«C'est un général d'opérette qui veut réveiller une affaire qui s'est essoufflée (...) c'est inconcevable.» Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion des droit de l'homme, Farouk Ksentini, a affirmé hier que la levée de boucliers sur l'affaire des moines de Tibhirine n'est autre qu'une volonté de nuire à l'Algérie. «Il y a une volonté politique de nuire à la réputation de l'Algérie», a déclaré M.Ksentini en exclusivité à L'Expression en marge de la réunion co-organisée par le quotidien arabophone Ech Chourouk, et l'ancien détenu de Guantanamo, Sami El Hadj. «Cette affaire a une connotation politique», a-t-il affirmé ajoutant que «c'est un général d'opérette qui veut réveiller une affaire qui s'est essoufflée (...) c'est inconcevable, je me demande comment des juges d'instruction ont pu prendre en considération des propos et un témoignage inconsistants». C'est ainsi qu'a réagi Farouk Ksentini à la polémique naissante autour de l'affaire de l'assassinat des sept moines français de Tibhirine, 13 ans après les faits. En effet, l'enquête sur la mort des moines enlevés en mars 1996, a été relancée avec «le témoignage» de l'ancien attaché militaire de l'ambassade de France à Alger, le général François Buchwalter, qui était en poste à Alger au moment des faits, attribuant l'assassinat des religieux à l'armée algérienne et non au groupe terroriste du GIA. Ce général, entendu le 25 juin dernier, par le juge d'instruction antiterroriste Marc Trévidic, a insisté sur le fait qu'il s'agissait d'une «bavure de l'armée algérienne» gardée secrète par Paris. Il a alors expliqué avoir appris seulement quelques jours après les obsèques des moines, que ceux-ci avaient trouvé la mort lors d'une attaque de l'armée algérienne sur un bivouac dans une zone entre Blida et Médéa. Cette information ou plutôt confidence, lui aurait été délivrée par un ami algérien, dont le frère était aux commandes de l'escadrille d'hélicoptères ayant participé à cette opération. Le général a expliqué au juge que «cette zone était vidée, ça ne pouvait être qu'un groupe armé. Ils ont tiré sur le bivouac (...) Une fois posés, ils ont découvert qu'ils avaient tiré notamment sur les moines. Les corps des moines étaient criblés de balles. Ils ont appelé par radio le Ctri de Blida». Un témoignage indirect donc, d'une prétendue «bavure militaire» puis d'une macabre mise en scène sans preuves matérielles concrètes pour le prouver que le général aurait transmise aux autorités françaises. Puisque dans sa déposition, le général a expliqué avoir écrit tout cela dans des rapports adressés au chef d'état-major des armées françaises et à l'ambassadeur de France en poste à Alger au moment des faits, Michel Lévêque qui, selon lui, n'ont pas donné suite à ce dernier. Les sept moines avaient été enlevés dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 par un groupe armé d'une vingtaine d'hommes. Action revendiquée deux mois plus tard, soit le 21 mai, par le Groupe islamique armé de Djamel Zitouni, le GIA annonçant leur exécution. Ce n'est que dix jours après que les autorités algériennes ont annoncé la découverte des têtes seulement des religieux.