«Je suis une sorte de trait d'union entre deux générations et je me dois de préserver l'authenticité et l'originalité du côté artistique des fondements de la confrérie à laquelle je m'identifie». «La confrérie authentique des Aïssaoua doit être préservée du phénomène de la poussée effrénée des troupes folkloriques qui menacent son originalité», a estimé cheikh Zineddine Benabdallah durant la vente dédicace de son dernier album, intitulée la Ziara (la visite), organisée en ce début de semaine à la librairie Media Plus. Les fondements des préceptes de cette confrérie «doivent être respectés et scrupuleusement conservés afin que le genre aïssaoui soit en harmonie avec la ligne tracée par son père spirituel, le Cheikh M'hamed Benaïssa de Meknès (Maroc)», a souligné cet artiste chercheur, adepte de ce genre musical qui remonte au XVe siècle. La tariqa Aïssaouie est basée sur trois fondements, le spirituel à base des Adhkar, (invocations, prières) consacrés au Tout-Puissant, le philosophique représenté par la Laâba (jeu) ou démonstrations de certaines vertus miraculeuses à l'image des jeux de Sefoud ou petites épées concentrés sur un point fixe sur le flanc du corps devenu insensible d'un sujet en état de transe et enfin, artistique (Medh), a rappelé le même chercheur. Le côté artistique distingue d'ailleurs les Aïssaoua des autres confréries qui se passent de ce troisième axe comme c'est le cas des Taraïk de Hansala, de Tidjania et El Kadiria, a affirmé le cheikh, ajoutant que ce pilier nécessite d'être «entretenu et légèrement adapté en apportant, sans nuire, de subtiles modifications» pour qu'il soit au diapason de l'air du temps. Cette «légère adaptation» est, en fait, l'introduction de certains sons, «propriété» de la musique moderne, comme la guitare basse, la guitare acoustique et la batterie pour l'accompagnement. Ces nouveaux sons, «parfaitement cohérents avec le bendir, la derbouka, le tar et naghat (tambourins), instruments de base des meddah aïssaoui, doivent être maniés de façon harmonieuse et habile par un orchestre qui accompagne la traditionnelle chorale dont les membres sont impérativement des disciples de la tariqa des Aïssaoua», a expliqué le cheikh Zineddine Benabdallah. «La tariqa Aïssaouie est tout à la fois, une culture, un art et une doctrine qui repose sur le principe de générosité, d'humilité, de dévotion, de ferveur, de communion et de la foi absolue en Dieu», a affirmé M.Benabdallah, considéré comme l'un des derniers disciples ayant hérité du legs et des enseignements de son regretté maître cheikh Mohamed Benjalloun, précurseur de cette confrérie à Constantine. Devenu cheikh à son tour, l'élève qui vient juste de mettre sur le marché son vingtième album dédié à ce genre musical, s'évertue à conserver la tariqa qui lui a été transmise et veille à ce que les préceptes de la wassiyya (recommandation) du père spirituel, Benaïssa ne soient pas altérés. «Je suis une sorte de trait d'union entre deux générations et je me dois de préserver l'authenticité et l'originalité du côté artistique des fondements de la confrérie à laquelle je m'identifie», a assuré cet adepte de la doctrine aïssaoui; et de conclure: «Je suis fier d'avoir eu pour condisciples les chouyoukh Abid Charef Belkacem, Salim Mezhoud et Mohamed Merzoug Bouhali.»