Quelle raison autre qu'une guerre de leadership peut profondément déchirer un parti politique? Le cas du Front national algérien (FNA) montre à bien des égards cette réalité palpable. Créé en 1999 par le président «indétrônable», Moussa Touati, ce parti est hissé comme troisième force politique du pays à l'issue des élections municipales et législatives de 2007. La formation de l'ancien douanier fait régulièrement face à des crises internes suite à la contestation, par ses cadres, de ses décisions et de sa conduite. La dernière en date remonte à quelques mois avant l'élection présidentielle du 9 avril dernier dont les conséquences sont ressenties aujourd'hui encore. Le contestataire Mohamed Benhamou accorde un mois à Moussa Touati pour redresser la barre et tenir un congrès extraordinaire. M.Touati dépose plainte contre Benhamou. Les tenants ne sont pas encore livrés et les aboutissants ne sont pas connus. Que s'est t-il donc passé? Pour bien comprendre les raisons de cette tempête et la situer dans son contexte réel, il faut remonter un peu dans le temps. Flash-back. A l'origine d'une crise multiforme Les bourgeons de la crise au FNA ont commencé leur éclosion à la veille des élections législatives du 17 mai 2007 qui ont vu la formation de Touati gagner 15 sièges au sein de l'APN. En souffrance de cadres et de militants capables de le représenter, la direction du parti a procédé au «recrutement» de personnes qui n'ont rien à voir avec le FNA pour le représenter et occuper les têtes de listes dans les wilayas. Il a ainsi offert son agrément à des dissidents d'autres partis. Le nomadisme politique a donc été la cause directe de la crise que couve le parti du moment que «les dissidents» sont ceux qui sont venus des autres formations pour des considérations «opportunistes». «Ce sont des personnes qui sont venues d'autres formations (...), des opportunistes et des nomades politiques qui se déplacent d'un parti à l' autre. Je vous cite l'exemple de l'affaire Djillali qui a démissionné du FNA en 2006 et qui est venu, je ne sais en qualité de quoi, organiser un congrès extraordinaire et s'autoproclamer président du FNA», a expliqué le président du parti dans une interview à L'Expression le 6 décembre 2008. Le congrès de Hammam Righa Remarquant que le président du parti n'agit qu'en fonction de ses désirs, les opposants de Moussa Touati ont organisé, le 27 novembre 2008, dans la wilaya de Aïn Defla, un congrès extraordinaire. Les congressistes ont destitué Moussa Touati des commandes du parti. L'instigateur du congrès, le Dr Djillali Abdelkhaleq, a été élu président du parti et Moussa Touati est devenu, selon eux, simple militant. A l'issue de ce congrès, le statut particulier du parti a été amendé, le bureau national devient le bureau politique composé de 15 membres. Un comité central composé de 350 membres et une commission exécutive de 48 membres ont été élus. Ce congrès a été énergiquement contesté par Moussa Touati qui était alors candidat officiel à l'élection présidentielle. Le mouvement de redressement a été avorté. Et fort heureusement pour Moussa Touati, le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales l'a rétabli dans ses droits en invalidant le congrès de Aïn Defla au début du mois de décembre et en confirmant la légitimité du deuxième congrès du FNA tenu en décembre 2007, au lendemain des législatives. Cette crise dépassée, le FNA butte sur une autre. Il faut dire que Moussa Touati a lâché prise en tentant de diriger le bateau tout seul et le naufrage n'a pas tardé. A la veille de l'élection présidentielle, la crise au FNA a pris une nouvelle tournure. Quelques députés, cadres et militants du parti ont accusé Moussa Touati de trahison, de fuite fiscale et d'autoritarisme. Le député de Tlemcen, M.Mohamed Benhamou, qui est à l'avant-garde de la contestation, avec 5 autres députés, ont même voté le 12 novembre lors de la révision de la Constitution contre les consignes du président du parti. Ils ont voté pour la révision alors que Moussa Touati a instruit ses députés de s'abstenir. M.Benhamou a révélé récemment à L'Expression qu'il a tenté, en vain, de convaincre M.Touati de présenter un candidat plus compétent que lui à l'élection présidentielle. Ce qui a été refusé en bloc par le premier responsable du parti en voulant à tout prix participer en personne à cette joute, au mépris de la base militante et des députés. Ainsi, pour M.Benhamou, l'ex-candidat, M.Touati, n'a ni les compétences intellectuelles ni le niveau culturel pour pouvoir présider l'Algérie. Devant l'intransigeance de Touati, un bras de fer entre les deux hommes a vu le jour et les conséquences ne cessent de tomber sur la tête de M.Moussa Touati. Et la crise a repris de plus belle. Election présidentielle, le grand tournant Etouffée le temps de la campagne et de la précampagne électorale, la crise au FNA a refait surface. Au lendemain de cette élection, M.Moussa Touati s'est trouvé devant la plus catastrophique des situations avec un résultat plus qu'humiliant: 2,04% des voix exprimées. M.Touati a accusé sa base militante de zéro. Cette dernière est montée au créneau. Benhamou commande le bateau et reproche au président du parti tous les défauts. Il accorde un mois à ce dernier pour changer de politique et convoquer un congrès extraordinaire. Moussa Touati dépose plainte contre Benhamou pour diffamation. Le feu a pris. C'est à la justice de statuer.