L'obstacle majeur à la mise en pratique de ce tant vanté Nepad reste la nature non démocratique de plusieurs régimes politiques africains. L'Union africaine (UA) est née hier à Durban en Afrique du Sud dans un contexte d'extrême misère de tout un continent. Et l'une des principales missions de la nouvelle organisation panafricaine est sans doute la mise en oeuvre du fameux Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique), cette initiative africaine visant à définir les moyens du développement de l'Afrique et à y associer les partenaires publics et privés internationaux et du continent. Or, les régimes politiques africains dont plusieurs sont en place depuis les premières années de la décolonisation et ne se maintiennent que par la force, car souvent contestés, ont-ils les moyens de leur politique? Celle de mettre en pratique un nouveau type de développement viable pour leurs peuples par le drainage des investissements internationaux sources d'emplois et donc de toute prospérité. Pour ce faire, et dans ce cadre de partenariat à l'ère de la mondialisation des échanges commerciaux, ils ont fait appel aux riches pays industrialisés du Nord regroupés dans le G.8 pour les aider à sortir de leur dramatique situation. Celle-ci se résume à l'heure actuelle à des chiffres plus qu'alarmants : aujourd'hui, en Afrique, plus de 340 millions de personnes, soit la moitié du continent vivent avec moins d'un dollar U.S par jour. Le taux de mortalité infantile (moins de cinq ans) y est de 140 pour 1000 et l'espérance de vie à la naissance est seulement de 54 ans. 58% seulement de la population a accès à l'eau potable. Or, malgré cette situation d'agonie du continent, les pays du G.8 ne semblent pas très enthousiastes pour s'engager effectivement dans la résolution des problèmes africains. Pourquoi ces hésitations? Connaissant parfaitement la nature et l'évolution des différents régimes politiques qui président aux destinées des peuples africains, les dirigeants du G.8 ont émis des conditions draconiennes avant leur éventuel secours à l'Afrique. Leurs recommandations en ce sens adoptées à l'issue des travaux du récent sommet de Kananaskis au Canada sont sans équivoque. Les pays les plus riches de la planète ne peuvent contribuer à la concrétisation du Nepad qu'une fois l'instauration de la véritable démocratie dans les pays africains, c'est-à-dire le départ des régimes dictatoriaux, autoritaires et impopulaires qui essaiment sur le continent, l'avènement d'une bonne gouvernance et une bonne gestion des finances publiques à travers une lutte réelle contre les trafics en tout genre et contre la corruption. En fait, les réticences des pays riches à s'impliquer réellement dans ce nouveau partenariat avec les Etats africains découle de leur constat selon lequel nombre de pays du continent sont gangrenés par une corruption endémique et toute éventuelle nouvelle aide pourrait être détournée à des fins autres que celles liées directement au développement et au bien-être des populations africaines. Autrement dit, désormais, ce sont les pays occidentaux qui fixeront les critères de démocratisation et de crédibilité des Etats africains, si jamais ils participent à ce partenariat avec les pays africains. Il n'empêche que le Comité des chefs d'Etat et de gouvernement pour la mise en oeuvre du Nepad vient d'estimer, à l'issue de sa rencontre à Durban, que le plan d'action adopté par le G.8 à Kananaskis est «concret et porteur». Alors le continent de tous les malheurs, l'Afrique, est-elle sur le point de sortir des sentiers battus du passé? Si des pays africains comme l'Algérie, le Nigeria, l'Afrique du Sud, ou le Sénégal et l'Egypte, principaux artisans de ce schéma de coopération avec l'Occident, peuvent, au vu de leurs potentialités propres, relever ces défis du troisième millénaire, qu'en sera-t-il de tous les autres ravagés par la famine et la guerre et qui ne pourront pas satisfaire aux exigences du libéralisme triomphant?