le dossier, estimant qu'il n'avait pas «traité le problème de façon adéquate ou juste». Les magistrats ont relevé que certains éléments contre Ramda provenaient d'un coprévenu qui aurait, peut-être, été maltraité pendant son interrogatoire en France. La justice française souhaite juger Rachid Ramda pour sa participation présumée à deux attentats commis à Paris en 1995: l'un à la station de métro de banlieue Saint-Michel à Paris, qui avait fait huit morts et 150 blessés, le 25 juillet, et un autre devant la station de métro Maison-Blanche, qui avait fait 15 blessés, le 6 octobre. Obligés de quitter précipitamment Kaboul à la suite de la débâcle des taliban, les Algériens-Afghans se sont fait arrêter un peu partout entre Tirana et Sarajevo. Quant aux autres capitales européennes, Londres, Paris, Bonn et Genève, l'impératif de coordonner les actions avec les autorités américaines a mené à des restrictions draconiennes. Sale temps pour les islamistes algériens, en somme.