Le silence et la monotonie occupent une place prépondérante dans un rythme de vie rural en net déphasage avec le développement économique global. Les émigrés sont tous repartis. Les villages reprennent leur vie habituelle. Ce n'est pas uniquement le départ de ces derniers qui est visible mais également celui de certains villageois qui repartent vers les grandes villes du pays. Le silence et la monotonie reprennent leur place prépondérante dans un rythme de vie rural en net déphasage avec le développement économique global. En effet, dans certains villages de la haute Kabylie, le rythme de vie et le quotidien ambiant ont vu leur cadence baisser, depuis la deuxième moitié du mois d'août. Les chants des fêtes réunissant les émigrés chaque été avec leurs familles ne se font plus entendre avec l'arrivée du mois de Ramadhan. Tous sont repartis y compris les villageois exerçant sur le territoire national. Dans les villages, il ne reste plus que les vieux, les jeunes chômeurs et les femmes au foyer. Faute de lieux de loisirs, les oisifs fuient le silence du village. La monotonie a repris droit de cité. Les places des villages sont désormais désertes. Elles demeureront ainsi jusqu'aux prochaines vacances d'été. Mais, n'a-t-on jamais cherché à remédier à cela? De prime abord, aucune partie ne peut prétendre détenir la solution puisqu'aucune ne semble intéressée par ce phénomène qui prend une ampleur alarmante depuis une décade. L'émigration, les contraintes du marché de l'emploi national, essentiellement concentré au Sud et dans les grandes villes et le terrorisme, n'expliquent pas à eux seuls l'émergence du phénomène des villages fantômes. Le problème est loin d'être conjoncturel. Il trouve son origine dans la conception et la définition même de la notion de développement dans notre pays. Ne sommes-nous pas enclins à confondre développement rural et développement agricole? L'essor de nos villes et villages se trouve encore tributaire des mentalités qui n'ont pas dépassé les définitions d'avant la Révolution française. La confusion entre ces deux concepts a engendré, hélas, la paralysie de l'activité agricole et le dépeuplement du monde rural. Nos responsables entretiennent encore l'amalgame dans les définitions. Pourtant, les études contemporaines s'accordent sur le fait que la ruralité relève des domaines culturel et sociologique alors que l'agriculture relève de l'économique. Aujourd'hui en Europe, l'exode vers les villes pose, certes, de sérieux problèmes dans la cohésion sociale du monde rural mais il n'empêche que l'activité agricole est en plein essor. A méditer. En Algérie, les plans de développement entretiennent encore cette confusion. Résultats: des budgets colossaux sont engloutis et des villages continuent à se vider dans la même proportion. Des villages fantômes et une agriculture moribonde. Si l'agriculture attend juste d'être entre les mains des spécialistes et des agriculteurs, le monde rural, quant à lui, attend des plans de prise en charge sociologique et socioéconomique, affaire de spécialistes. Le développement de l'économie agricole peut entraîner l'amélioration de vie du monde rural et vice versa, mais jamais l'un sans l'autre. Enfin, il convient de signaler que les wilayas de Kabylie représentent la preuve vivante que l'activité agricole ne peut pas, du moins à court terme, être un vecteur de développement du monde rural. La nature foncière privée et dramatiquement morcelée empêche toute activité agricole intensive donc économiquement viable. De ce fait, d'autres secteurs économiques doivent être développés pour améliorer les conditions de vie du monde rural. Pour le moment, seuls les émigrés apportent avec eux une ambiance éphémère qui ne dure que l'espace des vacances estivales.