Le célèbre comédien Saïd Hilmi a assisté à l'ensemble des pièces présentées lors des premières journées maghrébines du théâtre d'expression amazighe, tenues à Tizi Ouzou du 7 au 12 mai 2009, à la Maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou. Rencontré dans la loge de la salle de spectacle, il livre ses impressions par rapport à cette première culturelle en Algérie. L'Expression: Est-ce qu'on peut avoir votre réaction concernant la tenue des premières journées maghrébines du théâtre d'expression amazighe auxquelles vous avez assisté? Saïd Hilmi: Je suis un enfant du théâtre radiophonique d'expression amazighe. C'est pourquoi j'ai tenu à assister à ce festival. Si les tabous sont cassés au sujet de l'amazighité, c'est grâce au Président. Il vient d'offrir une scène et c'est la première fois qu'un festival maghrébin de théâtre amazigh est organisé. Comme vous l'avez constaté, le public a répondu d'une façon parfaite. Il était présent. Nous avons relevé qu'il a des potentialités humaines qui éclatent. Les comédiens ayant pris part au festival, sont des bêtes de scène. J'ai remarqué aussi qu'il y avait derrière ce festival, une culture. On sentait les lettres se balader. J'ai senti toute une poésie à travers ces journées que j'ai vues du début jusqu'à la fin. Cette première édition du festival permet-elle d'avoir une idée de ce que sera l'avenir du théâtre d'expression amazigh en Algérie? Je constate que l'Etat a fait un pas de géant puisque ces journées théâtrales sont couvertes par la chaîne de télévision amazighe. Maintenant, que va devenir ce théâtre? Ceci est une autre question. Il faudrait offrir les moyens à tous les théâtres et à toutes les expressions. On devrait en faire une culture nationale. Le théâtre amazigh existe et il a fait un grand pas en avant. A la veille de mes soixante-dix ans, je suis jaloux car j'aurais voulu que ceci se passe du temps où j'étais jeune afin de pouvoir m'éclater sur scène. Justement, du temps où vous étiez jeune, aviez-vous pensé, à un moment donné, qu'il arriverait un jour où le théâtre amazigh deviendrait une réalité et que ce serait l'Etat lui-même qui parrainerait un festival dans ce domaine? C'est important car des jeunes d'aujourd'hui ont du mal à apprécier les victoires arrachées par la question berbère... Je dirais à ces jeunes, qu'à notre époque, tout ce qui se faisait en tamazight était considéré comme théâtre clandestin. Avez-vous des critiques à adresser aux jeunes comédiens ayant pris part à ce festival? Je ne veux pas faire de critiques car ils sont sur la bonne voie. Par exemple, dans la pièce que nous venons de voir, Business is business, les comédiens étaient à l'aise sur scène. Toutefois, il y a un respect trop schématique des mouvements scéniques mais il peuvent faire dix fois mieux que cela, en multipliant les répétitions. Selon vous, quel pourrait être l'apport de la chaîne de télévision amazighe lancée récemment pour le théâtre amazigh et pour la culture berbère en général? Ce n'est pas parce que c'est une chaîne de télévision amazighe qu'il ne faudrait pas se montrer exigeant avec la qualité des programmes. Il faudrait impérativement oeuvrer à ce que cette chaîne propose des produits de qualité en ouvrant les portes aux montagnards car ces derniers ont du génie. Il y a des génies populaires et une culture orale chez nous. Cette chaîne est un acquis, faisons bien, faisons mieux.