alors que les démunis et les nantis peuvent accéder au logement sans difficulté ou presque, les cadres intermédiaires n'ont pas cette chance. 200.000 demandes de logement sont recensées chaque année et le programme gouvernemental vise justement à en construire autant pendant ce même laps de temps. Il n'y a donc pas de quoi résorber le déficit actuel qui est proche du million d'unités si l'on se satisfait à ne répondre qu'à la demande additionnelle. Mais même si l'offre devait être équivalente à la demande, ceci est encore loin d'être une solution à des milliers de homeless qui rêvent d'un toit. Tous ne sont pas égaux devant le revenu. Or, c'est l'un des critères essentiels pour pouvoir accéder à une aide de l'Etat en matière d'acquisition de logement. Si l'on est pauvre, soit un ménage qui dispose d'un revenu mensuel de moins de 12.000 dinars, ce qui équivaut au salaire national minimum garanti, il y a la possibilité d'être logé presque exclusivement aux frais de l'Etat. Mais si un ménage dépasse ce montant, les possibilités d'entrer en possession d'un logement se rétrécissent comme peau de chagrin. Les cadres moyens pouvaient se rabattre sur l'offre de l'Aadl qui n'exigeait qu'un plafond de 25.000 dinars pour formuler une demande de logement. Cela n'est plus possible actuellement car le ministre de l'Habitat, Noureddine Moussa, a décidé de suspendre cette formule. Il estime que les offres mises sur le marché grâce au logement social participatif ou autres seraient suffisantes pour satisfaire les demandes des citoyens. Or, il n'en est rien. Jugez-en plutôt: pour le LSP, un couple disposant d'un salaire cumulé de 72.000 dinars est exclu de facto de cette formule. C'est à se demander si c'est un crime que d'être moyennement bien payé. Est-ce que les cadres intermédiaires sont condamnés à être des sans-toit pendant toute leur vie? Suivant cette logique, une certaine catégorie de citoyens ne pourra jamais entrer en possession de ce bien qu'est une habitation. Les prix de l'immobilier flambent. Même si l'on cumule les salaires de toute une carrière, on est encore loin du compte. D'ailleurs, cette problématique des cadres intermédiaires n'est pas issue de cette conjoncture particulière. Il en a toujours été ainsi. Est-ce alors le logement qui est cher ou ce sont les salaires qui sont trop bas? L'architecte Larbi Rahmoune penche pour la seconde hypothèse. Sur le marché, les F3 ne pourraient certainement pas être cédés à moins de 400 millions de centimes dans certaines régions du pays. Dans les centres-villes, il n'est pas rare qu'un appartement soit cédé à plus d'un milliard de centimes. Tandis que certains promoteurs proposent des F3 à pas moins de 14 millions de dinars. Sans aide de l'Etat, il ne reste pas beaucoup d'opportunités pour l'acquisition du logement. C'est ce qui fait que les familles élargies demeurent un modèle largement répandu. De ce fait, les enfants, même lorsqu'ils ont grandi, demeurent toujours logés chez leurs parents. Les astuces ne manquent pas pour mettre toujours plus de monde dans un espace qui ne veut jamais s'étendre. On réduit la taille de la cuisine, on réduit l'espace de la salle de bains, et on fait de même avec les couloirs juste pour gagner quelques mètres carrés afin de marier le moins jeune de la famille. En l'absence de cette solidarité, il y a toujours le choix d'avoir recours à la location qui n'est pas non plus donnée. En ville, il n'y a pratiquement pas de loyer qui soit disponible à moins de 20.000 dinars. A titre d'exemple, un F3 au quartier des Anassers d'Alger est loué à 25.000 dinars sans parler des charges, électricité, gaz, et eau. C'est un fardeau qui grève considérablement le budget des ménages, sans compter la pression psychologique qui s'installe au fil des années en voyant le rêve d'accès à la propriété s'évanouir progressivement. Conscient de ces difficultés, le gouvernement a instauré récemment une nouvelle règle d'accès au logement. Malheureusement, il n'y a que les fonctionnaires qui sont autorisés à contracter des crédits à hauteur de 1% d'intérêt pour financer leur achat. Les autres, tous les autres, ces laissés-pour-compte dont le seul tort est d'être moyennement bien rémunérés, n'ont qu'à prendre leur mal en patience.